Annuntio vobis gaudium magnum. Habemus Papam. Eminentissimum ac Reverendissimum Dominum, Dominum Josephum Sanctae Romanae Ecclesiae Cardinalem Ratzinger qui sibi nomen imposuit : Benedictum XVI.
de Saint Pierre
Je me réjouis, mes bien-aimés, de votre affection filiale, et je rends grâces à Dieu parce que je reconnais en vous la charité qui constitue l'unité chrétienne. Comme l'atteste en effet votre affluence aujourd'hui, vous comprenez que le retour de cet anniversaire a le sens d'une joie commune, et que la fête annuelle du pasteur est à l'honneur de tout le troupeau.
Car toute l'Eglise de Dieu est organisée en degrés distincts, de sorte que l'intégralité de son corps sacré est formée de membres divers; cependant, comme le dit l'Apôtre, dans le Christ Jésus nous sommes tous un (I Co XII,13). Nos offices nous distinguent, mais tout membre, si humble soit-il, est en relation avec la tête. Dans l'unité de la foi et du baptême nous formons donc, mes bien-aimés, une société sans castes. La dignité est, chez nous, générale, et nous pouvons dire selon ces paroles du Bienheureux Apôtre Pierre : « Et vous-mêmes, comme des pierres vivantes, vous vous dressez en un édifice spirituel, en un sacerdoce saint, qui offre un sacrifice spirituel, agréable à Dieu par Jésus-Christ. » Et plus loin : « Mais vous, vous êtes une race choisie, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis. » (IP. II,5-9). Car de tous ceux qui sont régénérés dans le Christ, le signe de la croix fait des rois, et l'onction de l'Esprit-Saint fait des prêtres ; si bien qu'outre le service spécial qui constitue notre ministère, tous ceux qui sont chrétiens en esprit et en vérité savent qu'ils sont de sang royal et de rang sacerdotal.
Quoi de plus royal, en effet, qu'une âme soumise à Dieu et maîtresse de son corps ? Quoi de plus sacerdotal que de vouer à Dieu une conscience pure et de lui présenter sur l'autel du cœur le sacrifice sans tache de la piété filiale ? Puisque ce sacrifice est, par la grâce de Dieu, notre sacrifice à tous, c'est un acte religieux et louable que de vous réjouir de cet anniversaire comme de votre propre honneur. Ainsi le sacrement un du pontificat sera célébré dans tout le corps de l'Eglise. Avec l'huile de la bénédiction il se répand sans doute plus abondamment sur les degrés supérieurs, mais ce n'est pas non plus avec parcimonie qu'il descend aux inférieurs.
Jésus donne les clefs du Royaume à saint Pierre, par Rubens. Pais mes brebis. Pais mes agneaux (Jn XXI) |
Bien que nous ayons donc grand sujet de joie commune dans ce don que nous partageons, mes bien-aimés, nous aurons encore une raison plus vraie et plus excellente de nous réjouir si nous n'en restons pas à nous considérer nous-mêmes, humbles gens : il est beaucoup plus utile et plus digne d'élever les regards de notre âme pour contempler la gloire du bienheureux Apôtre Pierre, et de fêter cette journée en vénérant celui sur qui la source même de tous les dons a coulé si abondamment. Non seulement un grand nombre de dons ont été pour lui seul, mais aucun n'a passé à d'autres sans qu'il y ait part.
(…) Pierre est choisi, seul du monde entier, pour être préposé à l'appel de toutes les nations, et aux Apôtres, aux Pères de l'Eglise. Bien qu'il y ait dans le peuple de Dieu beaucoup de prêtres, beaucoup de pasteurs, c'est proprement Pierre qui gouverne tous les fidèles, comme c'est en dernier ressort le Christ qui est leur Chef. Mes bien-aimés, Dieu a daigné donner à cet homme une grande et admirable part de sa puissance. S'il a voulu que certaines choses lui soient communes avec les autres princes de l'Eglise, il n'a jamais donné que par lui ce qu'il a donné aux autres.
Le Seigneur demande à tous les Apôtres ce que les hommes pensent de lui. Leur réponse est commune aussi longtemps qu'ils expriment l'incertitude de l'intelligence humaine. Mais quand il demande le sentiment des disciples, celui qui est premier dans la dignité apostolique est premier pour confesser le Seigneur. Il dit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu Vivant. » Et Jésus lui répond : « Bienheureux es-tu, Simon fils de Jean, car ce n'est pas la chair et le sang qui te l'ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux. » (Mt XVI 16-17). Ce qui veut dire : Tu es bienheureux parce que mon Père t'a enseigné. L'opinion terrestre ne t'a pas trompé, mais l'inspiration du ciel t'a instruit. Ce ne sont pas la chair et le sang qui t'ont éclairé, mais Celui-là même dont je suis le Fils Unique.
Peinture contemporaine. Le Saint Père conduisant la barque de l'Eglise. |
Cette confession de Pierre, les portes de l'enfer ne pourront l'empêcher de se diffuser dans le monde entier ; les liens de la mort ne l'empêcheront pas. Car cette parole est parole de vie ; elle porte au ciel ceux qui la confessent, et jette en enfer ceux qui la renient. A cause d'elle, le bienheureux Pierre s'entend dire : « Je te donnerai les clés du royaume des cieux : et tout ce que tu lieras sur terre sera lié dans le ciel, et tout ce que tu délieras sur terre sera délié dans le ciel. » Ce pouvoir a passé même aux autres Apôtres, et l'institution en est devenue commune à tous les chefs de l'Eglise. Mais ce n'est pas pour rien que le Seigneur remet à un seul ce qui sera la charge de tous. Il confie ce pouvoir spécialement à Pierre, parce que Pierre est préposé à tous les princes de l'Eglise, comme leur forme. Le pouvoir de lier et de délier reste le privilège de Pierre, en tout lieu où le jugement est porté en vertu de la justice de Pierre. Ni la sévérité ni l'indulgence ne peuvent être excessives, là où rien n'est lié ni délié sinon ce que le bienheureux Pierre a délié ou lié.
C'est Dieu Lui-même qui nous bénit et nous conduit par la parole et l'exemple du successeur de saint Pierre. |
(…) Voyant donc, mes bien-aimés, quelle puissante protection a été instituée divinement pour nous, il est juste et raisonnable que nous nous réjouissions des mérites et de la dignité du Chef de l'Eglise. Rendons grâces au Roi éternel, à notre Rédempteur le Seigneur Jésus-Christ, d'avoir donné une si grande puissance à celui qu'il a fait Prince de toute l'Eglise. Car s'il arrive en notre temps qu'une chose soit bien faite ou bien réglée par nous, il faut l'attribuer à l'œuvre et au gouvernement de celui à qui il fut dit : « Et toi, quand tu seras revenu, confirme tes frères » ; et encore, après la Résurrection, en réponse mystique à son triple aveu d'amour, le Seigneur dit à Pierre : « Pais mes brebis. » C'est bien ce qu'il fait encore. Le pasteur charitable accomplit le commandement du Seigneur, nous fortifiant par ses exhortations et ne cessant de prier pour nous afin que nous ne soyons vaincus par aucune tentation. Or, s'il étend ses soins paternels, comme nous devons en être convaincus, à tout le peuple de Dieu - partout - combien plus daignera-t-il se dépenser pour ceux qu'il élève chez lui [à Rome], et au milieu desquels il repose, sur le lit de sa bienheureuse dormition, dans cette même chaire où il présida aux débuts de l'Eglise. Dédions-lui donc cette fête, anniversaire du jour où nous avons reçu notre charge. C'est son patronage qui nous a valu de monter sur son siège, par la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ qui vit et règne avec Dieu le Père et l'Esprit Saint dans les siècles des siècles. Amen.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire