Du R.P. Henri-Dominique Lacordaire,
op. : Discours sur la vocation de la nation française prononcé à la
Cathédrale Notre-Dame de Paris, le 14 février 1841
Non loin des bords du Rhin, un chef barbare
livrait bataille à d'autres barbares : ses troupes plient ; il se souvient dans
le péril que sa femme adore un Dieu dont elle lui a vanté la puissance. Il invoque ce Dieu, et, la victoire ayant
suivi sa prière, il court se prosterner devant le ministre du Dieu de Clotilde
: «Doux Sicambre, lui dit saint Remy,
adore ce que tu as brûlé, et brûle ce que tu as adoré». Ce Dieu,
Messieurs, c'était le Christ ; ce roi, cette reine, cet évêque, cette victoire,
c'était la nation franque, et la nation franque était la première nation
catholique donnée par Dieu à Son Église.
Ce n'est pas moi qui décerne cette louange
magnifique à ma patrie ; c'est la papauté, à qui il a plu, par justice,
d'appeler nos rois les fils aînés de l'Église. De même que Dieu a dit à Son Fils de toute éternité : Tu
es Mon premier né, la papauté a dit à la France : Tu
es ma fille aînée. Elle a fait plus, s'il est possible ; afin
d'exprimer plus énergiquement ce qu'elle pensait de nous, elle a créé un barbarisme
sublime : elle a nommé la France le Royaume christianissime, - Christianissimum
regnum. Ainsi, primogéniture
dans la foi, excellence dans la foi, tels sont nos titres, telle était notre
vocation.
Simon Vouet, saint Louis recevant la sainte Couronne d'épines |
Y
avons-nous répondu ? Car il ne suffit pas d'être appelé, il faut répondre à sa
vocation. Avons-nous répondu à la nôtre ? C'est demander ce que notre patrie a
fait pour Jésus-Christ et Son Église.
L'Église a couru trois périls suprêmes :
l'arianisme, le mahométisme, le protestantisme ; Arius, Mahomet, Luther,
les trois grands hommes de l'erreur, si toutefois un homme peut être appelé
grand lorsqu'il se trompe contre Dieu.
(…) Après ces deux honteuses défaites (l’arianisme et l’Islam défait à Poitiers
par Charles Martel), le démon comprit qu'il n'atteindrait jamais son but en
s'attaquant directement à Jésus-Christ. Car
Jésus-Christ et l'Évangile, c'est la même chose, et l'Évangile va trop droit au
cœur des hommes pour espérer de l'y détrôner. Mais l'Église, ce n'est plus
Jésus-Christ qu'indirectement ; elle est composée d'hommes sujets aux
faiblesses et aux passions de l'humanité : on pouvait peut-être, dans ce côté
humain, ruiner l'œuvre divine.
(…) La France n'eut pas seulement la gloire
de se tenir ferme dans la foi ; elle eut à combattre dans son propre sein
l'expansion de l'erreur représentée par Calvin, et la révolte d'une partie de
sa noblesse, un moment appuyée de la royauté. L'élan national la sauva ; on la vit, confédérée dans une sainte ligue,
mettre sa foi plus haut que tout, plus haut même que la fidélité à ses
souverains, et ne consentir à en reconnaître l'héritier légitime qu'après que
lui-même eut prêté serment au Dieu de Clovis, de Charlemagne et de saint Louis.
Pour ne pas perdre le sens du bien ni son bon sens, regardons la fleur de lys |
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