Un chérubin bien rond |
Du vénérable
abbé Henri Marie Boudon, « Dévotion
aux neuf chœur des Anges »
À MON BON ANGE GARDIEN
Mon seigneur et fidèle guide de ma vie, quand je pense à ce que vous êtes, à ce que je suis,
à mes ingratitudes, à vos incroyables bontés, mon esprit se trouve comme dans
un abîme : je ne sais que devenir et je ne puis que dire.
Vous êtes une belle intelligence de la bienheureuse
éternité, un pur esprit, un esprit tout de lumière et de clarté, un esprit du
pur amour, un grand prince de l'empyrée et l'un des grands rois du paradis ; et je ne suis que poussière et que cendre,
qu'un chétif morceau de boue, qu'un misérable aveugle, qu'un très grand pécheur
et le dernier de tous les pécheurs. Je reconnais en votre sainte présence, et
je le veux dire devant tous les hommes et le donner au public, que je me vois
non-seulement mériter la dernière place de la terre, mais la dernière place de
l'enfer ; je me vois au-dessous de tous les démons et me reconnais pour la
dernière créature de tout le monde.
Cependant vous
voulez bien aimer une telle créature, vous voulez bien vous appliquer avec soin
à tout ce qui la regarde, vous voulez bien l'assister dans tous ses besoins
intérieurs et extérieurs, vous voulez bien la défendre contre tout ce qui lui
est opposé, vous voulez bien la soutenir contre la puissance de l'enfer ;
vous voulez bien, le conçoive qui pourra, l'accompagner inséparablement, lui tenir
compagnie sans la quitter, et vous prenez plaisir à l'accabler de vos
bienfaits, nonobstant tous ses mépris, toutes ses infidélités et toutes ses
ingratitudes. Après l'amour de Jésus et
Marie, qui a jamais ouï parler d'un tel amour ? Il faut bien dire que c'est
l'amour incomparable en sa constance, en sa fidélité ; que c'est l'amour
le plus désintéressé qui fut jamais ; l'amour le plus doux, le plus
patient et le plus charitable ; l'amour le plus miséricordieux, le plus
libéral, le plus fort et le plus généreux.
Ange sur un candélabre du Saint-Sépulcre de Jérusalem |
Grand prince, pourquoi m'aimez-vous de la sorte ? Pourquoi n'y a-t-il pas un seul moment de ma vie qui
ne soit marqué de quelqu'un de vos bienfaits ? Ô mon âme ! Il t'est
bien doux de penser à ces coups de miséricorde qu'a faits pour toi ce cher
prince de ta vie ! Il t'est bien doux de te souvenir comme il t'a délivré
de l'enfer, des grâces qu'il t'a obtenues, des secours indicibles qu'il t'a
donnés en toutes sortes de choses, des soins amoureux qu'il a pris de tout ce
qui regarde le temporel et le spirituel. Mon
seigneur, que vous rendrai-je pour tous ces biens ? Ah ! Je vois bien
qu'il m'est impossible de dignement reconnaître vos excessives faveurs.
Quand je vous remercierais autant de fois que je respire, ce ne serait pas
grand-chose ! Ô mon âme, que
devenir donc ici ? Entrons dans les puissances du Seigneur, et prenons
dans le cœur sacré de Jésus et de Marie une digne reconnaissance de tant de
bontés. Quand nous aurions tout pensé et tout dit, ce ne serait pas
assez ; quand nous aurions donné notre vie pour un prince si obligeant,
nous ne pourrions pas lui satisfaire, ayant été remplis de toutes sortes de
biens par sa faveur et délivrés de toutes sortes de maux.
Mais, aimable prince, les paroles donc me
manquant et les forces, je veux vous parler par le précieux cœur de l'adorable
Jésus et de sa très digne Mère. Hélas ! Je sais bien que je ne puis
pas entendre les paroles ineffables de ces divins chœurs, mais au moins tout ce
qu'ils vous diront à mon sujet, c'est tout ce que je veux vous dire. Tous les
remercîments qu'ils vous feront, ce sont les actions de grâces que je veux vous
rendre et que je ne puis.
Qu'à jamais ils
soient la juste récompense de vos services et la belle reconnaissance de tous
vos amours. Après cela, mon cœur prend une résolution inviolable de vous aimer
de la bonne manière. Mon seigneur,
donnez, s'il vous plaît, votre bénédiction à ces bons désirs et à la sincère
volonté qu'il a de vous honorer par toutes les actions de sa vie en Dieu seul
et pour Dieu seul, voulant vivre votre serviteur, et le serviteur de tous les
neuf chœurs des anges, le reste de mes jours. Notre sainte Dame sera bien
aise que son serviteur soit aussi le vôtre, soit aussi serviteur de tous les
autres princes du ciel vos semblables, et que toute sa vie soit une vie qui
vous honore tous avec elle, dans tous ses instants et jusqu'au dernier moment
de la mort, et dans toute l'éternité, et que tous mes jours soient comme autant
de fêtes de tout le paradis.
Anges à la trompette |
Présentez, cher gouverneur de mon cœur, cette
résolution que vous savez qu'il y a longtemps que j'ai prise, avec ce petit
ouvrage, à toutes les trois hiérarchies, à tous les neuf chœurs angéliques, aux
aimables séraphins, aux savants chérubins, aux glorieux trônes, aux puissantes
dominations, aux divines vertus, aux puissances redoutables, aux sacrées
principautés, aux saints archanges, aux charitables anges ; et dites-leur
là-dessus ce que vous savez bien dire à votre mode angélique et ce que je ne
pourrais pas. L'offrande
d'une chétive vie comme la mienne et de ce petit ouvrage est bien indigne de
leur mérite ; mais suppléez à mes misères et à mes défauts. Venant de votre main, d'une main angélique,
elle ne pourra qu'être bien reçue des anges.
Dites-leur
encore que mon cœur a bien d'autres désirs de les honorer et aimer, et qu'il
voudrait tenir tous les cœurs des hommes pour les donner à tous les chœurs des
anges, pour être ensuite donnés sans réserve au cœur tout aimable de Jésus et
Marie, où il n'y a et il n'y a jamais eu que Dieu seul. C'est ce Dieu seul, ô le plus fidèle, le plus constant et le plus
aimable de mes amis, que je désire par tous ces désirs ; mais, mon
seigneur, encore une fois, pour un si digne sujet, votre sainte bénédiction
pour tous les jours de ma vie et au moment redoutable de ma mort.
Ainsi soit-il,
ainsi soit-il. Dieu seul, Dieu seul, Dieu seul : la fin de toutes les
dévotions à la très sainte Vierge, aux anges et aux saints ; et que je
désire honorer incessamment dans tous les honneurs que je leur rends.
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