L’innocence et la simplicité de son âge jointes à la beauté naturelle dont il était doué donnaient à sa piété quelque chose de tendre et de naïf qui le rendait aimable à tous ceux qui le connaissaient, il savait en inspirer le goût aux enfants qu’il était à portée de fréquenter. On les voyait suivre à son exemple des pratiques que leur pétulance naturelle aurait dû leur faire trouver bien gênantes. Il les conduisait à l’église et, s’ils n’y portaient point sa ferveur, ils imitaient du moins son maintien recueilli ; souvent aussi, il les rassemblait pour les exhorter à l’amour de Dieu et au repentir de leurs fautes, il leur enseignait la manière de se bien confesser et les moyens de retirer plus de fruits de cette action.
Ce fut saint Jean l’Evangéliste qui lui inspira le premier une dévotion particulière. Il avait trouvé son panégyrique chez ses parents et cette lecture lui inspira tant d’amour pour ce saint et d’admiration pour ses vertus que, retiré à l’écart, il se prosterna devant Dieu et lui fit la promesse de les imiter, toutes promesse dont il ne sentait pas bien alors l’importance, mais comme il le dit lui-même depuis, en parlant de cette circonstance de son enfance, il est des choses que Dieu veut que nous fassions sans réflexion, le permettant ainsi parce que si nous demandions avis selon les règles de la prudence, nous ne les ferions pas. La fidélité avec laquelle Boudon tint à ces premières résolutions prouve qu’elles étaient du nombre de celles dont l’attrait vient d’en haut. Aussi eut il toute sa vie la même vénération pour l’apôtre qui les lui avait inspirées : il l’appelait le saint de sa piété, il assurait qu’il avait commencé à ressentir les doux effets de sa protection presque en même temps qu’il avait commencé de vivre et, dans le dernier ouvrage qu’il composa, il terminait encore son éloge en l’appelant le disciple de l’amour, le disciple si aimant et si aimé, l’aimable saint Jean l’Evangéliste.
Ce fut dans ces dispositions qu’il se prépara à sa première communion. Il se reprochait avec amertume les plus légères imperfections dont il eût à s’accuser dans sa confession générale, mais deux fautes surtout qui avaient échappé à sa vigilance sur lui-même tourmentaient excessivement sa conscience délicate. Succombant à un mouvement de sensualité, il avait bu un reste de vin laissé dans les burettes après une messe qu’il venait de servir et, trop timide sans doute pour résister aux prières d’un religieux propriétaire, il avait, pendant qu’on faisait la visite de son monastère, gardé l’argent qu’il cachait contre le prescrit de la règle. La confusion qu’il en ressentait était si grande qu’elle l’avait empêché jusque-là de les déclarer au tribunal de la pénitence, il le fit avec un repentir qui dura jusqu’à la fin de sa vie. L’amertume avec laquelle il en parlait alors prouve dans quelle innocence il garda depuis son âme, et on peut attribuer sans doute à l’impression que ces chutes firent sur lui la rigueur excessive avec laquelle il pratiqua constamment les vertus de pauvreté et de mortification religieuse.
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