« Exhortation
pour la veille de Noël sur le mystère de la naissance du Sauveur »
(2/7)
Dieu Créateur dans l'empyrée céleste. Enluminure |
Sic
Deus dilexit mundum. C’est ainsi que Dieu a aimé le monde.
C’est ainsi que Dieu a aimé le néant ; c’est ainsi
que celui qui est tout a aimé le rien ;
c’est ainsi que le Créateur a aimé la
créature, l’immortel le mortel, le Tout-Puissant le faible, l’impossible le
possible, l’infiniment glorieux la misère, la pourriture la corruption.
L'Esprit Saint viendra sur toi... |
C’est ainsi que Dieu a aimé les créatures
par un amour véritablement extatique qui
l’a tiré hors de soi pour le faire homme, ce qu’il ne devait pas ; et c’est par cet amour que l’homme doit se quitter
et devenir Dieu, ce qu’il doit et ce qu’il ne fait pas, voilà le sujet de ce
chétif discours.
Il est vrai que, selon l’avis du grand
saint Denis, l’amour est tout extatique
parce que l’extase, n’étant autre chose qu’une sortie hors de soi-même, c’est
le propre de l’amour de transformer la personne qui aime en l’objet aimé, d’où
vient ce sentiment si universel que l’âme est bien plus dans la personne qu’elle
aime que non pas dans le corps qu’elle anime.
... et tu deviendras la Mère de Dieu ! Van Eyck, l'Annonciation |
Ainsi voyons-nous que les saints, extrêmement amoureux de la divine bonté, ne vivaient plus à
eux mais tout à Dieu.
Et, quittant tout le soin d’eux-mêmes, ils ne pensaient, n’aimaient et ne soupiraient
que Dieu, menant une vie véritablement extatique ; mais ce qui est étonnant
et étrangement prodigieux, c’est l’amour extatique d’un Dieu pour les hommes
qui se présente aujourd’hui à nos yeux !
Admirons si vous voulez les extases des
saints ; étonnons-nous à la considération des merveilles qui s’y
passent ; il n’y a rien que de juste et raisonnable.
Mais de savoir, mais de voir aujourd’hui un Dieu entrer en extase, c’est ce qui surpasse toute pensée, c’est ce qui étonne les séraphins, c’est ce qui doit faire pâmer nos esprits et d’amour et d’admiration.
Mais de savoir, mais de voir aujourd’hui un Dieu entrer en extase, c’est ce qui surpasse toute pensée, c’est ce qui étonne les séraphins, c’est ce qui doit faire pâmer nos esprits et d’amour et d’admiration.
Un
Dieu est ravi parce que l’homme l’attire à soi, l’arrache du sein de son Père
éternel pour se l’approprier. Un Dieu est en extase parce
qu’il quitte toutes ses grandeurs pour
devenir un tout petit enfant. Spectacle qui doit arrêter et la terre et le ciel
et les hommes et les anges, éveiller partout et l’amour et l’étonnement !
Voilà qui est bientôt dit : un Dieu est en extase, un Dieu se consumant
d’amour pour les hommes est devenu un petit enfant ! mais c’est ce qui n’a
jamais pu être pénétré par aucune créature ; c’est où l’esprit humain
et angélique n’a jamais pu atteindre !
Dieu s'est fait Homme pour nous donner la vie divine. Seigneur, protégez les saints Innocents ! |
Je sais bien qu’il y a eu de belles âmes
qui ont dit des prodiges. Je sais bien que les François (N.B. d'Assise et de Sales) et les Bernard (de Clairvaux) en ont
conçu des merveilles qui ont servi d’unique occupation à leurs esprits et de
matière à leur amour. Mais je puis affirmer que quoique l’on ait pu dire,
quelque hautes qu’aient été leurs pensées, quand bien même elles leur auraient
été révélées et que nous réunirions en un tout celles qui ont passé par l’esprit
de tous les hommes et de toutes les intelligences du ciel tout cela ; pour
dire vrai, cela n’est rien.
Donnez-moi une personne qui conçoive ce que c’est que Dieu qui pénètre ses grandeurs adorables : alors j’avouerai qu’elle pense dignement ses bassesses et son anéantissement.
A moins de cela je demeure toujours dans le sentiment tout plein de vérité que le mystère, aussi aimable qu’adorable de l’enfance d’un Dieu, est véritablement un mystère pour tout esprit vrai : c’est-à-dire un secret que l’on ne peut connaître.
Donnez-moi une personne qui conçoive ce que c’est que Dieu qui pénètre ses grandeurs adorables : alors j’avouerai qu’elle pense dignement ses bassesses et son anéantissement.
A moins de cela je demeure toujours dans le sentiment tout plein de vérité que le mystère, aussi aimable qu’adorable de l’enfance d’un Dieu, est véritablement un mystère pour tout esprit vrai : c’est-à-dire un secret que l’on ne peut connaître.
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