Parmi les écrits, nombreux, du vénérable
abbé Henri Marie Boudon, l’exhortation
pour la veille de Noël fait partie des plus beaux. Il nous décrit les
grandeurs de Dieu : tout puissant, plein d’amour et de bonté, Créateur de
tout l’univers, qui n’a besoin de rien, ni de la terre, ni du ciel, ni des
anges, ni de nous. Et pourtant, ce Dieu d’Amour a tout créé ! Comment avons-nous
répondu à cet amour infini : par le péché, la désobéissance, l’orgueil, le
mensonge, et tant d’autres horreurs.
Nous nous préparons à la célébration de la
Nativité. Oh, bien des images d’Epinal surgissent dans nos esprits, des
saveurs, des couleurs, des chants. Tout cela
est bien beau, mais ne risquons-nous pas de passer à côté de l’essentiel ?
Ce n’est pas un petit enfant comme les
autres qui sera couché dans l’humble crèche de Bethléem. C’est ce Dieu d’Amour, dont l’amour fut bafoué, qui vient à notre rencontre.
Dieu ! tout simplement. L’accueillerons-nous pour ce qu’Il est ?
Notre Créateur et Rédempteur, notre Seigneur et notre Roi ? Les mots de notre foi sont devenus des coquilles vides de sens parce
que nous n’y prêtons pas suffisamment attention.
Voilà pourquoi, pour ces prochaines
semaines de l’Avent et de Noël, votre blogue vous proposera l’ensemble de cette
exhortation. Prenons le temps de la lire, jour après jour, dimanche après
dimanche. Méditons-là devant nos crèches, devant le Tabernacle où notre
Seigneur repose en vérité. Ainsi, Noël
prendra tout son sens et Jésus Enfant trouvera, enfin, le seul lieu véritable
de son repos, nos cœurs.
Saint
Avent à tous.
Du vénérable abbé Henri Marie Boudon,
« Exhortation
pour la veille de Noël sur le mystère de la naissance du Sauveur » (1/7)
L’amour, toujours grand en ses
victoires, mais aujourd’hui tout-puissant dans ses triomphes, ayant par la plus
glorieuse de ses conquêtes assujetti à ses lois celui qui les donne à tous, et
qui n’en reçoit de personne ; cet
amour, dis-je, triomphant, rendant le Verbe incréé muet et la parole éternelle
sans voix, fait que j’ai de la peine à vous entretenir.
Si un Dieu, dans les excès de son amour,
en montre la grandeur en gardant le silence, faut-il que l’homme, par ses discours, donne des témoignages de la
faiblesse de ses affections ? Les grandes choses ont cela de propre
qu’elles ne se peuvent exprimer, aussi voyons-nous que dans les mouvements
extraordinaires de joie ou de tristesse, nos langues se trouvent arrêtées sans
pouvoir dire un seul mot, mais particulièrement cela se remarque dans les
personnes puissamment emportées par l’amour, et il est vrai : qui aime bien parle peu ou point du tout.
C’est une vérité qui se fait voir dans
tout son lustre dans le mystère amoureux
de l’enfance d’un Dieu que la bienheureuse Eglise, notre bonne mère, nous
propose aujourd’hui.
Un
Dieu aime et aime les hommes mais les aime jusqu’à tel point que l’amour le met
dans un état où il ne peut parler.
Voilà des transports admirables d’un Dieu
qui mériterait bien que je m’arrêtasse ici tout court et, qu’après vous avoir
fait faire réflexion sur cette vérité, que je viens de vous proposer, nous demeurassions tous, dans le silence
adorant, avec respect les précieux amours de ce Dieu.
Enfant pour les hommes, il faut que je
vous avoue que parmi ces sentiments, c’est avec honte et confusion que je vous
parle.
L’on a vu des hommes apostoliques se
rencontrant dans des pays barbares, dont la langue leur était inconnue, exposer
des tableaux : un Dieu incarné leur faisant entendre par quelques signes
ce que signifiait cette image dont la seule vue tirait des soupirs des cœurs et
des larmes des yeux de ces pauvres gens ; et moi qui ai affaire avec des
âmes chrétiennes, ne dois-je pas me
contenter d’avoir mis devant les yeux de votre esprit un Dieu Enfant que vous
connaissez par la foi ?
Une personne qui aime n’a que faire des
discours pour se porter à l’objet aimé ; aussitôt qu’elle l’aperçoit, elle
s’unit intimement à lui. Sa seule vue lui dérobe le cœur et emporte toutes ses
affections. Mais puisqu’il faut que je parle, continuez, vous-autres, Messieurs,
dans ce silence où je vous vois, et respectez par-là celui qui garde la Parole
éternelle revêtue du corps d’un petit enfant.
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