dimanche 27 février 2022

Objectif du Carême : vivre chrétiennement par la puissance du Saint Esprit


Entretien de S. Séraphim de Sarov avec Motovilov sur la lumière du Saint Esprit

 

C’était, écrit Motovilov, un jeudi. Le jour était gris. La neige recouvrait la terre de plus de quinze centimètres ; il en tombait toujours une épaisse poudre blanche, quand le Père Séraphim commença l’entretien avec moi sur la proche clairière, à côté de ce même « proche petit ermitage », en face de la rivière Sarowka, là où la montagne descend près de ses rives. Il me plaça sur un tronc d’arbre qu’il venait d’abattre et s’accroupit en face de moi.

 

- Le Seigneur m’a révélé, dit le grand Staretz, que depuis votre enfance, vous vouliez savoir quel était le but de notre vie chrétienne et que vous aviez maintes fois interrogé là-dessus plusieurs personnages haut placés dans la hiérarchie de l’Église.

- Je dois dire que, depuis l’âge de douze ans, cette pensée m’a continuellement inquiété et, qu’en effet, j’ai posé cette question à beaucoup de personnalités ecclésiastiques, sans que leurs réponses m’apportassent une satisfaction. Le Staretz ignorait cela. 

- Mais personne, continua Père Séraphim, ne vous en a donné aucune définition. On vous disait : « Va à l’Église, prie Dieu, agis selon les commandements, fais le bien. Voilà le but de la vie chrétienne ». Et certains, même, trouvaient déplacée votre curiosité et vous répondaient : « Ne cherche pas au-dessus de ce qu’il t’est donné de comprendre ». Pourtant, ce n’est pas ainsi qu’il aurait fallu vous répondre. Aussi, moi, l’humble Séraphim, vous expliquerai maintenant en quoi consiste véritablement ce but.

 

La prière, le jeûne, les veilles et autres bonnes pratiques chrétiennes, aussi excellentes qu’elles soient en elles-mêmes, sont insuffisantes en tant que but, quoiqu’elles soient indispensables pour l’atteindre

Le vrai but de notre vie chrétienne consiste dans l’acquisition de l’Esprit Saint de Dieu. Le jeûne, la prière, la charité et toute bonne action accomplie au nom du Christ, ne sont que des moyens pour cette acquisition du Saint-Esprit divin.

 

Remarquez-le bien, petit Père, seule une bonne action faite au nom du Christ, apporte les fruits du Saint-Esprit. Tout le bien qui n’est pas fait au nom du Christ n’aura pas de récompense dans le siècle à venir et n’apporte pas ici-bas, la grâce, divine.

 

C’est de cela que le Seigneur Jésus-Christ a dit: « Celui qui ne ramasse pas avec Moi, disperse ! La bonne action ne peut être appelée autrement que « récolte » car, bien qu’elle ne soit pas faite au nom du Christ, elle est néanmoins « bonne ». L’Écriture dit: « Quelle que soit sa langue, celui qui agit selon la Vérité est tellement agréable à Dieu, qu’à Cornelius, le centurion qui craignait Dieu et agissait selon la Vérité, l’Ange de Dieu apparut pendant sa prière et dit : « Envoie à Joppé, chez Simon, tu y trouveras Pierre, qui te dira les paroles de la vie éternelle qui te sauveront, ainsi que toute la maison ».

 

Ainsi, Dieu emploie tous Ses moyens divins pour donner la possibilité à un tel homme de ne point perdre, dans la vie future, la récompense sollicitée par ses bonnes actions. Mais pour cela il faut, dès ici-bas, commencer par une foi véritable en Notre Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, venu dans le monde sauver les pécheurs, et par l’acquisition de l’Esprit Saint qui introduit dans notre cœur le royaume de Dieu et creuse le chemin pour l’obtention de la béatitude de la vie du siècle à venir.

 

Mais cet agrément pour Dieu des bonnes actions accomplies, « non au nom du Christ », se limite par cela: le Créateur donne les moyens pour leur accomplissement. C’est à l’homme de les accomplir ou de ne pas les accomplir. Voilà pourquoi le Seigneur a dit aux Hébreux : « Si vous étiez dans l’ignorance, vous ne seriez point pécheurs. Mais actuellement, vous dites que vous savez, et votre péché demeure ».

 

Si l’homme, comme le fit Cornelius, profite de ce que son œuvre fut agréable à Dieu, quoique non accomplie au nom du Christ, et se met à croire en Son Fils, alors l’œuvre accomplie lui sera comptée à cause de sa foi en Jésus, comme s’il l’eût faite en son Nom. Dans le cas contraire, l’homme ne peut pas se plaindre que le bien qu’il a accompli n’ait pas porté de fruits. Cela n’arrive jamais dans les cas où un bien quelconque est pratiqué au nom du Christ. Le bien fait en Son Nom, non seulement sollicite la couronne de Vérité dans la vie future, mais remplit l’homme, dès à présent, de la grâce du Saint-Esprit, et ceci comme il a été dit: « Dieu donne l’Esprit Saint au-delà de toute mesure, car le Père aime le Fils et a tout donné entre Ses mains ». C’est ainsi, votre Théophilie ! C’est ainsi dans l’acquisition de cet Esprit de Dieu, que réside le vrai but de notre vie chrétienne.


La prière, le jeûne, les veilles, la charité et toutes les autres pratiques faites au nom du Christ, sont seulement les moyens pour acquérir l’Esprit de Dieu.

- Comment, l’acquisition ! dis-je alors. Je ne le comprends pas tout à fait.

 

L’acquisition est comme un achat. Vous comprenez bien ce que veut dire l’acquisition de l’argent ? Pareillement, l’acquisition de l’Esprit-Saint ! Puisque vous comprenez ce que l’« acquisition » veut dire dans ce monde et que le but de la vie laïque de l’homme est l’acquisition de l’argent, l’enrichissement et, pour la noblesse, en plus de cela, les honneurs, les distinctions et autres récompenses pour les services rendus à l’État, vous pouvez également comprendre que l’acquisition du Saint-Esprit de Dieu constitue aussi un capital, mais éternel et plein de grâce, obtenu par des voies semblables à celles par lesquelles les capitaux terrestres sont amassés.



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