mercredi 31 août 2022

Naissance au Ciel de M. Boudon


« Vie nouvelle de Henri Marie Boudon, par S.Exc.R. Mgr Matthieu », Archevêque de Besançon

 

Ses maux devinrent bientôt si compliqués et sa faiblesse si grande qu’il fut presque toujours obligé depuis de se servir de M. Chanoine toutes les fois qu’il avait à communiquer avec ses amis. Il semblait que Dieu ne voulait laisser aucune partie de son corps sans souffrance de même que dans le temps de ses peines de cœur il ne lui avait laissé aucune affection qui ne fût cruellement blessée. La poitrine s’attaqua à la suite d’une vomique et il lui resta une toux violente et continuelle, ses pieds enflés ne lui permettaient plus de marcher qu’avec peine ; il eut un rhumatisme au bras et l’humeur portée sur les yeux et sur les oreilles lui causa des fluxions douloureuses, son estomac ne pouvait plus digérer rien de solide et on le soutint longtemps seulement avec du potage et de la pâte d’abricots.

Toutes ces privations le remplissaient de joie et lui semblaient la plus heureuse préparation à la mort qu’il pût obtenir de Dieu. Il regardait comme une faveur de la Providence de souffrir par nécessité les mortifications corporelles qu’il aurait aimé à lui offrir de toute la bonne volonté de son cœur. Il écrivait dans cette cruelle position à M Bosguérard :


« Je dois me perdre dans l’abîme des miséricordes du Cœur infiniment aimable et infiniment adorable de notre bon Sauveur pour les conduites de sa divine providence sur mon indigne et chétive personne. Je considère que les saints passaient quelquefois les nuits entières en oraison et ordinairement la plus grande partie qu’ils s’abstenaient dans leur nourriture de la plupart des choses dont les autres usaient et voici que cet aimable Sauveur vient à mon secours d’une manière infiniment miséricordieuse et pleine d’amour. Si je demandais avis s’il serait à propos que je passasse les nuits entières ou une grande partie sans dormir et que je me privasse de bien des choses pour la nourriture, apparemment on ne me le conseillerait pas ; mais Dieu tout bon et tout miséricordieux le veut faire par lui-même. Quelquefois mon mal me fait passer les nuits entières sans dormir du tout et d’autres fois jusqu’à deux heures après minuit il faut que je me prive de bien des choses et même des plus communes ; ainsi la divine Providence me fait faire nécessairement ce que je ne ferais pas si je n’y étais en nécessité. Hier je n’avais pas pu encore dîner jusqu’à six heures du soir, mon mal m’arrêtant sur un lit sans pouvoir prendre de nourriture ; tous les jours je suis dans cet exercice. Je ne doute point que ce ne soit la très sainte Mère de Dieu, ma bonne Mère et maîtresse, qui m’ait obtenu ces souffrances pour me préparer à la mort. »

Les derniers mois de l’année 1701 et tout l’hiver de 1702 se passèrent ainsi dans une alternative de mieux et de rechutes qui continuaient d’affaiblir ses forces et d’aggraver le danger de son infirmité. Souvent les accidents revenaient plusieurs fois dans un jour et recommençaient encore pendant la nuit. Il se trouvait à chaque crise en danger de mort et n’en sortait que dans un accablement extrême. Cependant il put encore, jusqu’au commencement du printemps, aller par intervalles célébrer la messe à la cathédrale.


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