dimanche 18 juillet 2021

Le combat spirituel


Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « Les saintes voies de la Croix », chap. VI, Des peines causées par le démon

Il y a des tentations ordinaires et extraordinaires des démons. Leurs tentations ordinaires sont quand ils tentent par le monde, ou les sensualités de la chair. Ces esprits malheureux se servent des biens de fortune, de nature, comme des richesses, honneurs, charges, beauté du corps, du bel esprit, de la belle humeur, pour donner de l'attache aux créatures, et porter au péché ; et les hommes, par une ingratitude qui surpasse toute pensée, au lieu de se servir des dons de Dieu pour l'en bénir et le louer, en abusent misérablement ; de sorte que plus ils sont gratifiés, plus ils en sont ingrats. Par exemple, si une personne est douée d'une beauté extraordinaire, souvent elle en sera plus attachée à elle-même, et servira d'un plus grand obstacle aux autres dans les voies du salut. De plus, les malins esprits tentent par les biens de la grâce, soit en glissant de la corruption dans l'intention de ceux qui les ont, soit en y mêlant de la superbe et de l'orgueil. Orgueil, vice plus commun que l'on ne pense, et d'autant plus dangereux qu'il est caché, qu'il a fait tomber les colonnes de la vie spirituelle, et ruiné dans un moment des trésors immenses des dons du ciel.

 

Les démons tentent extraordinairement quand ils demandent à Dieu permission d'attaquer l'âme avec des assauts extraordinaires ; permission que Dieu tout bon ne leur accorde point, sans donner en même temps des grâces particulières pour résister. Car, enfin, c'est une vérité de foi, toute pleine de consolation, que Dieu est fidèle, et qu'il ne permet pas que nous soyons tentés au-dessus de nos forces ; c’est pourquoi c'est toujours notre faute si nous succombons. Un démon disait un jour à saint Pacôme que si Dieu leur permettait de tenter les personnes d'une vertu commune, comme celles qui sont dans la pratique héroïque, elles ne pourraient résister à leurs efforts ; mais c'est ce que l'infinie miséricorde de Dieu ne leur accorde pas.

 

S'ils livrent aux saints des combats qui sont terribles, la force divine dont ils sont revêtus est admirable. Il est vrai que c'est à ces âmes éminentes qu'ils en veulent, que c'est contre elles qu'ils déchargent leur rage d'une manière effroyable. La raison est qu'ils y voient moins de nature et plus de grâces ; ils y voient plus de Dieu et c'est ce qui les désespère. Ils se mettent peu en peine du reste ; de là vient qu'ils craignent peu les directeurs, les prédicateurs, quoique gens de bien, quand ils tiennent encore à la nature par l’estime de l'esprit, des biens, des honneurs de l'éclat, de la réputation, et ils ne leur font pas de grandes persécutions : mais quand un homme, par l'amour du mépris, de la pauvreté, de la douceur, et par un entier détachement, n'est plus rempli que de Dieu, tout l'enfer tremble. Oh ! qu'une personne où il n'y a que Dieu seul est redoutable aux troupes infernales, quand bien même elle serait dans un désert sans s'employer à aucune fonction extérieure ! Voilà le sujet de tous ces combats de l'enfer contre les anciens solitaires, qui, à la vérité, ont été étranges et terribles, et presque continuels. Voilà le sujet des oppositions qu'ils apportent aux âmes d'oraison, parce que c'est l'un des plus assurés et des plus efficaces moyens de se remplir de Dieu seul.


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