Chanoines cathédraux |
« Vie de
Boudon », par Collet
A LA REINE
Madame ;
~ J’ai l’honneur de dédier aujourd’hui à
Votre Majesté la Vie d’un archidiacre que la voix de tous ceux qui aiment la
vertu a depuis longtemps canonisé.
~ Mais quoique la
vie de M. Boudon ne présente pas des traits si grands, Votre Majesté apercevra
du premier coup d’œil qu’il a réuni
toutes les vertus qui en sont le germe et qu’il ne lui a manqué que le pouvoir
ou l’occasion de les faire éclater. Elle trouvera dans le même homme une charité qui n’a de bornes que celles de la plus
rigoureuse impuissance, un zèle ardent pour les intérêts de Dieu et de son
Eglise, mais un zèle toujours tempéré par la douceur et par la prudence, le
rare talent de soulager ces âmes souffrantes que Dieu conduit à lui par les
plus pénibles sentiers, une confiance si parfaite en la Providence que, quoique
dénué de tout le lendemain ne lui donna jamais la plus légère inquiétude, un
détachement si absolu de toutes les créatures que Dieu seul et très seul, fut toujours
le centre et le terme de son cœur, de ses pensées, de ses entreprises.
Allégorie de l'humilité |
Mais j’ose le
dire, Madame, quelque accoutumée que vous soyez aux plus sublimes vertus, vous
ne pourrez voir sans une sorte d’émotion, je ne dis pas la patience invincible,
je dis la joie, les transports avec
lesquels ce saint prêtre souffrit une des plus violentes persécutions qu’on
puisse imaginer, persécution qui, quoique suscitée contre sa foi, fut si
souplement ménagée quelle parut ne l’attaquer que pour les mœurs.
Les Etats les plus
brillants ont leurs croix. Le joug pesant qui accable les enfants d’Adam
n’épargne pas plus les rois qu’il n’épargne les derniers de leurs sujets. Quelle consolation pour l’Eglise de
présenter en tout temps des modèles d’une parfaite soumission aux ordres
les plus sévères du premier des maîtres ! Quel plaisir pour une reine qui,
tout occupée de la grandeur de Dieu, gémit comme Esther du poids de la sienne, de
voir dans ce dernier âge du monde un homme plus content d’être le rebut et
l’opprobre d’un peuple qui l’avait si souvent admiré, qu’il ne l’était en se
rappelant que les trois plus grandes princesses du monde avaient versé des
fleurs sur son berceau.
Votre Majesté
n’aura pas besoin de cette dernière grâce qui fait vaincre la calomnie par la
patience. Le monde, tout monde qu’il est, a rendu un hommage constant et aux
vertus dont le ciel vous a comblée dès l’enfance et à la manière dont vous avez
su les transmettre à votre auguste famille.
Puissiez-vous,
comme les anciens amis de Dieu, les y voir régner jusqu’à la quatrième
génération. C’est l’unique vœu que puisse former un ministre de Jésus Christ.
Et c’est le seul qu’adoptera une princesse qui sait que le monde passe avec sa
gloire et ses plaisirs, mais que la vertu subsiste éternellement.
Je suis avec un
très profond respect, MADAME,
DE VOTRE MAJESTÉ,
le très humble, très obéissant, très fidèle serviteur et sujet,
Pierre Collet
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