La hiérarchie céleste d’après
le Pseudo-Denys l’Aréopagite
[205]
Des séraphins, des chérubins et des trônes, et de la première hiérarchie qu’ils
constituent.
Ces noms nous révèlent la
façon constante dont ils se conforment à Dieu (la propriété durablement acquise - habitus - de la «déiformité»)
Chœur des Séraphins |
La sainte appellation de séraphins signifie
pour qui sait l’hébreu «ceux qui brûlent», c’est-à-dire «ceux qui
échauffent ~ Le mouvement perpétuel tout autour des secrets divins, la
chaleur, la profondeur, l’ardeur bouillonnante d’une constante révolution qui
ne connaît ni relâche ni déclinaison, le pouvoir d’élever efficacement à leur
ressemblance leurs inférieurs en les animant de la même ardeur, de la même
flamme et de la même chaleur, le pouvoir de purifier par la foudre et par le
feu, l’évidente et indestructible
aptitude à conserver identiques et leur propre lumière et leur pouvoir d’illumination,
la faculté de rejeter et d’abolir toute ténèbre obscurcissante ~
Chœur des Chréubins |
L’appellation de chérubins signifie «masse
de connaissance», c’est-à-dire «effusion de sagesse ~ l’aptitude
à connaître et à contempler Dieu, à
recevoir les plus hauts dons de sa lumière, à contempler dans sa puissance
primordiale la splendeur théarchique, à accueillir en soi la plénitude des dons
qui rendent sages et à les communiquer ensuite aux essences inférieures
grâce à l’effusion de cette Sagesse même qui les a comblés de ses bienfaits.
Chœur des Trônes |
Quant au nom de trônes très sublimes et très lumineux, il indique l’absence totale en eux de
toute concession aux biens inférieurs, cette tendance continue vers les sommets
~, leur indéfectible aversion à l’égard de toute bassesse, la tension de toutes
leurs puissances pour se maintenir de façon ferme et constante auprès de Celui
qui est véritablement le Très Haut, leur aptitude à recevoir dans une totale
impassibilité, loin de toute souillure matérielle, toutes les visitations de la
théarchie, le privilège qu’ils ont de servir de sièges à Dieu et leur zèle
vigilant à s’ouvrir aux dons divins.
[208] On doit penser qu’elles [les premières essences] sont pures, non point parce qu’elles sont libres de
tout péché et de toute souillure profane, mais parce qu’elles ignorent toute
imagination matérielle, parce qu’elles demeurent sans mélange au-dessus de
toute faiblesse, au-dessus de tous les degrés inférieurs de sainteté, parce que
leur sublime pureté dépasse toute autre puissance apte à assurer la
conformité avec Dieu, parce qu’elles conservent inébranlablement, grâce à leur indéfectible amour de Dieu, l’ordre
de leur mouvement propre, spontané et immuable, parce qu’elles ne sauraient d’aucune façon ni se pervertir ni subir aucune perte
mais qu’elles gardent au contraire sans déchéance ni corruption l’indéfectible
et perpétuelle stabilité du pouvoir qui leur appartient en propre de se
conformer à Dieu.
Elles sont également contemplatrices, non parce qu’elles contemplent intellectuellement des symboles
sensibles ni qu’elles s’élèvent spirituellement vers le divin à travers une
variété de saintes allégories, mais bien parce qu’elles reçoivent en toute
plénitude le savoir immatériel d’une lumière supérieure, qu’elles se
repaissent, autant qu’elles le peuvent faire sans sacrilège, de la
contemplation de cet Etre suressentiel et triplement lumineux qui est l’origine
et le principe de toute beauté ; parce qu’elles ont également mérité d’entrer
en communion avec Jésus, non par de saintes allégories où s’imprime
figurativement la ressemblance de l’opération divine, mais par une véritable
proximité, parce qu’elles ont part de façon primordiale à la connaissance de
ses opérations lumineuses et divines, parce qu’il leur a été donné au plus haut point d’imiter Dieu et qu’elles
entrent en communion, autant qu’elles le peuvent, au sein de sa puissance
fondamentale avec les vertus par quoi il exerce à l’égard des hommes son
opération divine et manifeste son amour pour eux.
Elles sont enfin parfaites, non par l’illumination d’un
savoir qui leur permettrait d’analyser la variété des saints mystères, mais
bien par la plénitude d’une déification primordiale et excellente, par la
science suprême qu’elles possèdent, en qualité de messagères angéliques, des
opérations divines. ~ elles conservent constamment une parfaite et indéfectible pureté, et leur noblesse immatérielle et
intellectuelle les élève, autant qu’il leur est permis sans sacrilège, à la
contemplation, leur permettant de s’initier au principe rationnel des
opérations divines, à titre d’essences premières et proches de Dieu qui
reçoivent leur perfection de façon éminente de Celui qui est le principe même
de toute perfection.
[212] Tel est ~ le premier ordre des essences célestes,
celui qui fait cercle autour de Dieu et dans son immédiat voisinage, qui
entoure sa perpétuelle connaissance d’une ronde simple et continue, celui qui,
grâce à cette stabilité perpétuellement mouvante qui convient à des anges et qu’il
possède au plus haut degré, peut non seulement contempler d’un regard pur une
foule de spectacles bienheureux, mais encore recevoir l’illumination des
splendeurs simples et immédiates et se repaître de la manne divine. ~ Digne au
plus haut point d’entrer avec Dieu en communion et en coopération, ce premier
ordre imite autant qu’il le peut la beauté des pouvoirs et des opérations
propres à Dieu. ... la théologie a transmis aux habitants de la terre les
hymnes que chantent ces anges du premier ordre et où apparaît saintement le
caractère transcendant de leur sublime illumination. Certains ~ ressemblent à
la voix d’un torrent impétueux, lorsqu’ils s’écrient : «Bénie soit en son lieu la gloire du
Seigneur !» (Ezech. III, 12) D’autres entonnent l’hymne théologique
célèbre et très vénérable : «Saint, Saint, Saint,
le Seigneur des armées, toute la terre est pleine de sa gloire» (Isaïe IV, 3)
* *
*
[237] Des seigneuries, des puissances
et des pouvoirs et de la hiérarchie moyenne qu’ils constituent (dominations,
vertus et puissances)
~ la seconde hiérarchie des intelligences célestes manifeste
sa conformité à Dieu ~
ainsi elle se purifie, elle s’illumine, elle se parfait ~ grâce aux
illuminations que lui transmet le premier ordre de la hiérarchie ~
Chœur des Dominations |
~ le nom révélateur de
saintes seigneuries signifie, je crois, une élévation
spirituelle libre et exempte de toute compromission terrestre, sans aucune
inclination d’aucune sorte vers aucune de ces tyrannies qui naissent d’une
insuffisante assimilation, comme il
convient à une seigneurie incorruptible et vraiment libre, supérieure à toute
servitude amoindrissante, ignorant toute compromission et séparée de toute
dissemblance, tendant avec une ferme vigueur vers la véritable Seigneurie et
vers le principe de toute seigneurie, recevant, elle et ses subordonnés, de
façon excellente et à la mesure de leurs forces l’empreinte et la ressemblance
du Seigneur lui-même, dédaignant les vaines apparences, mais tournée tout
entière vers le véritable Seigneur et participant selon ses forces au Principe
constant et divin de toute seigneurie.
Chœur des Puissances |
En ce qui concerne les
saintes puissances, leur nom
indique une certaine virilité courageuse
et inébranlable dans tous les actes par lesquels elles se conforment à Dieu,
virilité qui exclut toute lâcheté et toute mollesse dans la réception des
illumination théarchiques qui leurs sont octroyées, qui s’élève
courageusement vers l’imitation de Dieu, qui ne se laisse jamais aller à
abandonner l’ascension vers la forme divine, mais dont le regard au contraire
demeure inflexiblement tourné vers cette Puissance suressentielle qui est la
source de toute puissance, car cette virilité même, autant qu’elle le peut,
devient l’image de la Puissance dont elle assume la forme, s’attachant à elle
de toutes ses forces comme au Principe de toute puissance, sans cesser pour
autant de faire descendre sur les essences inférieures son procès [action,
existence, état, devenir, etc.] dynamisant et déifiant.
Chœur des Vertus |
Le nom des saints pouvoirs indique qu’ils sont de rang égal à celui
des seigneuries et des puissances, qu’ils sont disposés harmonieusement et sans
confusion pour revoir les dons divins ; que le pouvoir intellectuel [entendement]
qui leur appartient et qui n’est pas de ce monde est parfaitement ordonné ; que
loin d’abuser tyranniquement de leurs
puissants pouvoirs pour faire le mal ils s’élèvent harmonieusement et sans
défaillance vers les réalités divines, entraînant avec eux dans leur bonté les
essences inférieures, imitant autant qu’ils le peuvent sans sacrilège le
Pouvoir fondamental qui est la source de tout pouvoir, sans cesser de faire
rayonner ce Pouvoir, dans la mesure où le peuvent des anges, grâce aux ordonnances
harmonieuses de son impérieuse puissance.
[241] C’est une loi
universelle divinement instituée par le Principe divin de tout ordre que les
essences du second rang participent par l’entremise de celles du premier rang
aux illuminations théarchiques. ~ selon la vision d’un des
théologiens, Zacharie, c’est, semble-t-il, un des anges du premier ordre ~ (~ le nom d’ange s’applique indistinctement à
toutes les essences célestes) qui reçut de Dieu lui-même, comme le dit l’Ecriture,
les paroles consolatrices et c’est un autre ange, appartenant aux rangs
inférieurs, qui fut envoyé à la rencontre du premier pour recevoir et pour
transmettre son illumination, et qui, une fois initié comme par un grand prêtre
à la volonté divine, confia à son tour au théologien la sainte nouvelle que
Jérusalem refleurirait et que des multitudes d’hommes la peupleraient (Zach. I,
8-17).
~ c’est le premier des chérubins qui (dans le récit sacré) reçoit la
sainte ordonnance, celui-là qui porte autour des reins une ceinture de saphir
et qui a revêtu, en signe de sa fonction sacrée, un manteau tombant jusqu’aux
pieds. Ensuite, seulement, le Principe divin de tout ordre prescrit que le
secret de la décision divine soit transmis par le premier des anges aux autres,
à ceux qui portent des haches. A lui, ~ il prescrit de traverser toute la
ville de Jérusalem et de marquer au front les innocents. Aux autres, il
commande : «Allez à sa suite
dans la ville, frappez et que vos yeux ne se laissent point fléchir [...] mais
n’approchez d’aucun de ceux qui furent marqués» (Ezech. IX, 5-6)
Et que dire encore de cet
ange qui annonça à Daniel : «La
parole est sortie dès le commencement de tes supplications» (Dn IX, 23) ou de celui qui, le premier,
reçut le feu du milieu des chérubins (Ezech. X, 2) ? Ou encore ceci qui
démontre plus clairement le bon ordre qui préside aux anges : le chérubin qui
transmet le feu entre les mains de celui qui a revêtu l’étole sainte (Ezech. X,
7) ? Que dire également de celui qui appela le très divin Gabriel et qui lui
dit : «Fais-lui entendre la
vision» (Dn VIII, 16), ou enfin de tous les autres exemples fournis
par les saints théologiens de cette divine et harmonieuse disposition qui est
propre aux hiérarchies célestes ?"
* *
*
[257]
Des principautés, des archanges et des anges, et de la dernière hiérarchie qu’ils
constituent.
Chœur des Principautés |
Le nom de principautés célestes
signifie qu’elles possèdent dans l’ordre sacré un principat et une hégémonie
[suprématie] de forme divine, des puissances de commandement de la plus haute
convenance, le pouvoir de se convertir
entièrement au Principe qui est au-dessus de tout principe et de conduire les
autres vers lui avec une autorité primordiale, de recevoir de lui-même au
maximum l’empreinte de ce Principe qui est source de tout principe, de révéler
enfin le Principe suressentiel de tout ordre par l’harmonie de leurs puissances
de commandement.
Chœur des Archanges |
Les saints archanges ont
le même rang que les principautés célestes. ~ il [l’ordre sacré des
archanges] entre tout ensemble en communion avec les très saintes principautés
et avec les saints anges ; il se convertit de façon primordiale au Principe
suressentiel, qu’il reçoit autant qu’il le peut sans sacrilège, l’empreinte de
ce Principe et il confère l’unité aux anges grâce aux pouvoirs invisibles d’ordination
et d’harmonisation qu’il tient du Principe même ; ~ il [l’ordre sacré des
archanges] appartient lui aussi au rang des interprètes, recevant hiérarchiquement les illuminations théarchiques par l’entremise
des puissances du premier rang, les transmettant dans sa bonté aux anges, et,
par l’entremise des anges, nous les révélant à nous-mêmes dans la mesure où
chacun de nous peut recevoir la sainte illumination des secrets divins.
Chœur des Anges |
Les anges, ~ terminent et complètent le dispositif
entier des intelligences célestes ; ~ par leur entremise la hiérachie se
manifeste plus clairement à nos yeux et d’une façon qui touche davantage à
notre monde. ~ l’ordre
supérieur, plus proche, par sa dignité même, du sanctuaire secret, initie
mystérieusement le second ordre ~ des seigneuries, des puissances et des
pouvoirs, qui commande d’autre part aux principautés, aux archanges et aux
anges, révèle les mystères moins secrètement que la première hiérarchie, mais
moins ouvertement que la dernière. Ainsi c’est à l’ordre des principautés, des
archanges et des anges qu’appartient la fonction révélatrice ;
c’est lui qui, ~ préside aux hiérarchies humaines afin que se produisent de
façon ordonnée l’élévation spirituelle vers Dieu, la conversion, la communion,
l’union et ~ le mouvement processif [procédant] de Dieu lui-même ~ la théologie
réserve aux anges le soin de notre hiérarchie, appelant Michel l’archonte
[archange] du peuple juif [Dn X, 21], et d’autres anges les archontes
[archanges] des autres nations, car «le
Très Haut a établi les frontières des nations selon le nombre des anges de Dieu» (Septante, Deut. XXXII, 8).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire