Jusqu’au 3
avril prochain – et il faut espérer que ce ne soit pas seulement une date
provisoire – toutes les messes publiques
et tous les offices religieux publics ont été interdits à Rome, au cœur de la
chrétienté. Les restaurants, bars et commerces restent ouverts. C’est inouï.
Effroyable. Signe d’une soumission terrible de l’Eglise à l’Etat.
Croient-il encore en la force de la prière ?
La grande peur du Coronavirus a ainsi obtenu ce
que des siècles de persécutions, des épisodes de grande peste, d’hostilité
laïciste à la religion catholique et autres catastrophes naturelles ou non,
n’avaient réussi à imposer : l’impossibilité
pour le laïc d’assister au sacrifice qui sauve le monde et ouvre les portes du
ciel aux hommes qui obtiennent et acceptent la miséricorde de Dieu.
Cette
grande peur se comprend peut-être face au taux d’hospitalisation et de soins de
réanimation que nécessitent les malades du COVID-19. Mais cela va de pair avec une incohérence manifeste. La quarantaine est loin d’être complète. Et
puis : si au lieu d’interdire les
messes, on les multipliait ? Les prêtres ne manquent pas à Rome. Cela
permettrait une moins forte densité de l’assistance, réduisant ainsi les
risques de contagion.
Mais non. Tout
est interdit. Y compris les funérailles – et ainsi, les morts de Rome seront
mis en terre pendant ce mois de carême sans le secours des suffrages publics de
leurs proches.
Suffrage
publics : parlons-en. Le cardinal
Angelo De Donatis, vicaire général pour le diocèse de Rome, a appelé à une
journée de jeûne et de prière dans la Ville éternelle le 11 mars, pour « invoquer
l’aide de Dieu pour Rome, pour l’Italie et pour le monde ». « Nous
prierons pour tous les contaminés et ceux qui prennent soin d’eux, ainsi que
pour nos communautés, car elles sont témoignages de foi et d’espérance en cette
période », a-t-il écrit dans sa lettre aux fidèles vendredi dernier.
Il n’est pas question de prier pour la fin de
l’épidémie. Nous sommes aujourd’hui des
chrétiens adultes, n’est-ce pas, qui n'implorons
plus le secours de Dieu face aux malheurs du temps. La science et la technique
s’en chargent.
Il n’est
même pas question de prier pour le repos de l’âme de ceux qui meurent – du Coronavirus ou d’autre chose d’ailleurs.
Il n’est surtout pas question de rappeler que
les épidémies en tant que telles ont toujours été considérées par l’Eglise
comme la punition du mal que fait l’homme : non pas la punition directe de tel
ou tel malfaiteur, cela va de soi, mais la
conséquence du bouleversement de l’ordre de la Création par les fautes commises
par l’humanité. La mort n’est-elle pas la sanction du péché originel ?
La maladie aussi. Et la souffrance
qu’elle entraîne peut devenir féconde dès lors qu’elle est associée à la plus
épouvantable et la plus injuste des souffrances, celle du Christ sur la croix.
Qui osera le dire ? Les épidémies
sont des miséricordes divines : elles rappellent à l’homme la fragilité de sa
condition, sa nature de passager sur cette terre, la possibilité que la mort puisse
frapper n’importe qui, n’importe quand, au hasard d’une poignée de mains (ou
d’un accident, ou d’une maladie ignorée), alors qu’on avait prévu de vivre et
de faire tant de choses encore.
Ce sont
des miséricordes divines, car elles sont occasion de charité : celle des
soignants ; celle des « médecins spirituels » que sont les prêtres et des
religieux accompagnant héroïquement lépreux ou pestiférés tout au long des siècles ; celle des proches qui
prenant toutes les précautions nécessaires se rendent disponibles pour les
malades.
Ce sont des miséricordes divines, parce qu’elles rappellent à chacun la réalité et la
proximité des fins dernières. Suis-je prêt, prête pour mourir ? Quand
donc nos bons évêques publieront-ils des communiqués pour rappeler aux
populations des nations postchrétiennes, mais où restent des souvenirs du ciel
et de l’enfer, et peut-être même du purgatoire, que l’important de la vie est de se préparer à bien mourir, et non d’abord
de vivre en bonne santé ?
Ce sont
des miséricordes divines, enfin, lorsqu’après avoir permis ces maux, à travers
elles, Dieu fait montre de sa grande sollicitude pour les hommes, en répondant
à leurs supplications et en faisant cesser ces plaies qui frappent notre vie
ici-bas – non seulement par la maladie et la mort, mais par le bouleversement
de la vie paisible et du bon ordre économique qui, dans l’exacte mesure où il
favorise une vie juste et conforme au bien, peut et doit être recherché.
« Écoute moi et comprends bien, toi, le plus
petit de mes fils, rien ne doit effrayer ou de peiner.
« Que ton cœur ne soit pas troublé. N’ai pas
peur de cette maladie, ni d’aucune autre maladie ou angoisse.
« Ne suis-je pas là, moi qui suis ta Mère ?
« N’es-tu pas sous ma protection ?
« Ne suis-je pas ta santé ?
« Ne reposes tu pas heureux en mon sein ? Que
désires-tu de plus ? Ne sois pas malheureux ni troublé par quoi que ce soit. »
Paroles de Notre Dame de
Guadalupe à son petit Juantzin, saint Juan Diego
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