Il comptait rendre
le lendemain matin ses devoirs à messieurs (les
chanoines) du chapitre mais, quand il eut tiré son manteau long de la
valise où il l’avait enfermé, il le trouva percé dans tous les doubles. C’était
un nouveau tour dont il n’a jamais connu les auteurs. Dès lors, une vive
impression lui fit entrevoir qu’il serait un jour percé des traits de la calomnie et déchiré de toutes parts pour la
gloire de son Maître.
Comme il n’était pas délicat sur le fait des vêtements, il en eut bientôt pris son parti. Son manteau fut rapiécé à la hâte et ce fut dans cet état qu’il alla saluer le doyen et les chanoines de la cathédrale.
L’histoire de ce manteau criblé fit bientôt la nouvelle du jour. Les uns en rirent, les autres en eurent pitié, les plus sages se souvinrent que saint Martin dont les habits grossiers avaient blessé les yeux de l’évêque Défenseur s’était fait un nom immortel dans toutes les églises. Ainsi, un chapitre extraordinairement assemblé installa Boudon. Ce fut un samedi 27 de juillet que la cérémonie s’en fit.
Le nouvel
archidiacre ne resta pas longtemps à Evreux. Une affaire importante et, chez
lui, il n’y en eut jamais d’autres que celles de la charité, l’appela à Rouen. Ce
fut là qu’il écrivit à MM. les curés de la ville d’Evreux une lettre commune. Quoiqu’un
peu obscure, elle est si pleine d’humilité et d’ardeur pour les intérêts de
Dieu seul qu’on ne peut encore la lire aujourd’hui sans en être touché :
J’ai cru que l’adorable
Crucifié serait glorifié si, ayant été appelé par un excès de son amour à l’archidiaconat
d’Evreux, nous avions soin de nous recommander à vos saints sacrifices. Ce
n’est pas, Messieurs, le pauvre pécheur que je recommande à votre souvenir, je
vois devant Dieu que je mérite d’être effacé dans l’esprit de toutes les
créatures ; ce sont les seuls intérêts de Dieu dont je vous prie d’avoir
soin dans vos prières. C’est Jésus qui doit être l’archidiacre d’Evreux et non
pas le dernier des hommes.
Tout ira bien si le pauvre archidiacre est bien détruit, bien anéanti par l’esprit de Dieu. C’est dans cette vue que j’ai offert l’archidiaconé d’Evreux à la très digne Mère de Dieu, sachant que si une fois elle l’a entre les mains, il sera tout au pouvoir de son Fils bien-aimé. »
Toute la lettre
qui est longue est du même style. Ceux à qui elle était adressée y répondirent
quelque-temps après mais, quoiqu’en peu de mots, ils le firent avec autant de
dignité que de politesse.
Couronne de S. Henri |