La Basilique du Saint-Sépulcre de Jérusalem |
Chers amis dans le Christ,
L’hymne de louange que nous venons de chanter nous unit aux anges et à l’Église de tous
les temps et de tous les lieux – à « la
glorieuse compagnie des Apôtres, à la noble assemblée des Prophètes et au
cortège des Martyrs vêtus de la robe blanche » – rendant ainsi gloire à
Dieu pour l’œuvre de notre rédemption, accomplie à travers la passion, la mort
et la résurrection de Jésus Christ. Devant
ce Saint Sépulcre, où le Seigneur « a
vaincu le pouvoir de la mort et ouvert aux croyants le Royaume des cieux »,
je vous salue tous, dans la joie de ce temps pascal.
… L’Évangile de saint Jean, nous a laissé un récit
qui évoque la visite de Pierre et du disciple bien-aimé au tombeau vide, le
matin de Pâques. Aujourd’hui, à près de
vingt siècles de distance, le Successeur de Pierre, Évêque de Rome, se tient
devant ce même tombeau vide et contemple le mystère de la Résurrection.
Suivant les pas de l’Apôtre, je désire proclamer encore, aux hommes et aux
femmes de notre temps, la foi inébranlable de l’Église : Jésus Christ « a été crucifié, est mort et a été enseveli »,
et « le troisième jour il est ressuscité
des morts ». Exalté à la droite du Père, il nous a envoyé son Esprit pour
le pardon des péchés. En dehors de lui, que Dieu a fait Seigneur et Christ, « il
n’y a pas sous le ciel d’autre nom donné aux hommes, par lequel nous puissions
être sauvés » (Ac 4, 12).
Messe de Pâques à la Basilique du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Les Prêtres, en aube, sont placés à l'entrée et à côté de l'Anastasis, la chapelle construite sur l'emplacement du tombeau vide. |
Devant ce lieu saint, et méditant cet événement
prodigieux, comment ne pas « avoir le
cœur transpercé » (Ac 2, 37), tout comme ceux qui les premiers entendirent
la prédication de Pierre le jour de la Pentecôte ? Ici, le Christ est mort et est ressuscité pour ne plus jamais mourir.
Ici, l’histoire de l’humanité a été changée de manière décisive. Le long règne
du péché et de la mort a été brisé en morceaux par le triomphe de l’obéissance
et de la vie ; le bois de la Croix expose à nu la vérité concernant le bien
et le mal ; le jugement de Dieu a été rendu sur ce monde et la grâce de
l’Esprit Saint s’est répandue sur l’humanité. Ici, le Christ, nouvel Adam, nous a montré que le mal n’a jamais le
dernier mot, que l’amour est plus fort que la mort, que notre avenir, l’avenir
de toute l’humanité, est entre les mains d’un Dieu fidèle et bon.
Le Christ ressuscité apparaît aux saintes femmes. Icône. |
Le tombeau vide nous parle d’espérance, de l’espérance qui ne déçoit pas parce qu’elle est don de l’Esprit de vie (cf. Rm 5, 5). C’est là le
message que je désire vous laisser aujourd’hui, à la fin de mon pèlerinage en
Terre Sainte. Que l’espérance se lève,
toujours nouvelle, par la grâce de Dieu, dans le cœur de toutes les personnes
qui demeurent sur ces terres ! Puisse-t-elle prendre racine dans vos cœurs,
être l’hôte de vos familles et de vos communautés, et inspirer chacun de vous
pour rendre un témoignage toujours plus fidèle au Prince de la Paix ! L’Église
en Terre Sainte, qui a si souvent fait l’expérience de l’obscur mystère du Golgotha,
ne doit jamais cesser d’être l’intrépide héraut du lumineux message d’espérance
que le tombeau vide proclame. L’Évangile
nous enseigne que Dieu peut faire toutes choses nouvelles, que l’histoire ne se
répète pas, que les mémoires peuvent être guéries, que les fruits amers de la
récrimination et de l’hostilité peuvent être dépassés, et qu’un avenir de
justice, de paix, de prospérité et de coopération peut se lever pour tout homme
et pour toute femme, pour la famille humaine tout entière, et d’une manière
particulière pour le peuple qui demeure sur cette terre si chère au cœur du
Sauveur.
Cette antique église de l’Anástasis rend un témoignage muet aussi bien aux lourdeurs de notre
passé, avec ses erreurs, ses incompréhensions et ses conflits, qu’à la promesse de gloire qui continue de
rayonner du tombeau vide du Christ. Ce lieu saint, où la puissance de Dieu
s’est manifestée dans la faiblesse, où les souffrances humaines ont été
transfigurées en gloire divine, nous invite à tourner encore notre regard de
foi vers la face du Seigneur crucifié et ressuscité. En contemplant sa
chair glorifiée, complètement transfigurée par l’Esprit, nous parvenons à
réaliser plus pleinement que même maintenant, par le Baptême, « nous portons partout et toujours en notre corps
les souffrances de mort de Jésus, pour que la vie de Jésus soit, elle aussi,
manifestée dans notre corps » (2 Co 4, 10-11). Même maintenant, la grâce de
la résurrection est à l’œuvre en nous ! Puisse
la contemplation de ce mystère stimuler nos efforts, au niveau personnel tout
comme dans la communauté ecclésiale, en vue d’une croissance dans la vie selon
l’Esprit par la conversion, la pénitence et la prière ! Puisse-t-elle nous
aider à surmonter, par la puissance de ce même Esprit, les conflits et les
tensions qui viennent de la chair et enlever les obstacles, aussi bien
intérieurs qu’extérieurs, qui entravent notre progression dans le témoignage
commun rendu au Christ et à la puissance de réconciliation de son amour.
… Dans ce tombeau, elle est appelée à ensevelir toutes ses inquiétudes et ses
craintes, afin de ressusciter chaque jour et de continuer son pèlerinage à
travers les rues de Jérusalem, sur les route de Galilée et au-delà, proclamant
le triomphe du pardon du Christ et de la promesse de la vie nouvelle. Comme
chrétiens, nous savons que la paix à laquelle aspire cette terre déchirée a un
nom : Jésus Christ. « Il est notre paix
», lui qui nous a réconciliés avec Dieu en un seul corps, par la Croix, mettant
fin à la haine (cf. Ep 2, 14). Déposons
donc entre ses mains toute notre espérance pour l’avenir, tout comme, à l’heure
des ténèbres, il remit son esprit entre les mains du Père.
Permettez-moi de conclure par un mot d’encouragement particulier pour mes frères les Évêques et les
prêtres, ainsi que pour les personnes consacrées, hommes et femmes, qui servent
l’Église bien-aimée en Terre Sainte. Ici,
devant le tombeau vide, au cœur même de l’Église, je vous invite à rallumer
l’enthousiasme de votre consécration au Christ et de votre engagement à servir
avec amour son Corps mystique. A vous, revient l’immense privilège de rendre
témoignage au Christ, dans la terre qu’il a sanctifiée par sa présence et son
ministère. Par votre charité pastorale, permettez, à vos frères et sœurs, à
tous les habitants de cette terre, de sentir la présence réconfortante et
l’amour qui réconcilie du Ressuscité. Jésus demande à chacun de nous d’être des
témoins d’unité et de paix auprès de tous ceux qui vivent dans cette Ville de
la Paix.
Nouvel Adam, le Christ est la source de l’unité à laquelle la famille humaine tout entière est
appelée, unité dont l’Église est le signe et le sacrement. Agneau de Dieu, il est la
source de la réconciliation qui est à la fois don de Dieu et tâche qui nous
est confiée. Prince de la Paix, il
est la source de cette paix qui
transcende toute négociation, la paix de la Jérusalem nouvelle. Qu’il vous
soutienne dans les épreuves, qu’il vous apporte réconfort dans les peines, et
qu’il vous confirme dans vos efforts pour proclamer et faire grandir son
Royaume !
A vous tous et à ceux que vous servez, j’accorde de grand cœur la
Bénédiction Apostolique en gage de la paix et de la joie de Pâques.
+ Benoît XVI, pp. au Saint-Sépulcre de Jérusalem, le 15 mai 2009