La rencontre de Jésus ressuscité avec sa très sainte Mère. Regina coeli, laetare ! Alléluia ! |
Du vénérable abbé
Henri Marie Boudon, « Dieu et moi »
Première
considération :
Je contemplerai le
Sauveur dans la pompe de sa résurrection et les belles qualités dont il est
paré, la clarté dont son corps brille de toutes part, l’impassibilité dont il
jouit, la subtilité qui lui donne lieu de sortir du tombeau sans y faire brèche,
l’agilité qui dans un moment le porte d’un lieu à un autre ; et ensuite je méditerai
quelle fut la gloire des anges qui, ayant été en deuil pendant la passion de
leur souverain, furent en fête en ce beau jour de sa résurrection.
De la joie des
anges je passerai à la joie de la sainte Vierge visitée par son Fils
glorieux : je me figurerai d’entendre ce qui se passa en cette charmante
conversation, de même je prendrai plaisir de me représenter l’agréable
saisissement de sainte Madeleine et de ses compagnes, et celui des apôtres dans
les apparitions dont il les honora ; j’entrerai dans leurs sentiments.
Affections :
Adorable Jésus, qu’il
est bien que vous soyez ainsi revêtu de gloire et d’éclat ! Que de plaisir
je reçois de vous voir triomphant de la mort et de l’enfer dépouillé !
Quelle fête pour mon cœur en cette vue et cette conjoncture où vous commencez d’être
traité en Dieu.
Justice de mon
Dieu, j’avais peine de vous aimer en considérant le mauvais état où vous aviez
réduit mon Sauveur en sa Passion, mais je vous pardonne aujourd’hui en
contemplant sa gloire.
Vierge sainte,
comment n’en mourûtes-vous pas de joie ? Faut-il dire avec un de vos
dévots que, comme ce fut un miracle que tous ne mourûtes pas de tristesse au
jour de sa mort, c’en fut un autre que vous ne mourûtes pas de joie au jour de
sa résurrection !
Permettez-moi s’il
vous plaît d’adorer avec vous votre Fils ressuscité, de remercier le Père
éternel de l’honneur qu’il lui a rendu, et de prendre part en vos sacrés
transports.
Seconde
considération :
L'Ascension, détails. |
Jésus ressuscité m’invite
d’entrer dans une vie nouvelle ; il ne s’arrête sur la terre que pour
obéir aux ordres de son Père, vivant au reste dans une sainte impatience de
monter au ciel, en quoi il me fait une riche instruction de m’éloigner de cœur
des choses d’ici-bas et de soupirer après les éternelles ; d’ailleurs, bien
que le Sauveur parût de temps en temps à ses disciples, c’était fort rarement
s’il mangeait avec eux, c’était avec dégoût ; m’apprendre d’être sur la
terre sans attachement, sans y prendre aucune consolation de l’usage des choses
nécessaires, d’y être avec dégoût et aversion de tout le sensuel.
Affections :
Ai-je bien pu me
plaire longtemps au lieu de mon bannissement ? Avoir attachement aux
plaisirs de la terre, il n’en fallait user que par pure nécessité, à regret.
Donnez-le moi, mon ressuscité, donnez-le moi ce saint dégagement et ce dédain
constant des créatures, autrement je ne l’aurai jamais ! Que d’affections
ont été dans un étrange égarement !
Aimons, mon pauvre
cœur, en meilleur lieu que le ciel et que le Dieu du ciel soient l’objet de tes
désirs et de tes recherches. Ne soyons plus sur la terre que de corps, vivons-y
en ressuscités, soupirons après l’empirée qui est le lieu des ressuscités et,
comme eux, ne touchions de quoi que ce soit de terrestre.
Troisième
considération :
Me voici à la
montagne des Olives d’où le Sauveur ressuscité s’élève dans les cieux. Il y est
et apôtres qui le suivaient des yeux sont avertis par deux anges de se retirer
en Jérusalem pour y attendre le Saint Esprit ; obéissant, les voilà de
corps en Jérusalem car, de cœur, d’affection, de conversation, ils sont dans le
ciel avec leur bon maître pour me dire que si je m’arrête encore sur terre ce
doit être avec l’éloignement du cœur des objets créés.
Donc plus de joie,
plus de penchent et de goût au manger, au dormir, au divertissement, à la
conversation des créatures, aux parents, aux amis ; je dois regarder le monde
avec rebut comme les âmes du ciel et, avec saint Paul, comme un pendu, un objet
d’horreur : Mihi mundus crucifixus
(Galat vi).
Affections :
Mon Sauveur que je
ravi de vous adorer à la droite de votre Père ; mais puisque vous emportâtes
au ciel les cœurs de vos disciples, ravissez-moi le mien ! Ah ! qu’il
est honteux de s’être amusé à goûter les chétives satisfactions de cette vie, sous
couleur qu’on les goûtait sans crime et comme par nécessité.
Il y a un sensible
déplaisir de s’être amusé, de l’heureux état des âmes ressuscitées en esprit et
montées au ciel.
Enfin, il faut imiter
ces cœurs fidèles à la grâce qui ne touchent la terre que par nécessité de
condition et, comme eux, être insensible au commode et au plaisant. Votre Fils,
mon Sauveur, cela est dit, mais il est bien éloigné d’être fait…
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