Cette grande humilité était le principe de la tendresse
infinie qu’il eut toujours pour les pauvres et du plaisir qu’il prenait avec
ceux qui étaient le rebut et comme la balayure de la terre. On voyait cet homme
vénérable par sa dignité et par ses cheveux blancs tantôt instruire à la porte
de sa chambre un pauvre soldat et lui donner ensuite tout ce qu’il pouvait,
tantôt dans une rue caresser un enfant pour lui apprendre les principes de la
religion, tantôt s’asseoir au chevet du lit d’un pauvre moribond afin de le
disposer à bien mourir.
Il était là comme dans son centre et la chaumière du plus
pauvre paysan, le flattait plus que le palais du plus grand des rois. Il avait
eu l’honneur d’avoir pour marraine Henriette-Marie de Bourbon, sœur de Louis
XIII et reine d’Angleterre. Il eût pu, il eût même ce semble dû, lui rendre ses
devoirs pendant qu’elle était à Paris et qu’il y était aussi. Jamais il ne
voulut ni la voir, ni se faire connaître à elle le titre de filleul qu’une
auguste princesse lui aurait donné du relief, il n’avait de goût que pour les
opprobres et pour la confusion.
Publier ses défauts quand l’occasion s’en présentait, raconter
quelques histoires de sa vie où il avait été bien humilié, chercher quelque
moyen sûr de l’être encore, rendre à Dieu des actions de grâces quand il
l’avait été : voilà son étude et son occupation.
« Je sais, dit un magistrat d’Andelys, qu’ayant ouvert
dans la boutique d’un libraire un livre qui était la calomnieuse histoire de sa
vie, et étant tombé sur ces paroles : ‘‘Les crimes ci-dessus ne sont rien
en comparaison de ceux que ledit sieur Boudon a commis.’’ Il en fut si
transporté de joie qu’il s’en alla de ce pas célébrer la sainte messe afin d’en
remercier la divine bonté. »
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