Le Calvaire, en hébreu - Golgotha - chapelle de la Crucifixion du Sauveur, Basilique du Saint-Sépulcre de Jérusalem |
Saint Alphonse-Marie de Liguori
Considérations sur la Passion de Jésus-Christ
Chap. 3,
IV, le crucifiement
D'après les
révélations faites à sainte Brigitte, quand
notre Sauveur se vit sur la croix, il étendit de lui-même sa main droite à
l'endroit où elle devait être clouée. Les bourreaux clouèrent ensuite sa
main gauche, et enfin ses pieds sacrés; après quoi, ils laissèrent Jésus
mourir sur ce lit de douleur. Saint Augustin dit que le supplice de la
croix était extrêmement cruel, parce qu'il rendait la mort la plus lente,
afin de prolonger la douleur.
Ô ciel !
quel spectacle de voir le Fils du Père éternel crucifié entre
deux criminels ! C'est là précisément ce qu'Isaïe avait prédit (Is 53,
12). Saint Jean Chrysostome, considérant Jésus en croix, s'écrie avec
admiration et amour : " Je vois mon Sauveur dans le ciel entre le
Père et le Saint-Esprit; je le vois sur le mont Thabor entre deux Saints,
Moïse et Élie; et comment le vois-je maintenant crucifié sur le Calvaire
entre deux voleurs ?" Mais cela devait être ainsi; car, selon
le décret divin, c'est ainsi qu'il devait mourir, pour expier par sa mort
les péchés des hommes et les sauver, conformément à la prophétie d'Isaïe.
Le même
Prophète fait cette question: "Quel
est cet homme si beau et si fort, qui vient d'Édom, les vêtements couleur de sang ?" (Is 63, 3).
Édom marque la couleur rouge, mais un peu foncée, comme on le voit dans
la Genèse (Gn 25, 30). Cette demande est suivie d'une réponse, et, d'après
les interprètes, c'est Notre-Seigneur qui parle: "C'est moi qui professe la justice, et
qui me montre grand pour sauver" (Is 63, 1).
Jésus crucifié entre les deux voleurs (larrons), par Tiepolo. |
Le Prophète
interroge de nouveau: "Pourquoi donc vos vêtements sont-ils rouges,
comme les habits de ceux qui foulent le vin dans le pressoir au temps de
la vendange?" (Is 63,2). Et le Seigneur répond: "J'ai été seul à fouler le vin; aucune
homme ne s'est trouvé avec moi" (Is 63,3). Par ce pressoir,
Tertullien, saint Cyprien et saint Augustin entendent la Passion
de Jésus-Christ, dans laquelle son vêtement, c'est-à-dire sa chair sacrée fut tout couvert de
sang et de plaies, selon ce que dit saint Jean dans l'Apocalypse: "Le manteau qui l'enveloppe est trempé de
sang; et son nom? Le Verbe de Dieu" (Ap 19,13). Saint
Grégoire dit que, dans ce pressoir dont parle Isaïe, notre Sauveur a été
foulé et a foulé. Il a foulé parce que,
dans sa passion, il a vaincu les démons; et il a été foulé, parce que son
corps adorable a été brisé dans les tourments comme le raisin dans le
pressoir, suivant cet autre texte du même Prophète, déjà cité: "Yahvé s'est plu à l'écraser par la
souffrance" (Is 53,10).
Voilà donc
ce divin Maître, qui était "le plus
beau des hommes" (Ps 44, 3), le voilà, sur le Calvaire, tellement
défiguré à force de tortures, qu'il fait horreur à qui le regarde. Mais il
en paraît d'autant plus beau aux yeux des âmes dont il est aimé; car ces plaies, ces meurtrissures, ces
chairs déchirées, sont autant de marques, autant de preuves de son amour
pour nous. Écoutons un poète exprimer fort bien ce sentiment:
Descente de Croix, Rubens. |
Lorsqu'on
te considère, ô Sauveur de mon âme,
Si maltraité pour nous par la main du bourreau,
Le cœur reconnaissant de ton amour s'enflamme;
Plus on t'a déchiré, plus tu nous sembles beau.
Si maltraité pour nous par la main du bourreau,
Le cœur reconnaissant de ton amour s'enflamme;
Plus on t'a déchiré, plus tu nous sembles beau.
Mais,
ajoute saint Augustin, ce que Notre-Seigneur perd en beauté, nous
le gagnons. En effet, c'est la
difformité de Jésus crucifié qui fait la beauté de nos âmes. Elles étaient
toutes défigurées; mais, lavées dans son sang divin, elles deviennent
toutes pures et toutes belles, selon ce qu'on lit dans l'Apocalypse
(Ap 7, 13). Tous les Saints, comme enfants d'Adam, excepté la Bienheureuse
Vierge, ont été quelque temps couverts d'une robe souillée du péché de
leur premier père et de leurs propres fautes; mais, purifiée par le sang de l'Agneau, elle est devenue toute blanche
et agréable aux yeux de Dieu.
Vous aviez
donc raison de dire, ô mon Jésus ! qu'une fois élevé en croix, vous
attireriez tout à vous (Jn 12, 32). Assurément, vous n'avez rien omis pour
gagner l'affection de tous les cœurs. Aussi, combien d'âmes heureuses, en
vous voyant crucifié et mort pour leur amour, ont tout abandonné,
richesses, dignités, patrie, parents, et ont osé braver les tortures et la
mort, pour se donner entièrement à vous! Malheur à ceux qui rejettent les
grâces que vous leur avez procurées par tant de travaux et de douleurs! Ah
! leur plus grand tourment dans l'enfer, ce sera de penser qu'ils ont eu
un Dieu qui, pour les attirer à son amour, a donné sa vie sur une croix,
et qu'eux, de leur plein gré, ils ont voulu se perdre, se vouer à une
ruine 1irréparable à jamais, durant toute l'éternité. Eh quoi, mon doux
Rédempteur, j'ai moi-même mérité de tomber dans ce malheur, pour les
offenses que je vous ai faites! Combien
de fois n'ai-je pas résisté à votre grâce, par laquelle vous cherchiez à
m'attacher à vous ? Combien de fois, méprisant votre amour, ne vous
ai-je pas tourné le dos, pour suivre mes inclinations ? Ah! que
ne suis-je mort plutôt que de vous offenser! que ne vous ai-je
toujours aimé! Je vous rends grâce, ô mon Amour! de m'avoir supporté avec
tant de patience, et même, au lieu de m'abandonner comme je le méritais,
d'avoir multiplié envers moi vos invitations, vos traits de lumière, et
vos miséricordieuses inspirations. Je vous en remercierai
éternellement : "L'amour du
Seigneur, à jamais je le chante" (Ps 88, 2).
Notre-Dame des douleurs, Ayamonte. |
Mon Sauveur
et mon Espérance ! je vous en conjure, ne cessez pas de m'attirer à vous et de me fortifier de plus en
plus par le secours de vos grâces, afin que dans le ciel je puisse vous
aimer avec plus d'ardeur, en me rappelant tant de miséricordes que vous
m'avez faites, après tant de déplaisirs que je vous ai donnés. J'espère
tout par les mérites de ce sang précieux que vous avez répandu et de cette
mort douloureuse que vous avez endurée pour moi.
Sainte
Vierge Marie,
protégez-moi,
priez pour moi !
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