Certes, après l’annonce de la Bonne Nouvelle du salut universel en
Jésus Christ, c’est le rôle des pasteurs
d’instruire le peuple de Dieu sur le bien et le mal. Il s’agit d’indiquer «
le chemin du Ciel » (comme disait saint Jean-Marie Vianney au petit berger
qui lui avait montré la route d’Ars). L’enjeu
n’est ni plus ni moins que la vie éternelle ou la damnation. On ne rigole pas
avec ça !
Insitution de la divine Eucharistie |
C’est pourquoi tous ceux qui
enseignent et exhortent au nom du Christ doivent annoncer, sans compromis et
sans lâcheté, ce qui conduit à la bénédiction ou à la malédiction, montrer
clairement le chemin escarpé qui mène à la vie et dénoncer la route large et
spacieuse qui mène à la perdition. Même si cela ne fait pas plaisir, c’est une
œuvre de charité que de dénoncer le péché. Cependant, cela ne peut se faire
sous la forme d’une liste de péchés associés à une peine : il s’agit d’un vrai
enseignement qui doit éclairer la conscience du fidèle, l’encourager
à la conversion et non l’enfermer dans une impasse.
C’est pourquoi, si
l’Eglise a le devoir de dénoncer largement le péché et d’enseigner au plus
grand nombre à le repérer et à l’éviter, elle ne peut
désigner le pécheur que dans un cadre bien précis, fixé par le Seigneur
lui-même. Ce cadre est la confession.
Le Sacrement de Pénitence qui rétablit la communion en vue de la sainte Communion |
Lorsque Jésus souffla sur ses apôtres et leur dit : "Recevez l’Esprit Saint ! Ceux à qui vous
remettrez les péchés, ils leur seront remis ; ceux à qui vous les retiendrez,
ils leur seront retenus" (Jean
20,22-23), il n’a pas donné un
code avec des règles à destination de tous les fidèles. Il a institué des
ministres chargés d’accompagner leurs frères. Si le Seigneur a pris le risque de confier ce pouvoir extraordinaire à
des serviteurs tout aussi pécheurs que les autres hommes, c’est qu’il voulait
éviter un danger plus grand encore. Ce danger est celui du jugement, jugement
d’autrui, mais aussi jugement de soi-même. Jésus a commandé : « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés
» (Mat 7,1). Il ne veut pas que chacun y aille de
son propre petit jugement : la bible d’une main, le catéchisme de l’autre,
le code de droit canonique dans une troisième, tout cela baignant dans les
grands principes moraux des arrière-grands-parents qui n’ont souvent rien à
voir avec le message de Jésus ou les conditions culturelles actuelles.
Pour répondre en quelques minutes à la question qu’on me posait, je
n’avais pas le temps de me lancer dans un cours de théologie morale, mais je ne
pouvais surtout pas donner une liste de situations permises et défendues.
1°) Cela
aurait signifié que chacun, seul dans son coin, seul devant une liste, aurait
dû se juger lui-même. Mais aucun fidèle,
même l’évêque et même le pape, ne peut se juger lui-même (le pape et moi nous
nous confessons comme tout le monde à un autre prêtre !). Cela est valable
pour chacun…
Messe de la Sainte Cène au Saint-Sépulcre de Jérusalem |
2°) Ce
catalogue « du permis et du défendu » donnerait la possibilité, de l’extérieur
et sans discernement, de juger autrui digne ou indigne de communion (un peu
comme un radar flashe tous les véhicules qui franchissent la vitesse limite,
sans savoir s’il s’agit d’un fou du volant ou d’une ambulance menant un mourant
aux urgences !).
Frères et sœurs, chacun a le devoir d’éclairer sa conscience et
d’évaluer sa propre vie face à l’Evangile (cela s’appelle l’examen de
conscience) et ensuite de faire de son mieux pour se conformer à la volonté de
Dieu.
Mais il faut rappeler à tous (ceux qui sont "en règle" comme ceux qui
ne le sont pas) que seul le sacrement de confession est le lieu de
la réconciliation avec Dieu qui nous rend dignes de recevoir la sainte
communion.
Ce n’est pas en communiant ou en ne communiant pas que l’on fait ce
que Dieu veut, c’est en se confessant !
Il faut, certes, éviter les scandales quand on vit une situation
publique ambiguë, mais on peut communier
si, et seulement si, dans le secret du confessionnal, le prêtre envoyé pour ça
par Dieu nous a jugés suffisamment contrits pour recevoir le pardon de nos
péchés. Voilà pourquoi je fais souvent ce communiqué précis avant la communion
aux messes que je préside :
« Pour communier, recevoir le Corps du Christ, je
vous rappelle qu’il faut être baptisé, avoir fait sa première communion, s’être
confessé, avoir reçu l’absolution et vivre selon l’Evangile ».
Cela suffit
comme règle… et concerne tout le monde !
+ David Macaire
Archevêque de Saint-Pierre et Fort-de-France
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