Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc
d’Anjou,
de jure
Sa Majesté le Roi Louis XX.
Mes
chers compatriotes,
La date du 25 août, fête de la Saint-Louis,
mon aïeul et mon saint patron et aussi le modèle largement reconnu de la
sagesse en politique, m’offre l’occasion de m’exprimer. Je n’ai pas voulu le
faire au moment où les dramatiques événements de l’été se sont produits car ma
voix aurait peu apporté à ce qui fut dit alors. La compassion devant les
victimes s’imposait et continue à s’imposer car les conséquences de ces
attaques barbares sont loin d’être terminées ; les encouragements aux forces de
sécurité et de secours ou aux équipes de soins s’imposaient elles-aussi et
s’imposent encore devant l’ampleur du mal. Mais au-delà ? Que pouvait-on dire
devant l’horreur des actes commis ? Les assassinats aussi monstrueux que
lâches, d’êtres innocents, n’ont jamais aucune justification et les commettre
au nom d’une religion encore moins. Fanatisme et politique n’ont jamais fait
bon ménage. L’histoire nous le rappelle.
Or c’est justement au nom de l’histoire,
mais sans nostalgie et dans un souci d’avenir meilleur, que je peux apporter
quelque chose, au moment où la France, mon pays, subit une grave crise. Il me
semble que les seuls remèdes politiques habituels ne suffiront pas à conjurer
les dégâts et la profondeur du mal. Vu avec le recul des
siècles et surtout l’expérience que cela donne, le mal qui atteint la France me
parait double. Il y a d’abord
une guerre de civilisation, déclarée par un ennemi plus ou
moins visible et insidieux, et que désormais les gouvernants semblent enfin
désigner par son nom mais, surtout,
une très profonde et grave crise morale ou d’identité, sorte de
cancer de l’intérieur qui nous affaiblit tout autant, peut-être même davantage,
que l’ ennemi désigné.
De la
guerre qui est menée à la France, à l’Europe, à la Chrétienté, que dire ?
Accepter de mettre un nom sur les choses et donc les qualifier est déjà le
meilleur moyen pour combattre. L’ennemi identifié, il s’agit de concevoir et de mettre en
œuvre une politique étrangère et une politique intérieure qui répondent aux
intérêts de la France et de l’Europe chrétienne dont nous sommes solidaires. Il
s’agit ensuite d’avoir une stratégie et une tactique. Je ne doute pas que l’une
et l’autre soient à la portée de nos gouvernants quels qu’ils fussent, s’ils
acceptent de se remettre en cause, de se donner les moyens de la lutte et de
faire confiance aux spécialistes. Faire parler la raison plus que le sentiment
et l’idéologie. La France a toujours su mener les combats, ses forces armées
sont reconnues par tous et partout, et le pays entier trouvera l’énergie
nécessaire pour les soutenir. Déjà, force est de constater que de saines
réactions ont commencé à apparaître.
"Si le Seigneur ne bâtit la maison, c'est en vain que veillent les gardes". C'est dans la prière que Dieu inspire l'action juste et droite. |
La crise
morale est plus grave. Les causes internes sont toujours plus complexes à
combattre que les ennemis déclarés. Elles le sont
notamment parce qu’elles ont souvent des origines plus profondes, plus
lointaines. Mais l’histoire
dont par ma naissance je suis en quelque sorte le représentant comme héritier
et successeur des souverains qui, patiemment, siècle après siècle, ont façonné
la France, l’histoire montre que les crises de conscience ne sont pas
insurmontables. C’est même souvent de l’épreuve et de la
rupture avec des habitudes passées qui endorment plus qu’elles ne font
progresser, que la France s’est constituée. Dès l’origine ! Epreuves et
rupture, avec Clovis qui fait passer la Gaule du rang de province romaine à
celui de royaume libre et autonome ; épreuves et rupture avec la renaissance
carolingienne ; puis avec le renouveau de la souveraineté au XIIIe siècle,
celui de Bouvines et de Saint Louis ; et je continue avec le renouveau d’après
la guerre de Cent ans qui avait pourtant laissé la France exsangue et quasi à
la merci d’une dynastie étrangère. Que dire de la Renaissance qui a suivi le
désastre de Pavie, de celle d’après les Guerres de Religion ou encore du
sursaut admirable de tout le pays dans les premières années du XVIIIe siècle
alors que Louis XIV devait faire face à une Europe une nouvelle fois coalisée.
Oui, il y a un ressort
très français qui veut que notre pays même malmené, même quasiment abattu, ne
capitule pas.
Ces
sursauts proviennent de la
nature très particulière de la France. Ce n’est pas un état
comme les autres. Le pouvoir ne s’y confond pas avec la force. La France a toujours reposé sur ses
familles, sur des communautés d’intérêt, sur un état de droit mis en place
alors que l’Europe connaissait encore régime féodal et droit du plus fort. Si
la France présente cette spécificité cela lui vient de ses origines. Clovis, ne
fut pas seulement le premier des rois, mais ce fut surtout le premier des rois
chrétiens. Ainsi dès l’aube de la civilisation
française il y avait, venant couronner au sens propre comme figuré le
pouvoir, une
transcendance. Politique
et mystique allaient de pair. Jamais le roi ne fut un monarque
tout puissant. La
royauté française a toujours été vécue comme un service, imposant des devoirs
garantis par Dieu. Au-dessus du roi il y avait toujours la nécessité de
conserver les préceptes de l’évangile qui sont aussi ceux du droit naturel :
respect de la personne humaine, respect de la famille. La
France a mérité le titre de « Fille aînée de l’Eglise », parce que plus que
toute autre nation, elle a su mettre
ses devoirs avant ses droits. Elle a puisé dans la religion une éthique
qui donnait à la politique une autre dimension. Ainsi, elle
devint un modèle.
Saint Michel protégeant les grandes armes de France |
Certes
cela a pris des contours bien différents selon les âges, mais le principe a
toujours subsisté ; certes il y a eu parfois de mauvaises politiques mais
justement reconnues comme telles. Mais l’histoire nous enseigne aussi qu’il y a des limites à ne
pas franchir, des principes non négociables : la souveraineté de l’état, le
primat du bien commun contre les intérêts particuliers, les libertés notamment
collectives pour garantir les particularismes hérités de l’histoire des lieux,
etc.
L’histoire
nous apprend aussi et surtout qu’un
peuple est grand quand il a des motifs de partager une vision commune de sa
destinée c’est-à-dire de son avenir ; de donner de
lui-même pour des causes qui le dépassent mais qui le font entrer dans
l’histoire. Tel est bien ce qui a produit les grands artistes, les grands
savants, les grands capitaines et les conquérants ; les gloires nationales que
nos livres, nos mémoires, nos chansons exaltaient. Durant longtemps, de
l’épopée des grognards de l’Empire au « debout les morts ! » de la Guerre de
14-18, les régimes nouveaux ont continué à évoquer ce récit national. La
mystique de la Patrie avait su remplacer l’amour pour le Roi et la Couronne.
Mais qu’en est-il actuellement ? Quelle « mystique » est-elle offerte aux
jeunes depuis deux ou trois générations ? Celle du consumérisme et du
matérialisme ; celle de la culture de la mort ; celle du jeu et du moindre
effort, celle de la toute-puissance de l’argent. Depuis des décennies ont été élevés
au rang de nouvelles valeurs l’individualisme, l’abandon de la notion de
service et de sacrifice, le relativisme, l’immanence et, comble, la négation
des épisodes glorieux de notre histoire dont il faudrait s’excuser ! Tout cela
a détruit peu à peu les fondements de la société qui n’a plus su intégrer ceux
qui frappaient à sa porte et qui, surtout, a ôté tout souhait et désir de
s’intégrer à la France devenue plus un contre-modèle qu’un modèle.
Mgr Louis de Bourbon, de jure Louis XX de France, et son épouse Marie Marguerite |
Il me
semble que la cause
première de ce triste état des lieux est avant tout l’abandon des repères
notamment religieux par notre pays c’est-à-dire ces
limites sans lesquelles les libertés ne sont plus que des licences dangereuses
tant pour l’homme que pour la société. Ainsi, en un peu plus de deux siècles a
été porté profondément atteinte à notre identité, française et chrétienne. Les
repères perdus, l’avenir est difficile à construire ! Aussi, nourrie de bonnes intentions comme le
prétendent ses partisans, la laïcité républicaine n’en est pas moins un leurre.
Elle nous coupe en réalité de nos racines séculaires et le vide idéologique
laisse la place à toutes les idéologies mortifères.
Les
jeunes ont besoin de grandeur, besoin d’espérance. Une société qui désespère et désenchante
sa jeunesse n’a plus sa place. Il faut revenir de cet esprit d’abandon. Il faut
retrouver enthousiasme, désir de se dépasser et, surtout, volonté. Retrouver
la ferveur de Bouvines et de Patay, celle que montrent les champions sportifs
prenant exemple sur les saints ou les militaires. Offrir des perspectives qui
présentent leur part de gratuité et de grandeur. Ces occasions ne manquent
pourtant pas aujourd’hui où les
combats à mener sont nombreux : ceux pour redonner à la
vie humaine sa place avec ses multiples facettes depuis l’éthique oubliée dans
les états riches jusqu’aux problèmes de malnutrition dans les pays pauvres ;
ceux pour rendre notre planète plus durable après qu’elle a été souvent
saccagée par l’inconscience de plusieurs générations ; ceux pour faire accéder
le plus grand nombre à l’instruction sans laquelle il n’y a pas d’échanges
possibles entre les hommes. Savoir se parler et pouvoir se comprendre !
Vitrail aux armes de France |
Redonner
le goût du bien commun et se souvenir que la France est d’abord une communauté
forte de son identité façonnée par ses racines gréco-latines et chrétiennes.
Heureusement,
bon nombre de jeunes l’ont retrouvé d’eux-mêmes dépassant les faux maîtres qui
les trompaient plus qu’ils ne les formaient. Depuis plusieurs années on les
voit veiller sur leur pays ; retrouver les fondamentaux de la philosophie
notamment politique, renouer avec les valeurs du don, de la gratuité sans
lesquelles il n’y pas de bien commun possible. On les voit surtout retrouver le
sens de la famille et de la vie sur lequel ils assoient leurs perspectives d’avenir.
Le monde appartient aux jeunes et à ceux qui donnent du sens à leur vie.
L’histoire de France nous l’enseigne.
J’ai
voulu le rappeler car, en invoquant l’aide de Saint-Louis, mon aïeul, mais
aussi celle de tous les saints et saintes de France, si nombreux, et en
n’oubliant pas le dernier d’entre eux, le père Hamel, mort en martyr pour sa
Foi, je crois plus que jamais en mon pays et en son avenir.
Louis de Bourbon, duc d’Anjou.
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