mardi 23 février 2010

356e anniversaire du grand-archidiaconat du vénérable abbé Henri-Marie Boudon

Le diocèse d'Evreux (en rose) sous M. Boudon.

Le 28 février de l'an de grâce 1654, Mgr Gilles Boutault (1594-1661), 76e évêque d’Évreux (1649-1661) sous le gouvernement du cardinal Mazarin, signait la nomination du vénérable Henri-Marie Boudon comme grand-archidiacre de son diocèse, lui confiant ainsi la responsabilité de 155 paroisses. L'abbé Boudon était encore à Paris et ne viendra prendre solennellement possession de son titre que le 27 juillet suivant, lors d'un chapitre extraordinaire des chanoines de la cathédrale. De l'ordre des acolytes, il sera ordonné sous-diacre le 19 septembre, et prêtre au tout début de l'an 1655.

lundi 22 février 2010

La dévotion aux saints Anges (1)

Objet propre de la spiritualité de l'Archiconfrérie, avec la dévotion eucharistique, les piété, gratitude et amitié envers les saints Anges furent excellement présentées par le vénérable Henri-Marie Boudon en sa Dévotion aux neuf choeurs des saints Anges, heureusement rééditée en maniable livre de poche par les éditions Clovis en 1998. A l'instar du Bulletin des saints Anges, profitons de ce saint Temps de Carême pour nous plonger dans l'amoureuse étude de l'angélologie, loin des bizarreries hétérodoxes de moults publications contemporaines sur ce sujet (notamment sur la "Toile"), mais bien à l'école de notre sainte Mère l'Eglise.

À Notre-Dame des Anges.

Grande Reine du paradis, Souveraine des bienheureux esprits qui jouissent d’un repos éternel et d’une félicité incompréhensible, prosterné à vos pieds, le lieu de tout secours, où les plus grands pécheurs trouvent leur refuge, les plus persécutés leur asile, les plus affligés leur consolation, les plus faibles leur appui, les plus abandonnés une puissante protection ; pieds sacrés, où l’infidèle rencontre la foi, l’hérétique la soumission à la sainte Église catholique, le pécheur sa conversion, le tiède la ferveur, l’aveugle la clarté, et l’impuissant la vertu et la force, le juste la véritable sainteté ; pieds glorieux, où les âmes les plus éminentes puisent les plus belles lumières du paradis, apprennent les plus pures maximes de Jésus-Christ, Dieu, votre Fils, s’instruisent des plus solides vérités de la religion, sont embrasées des plus vives flammes du pur amour et se trouvent revêtues d’une justice consommée ; aimables pieds, où je veux vivre et mourir comme aux pieds de ma bonne et fidèle maîtresse ; prosterné, dis-je, à vos pieds, ô ma puissante protectrice ! Je vous offre et vous y donne, je vous y dédie et consacre ce petit ouvrage, tout dédié et consacré en l’honneur de tous les neuf chœurs des anges, vos fidèles sujets, et les illustres princes de votre divine cour. Comme vous êtes leur aimable princesse, leur auguste impératrice et glorieuse dame, c’est avec justice que je dédie à vos grandeurs ce qui regarde leurs intérêts et ce qui touche leur gloire. Et puis, ma sainte dame, vous savez que je n’ai rien qui ne soit à vous ; c’est une vérité qu’il m’est doux de répéter et de publier hautement en toutes sortes d’occasions, tenant à un honneur incomparable la qualité de votre serviteur, que je veux conserver inviolablement, et que je préfère de toute l’étendue de mon cœur à tout ce qu’il y a de plus grand et de plus glorieux sur la terre. Bénissez, ô la toute sainte, ce petit ouvrage de vos plus saintes bénédictions, y étant intéressée comme à une chose qui vous appartient et qui est toute à vous. Obtenez une onction de grâces pour ceux qui le liront ; faites, en vertu de Jésus, votre fils bien-aimé, qu’il serve à établir et accroître la dévotion à tous les chœurs des anges ; pour l’honneur et la gloire de Dieu seul, notre principe et notre unique fin en toutes choses. Dieu seul, Dieu seul, Dieu seul.


A mon bon ange gardien.

Mon seigneur et fidèle guide de ma vie, quand je pense à ce que vous êtes, à ce que je suis, à mes ingratitudes, à vos incroyables bontés, mon esprit se trouve comme dans un abîme : je ne sais que devenir et je ne puis que dire. Vous êtes une belle intelligence de la bienheureuse éternité, un pur esprit, un esprit tout de lumière et de clarté, un esprit du pur amour, un grand prince de l’empyrée et l’un des grands rois du paradis ; et je ne suis que poussière et que cendre, qu’un chétif morceau de boue, qu’un misérable aveugle, qu’un très grand pécheur et le dernier de tous les pécheurs. Je reconnais en votre sainte présence, et je le veux dire devant tous les hommes et le donner au public, que je me vois non-seulement mériter la dernière place de la terre, mais la dernière place de l’enfer ; je me vois au-dessous de tous les démons et me reconnais pour la dernière créature de tout le monde.

Cependant vous voulez bien aimer une telle créature, vous voulez bien vous appliquer avec soin à tout ce qui la regarde, vous voulez bien l’assister dans tous ses besoins intérieurs et extérieurs, vous voulez bien la défendre contre tout ce qui lui est opposé, vous voulez bien la soutenir contre la puissance de l’enfer ; vous voulez bien, le conçoive qui pourra, l’accompagner inséparablement, lui tenir compagnie sans la quitter, et vous prenez plaisir à l’accabler de vos bienfaits, nonobstant tous ses mépris, toutes ses infidélités et toutes ses ingratitudes. Après l’amour de Jésus et Marie, qui a jamais ouï parler d’un tel amour ? Il faut bien dire que c’est l’amour incomparable en sa constance, en sa fidélité ; que c’est l’amour le plus désintéressé qui fut jamais ; l’amour le plus doux, le plus patient et le plus charitable ; l’amour le plus miséricordieux, le plus libéral, le plus fort et le plus généreux.

Grand prince, pourquoi m’aimez-vous de la sorte ? Pourquoi n’y a-t-il pas un seul moment de ma vie qui ne soit marqué de quelqu’un de vos bienfaits ? Ô mon âme ! Il t’est bien doux de penser à ces coups de miséricorde qu’a faits pour toi ce cher prince de ta vie ! Il t’est bien doux de te souvenir comme il t’a délivré de l’enfer, des grâces qu’il t’a obtenues, des secours indicibles qu’il t’a donnés en toutes sortes de choses, des soins amoureux qu’il a pris de tout ce qui regarde le temporel et le spirituel. Mon seigneur, que vous rendrai-je pour tous ces biens ? Ah ! Je vois bien qu’il m’est impossible de dignement reconnaître vos excessives faveurs. Quand je vous remercierais autant de fois que je respire, ce ne serait pas grand’chose ! Ô mon âme, que devenir donc ici ? Entrons dans les puissances du Seigneur, et prenons dans le cœur sacré de Jésus et de Marie une digne reconnaissance de tant de bontés. Quand nous aurions tout pensé et tout dit, ce ne serait pas assez ; quand nous aurions donné notre vie pour un prince si obligeant, nous ne pourrions pas lui satisfaire, ayant été remplis de toutes sortes de biens par sa faveur et délivrés de toutes sortes de maux.

Mais, aimable prince, les paroles donc me manquant et les forces, je veux vous parler par le précieux cœur de l’adorable Jésus et de sa très digne Mère. Hélas ! Je sais bien que je ne puis pas entendre les paroles ineffables de ces divins chœurs, mais au moins tout ce qu’ils vous diront à mon sujet, c’est tout ce que je veux vous dire. (à suivre... et à méditer)

Le Sacerdoce, par sainte Edith Stein

Bienheureuse la tête du prêtre
qui porte le signe de Dieu,
que le Seigneur a consacrée
par l’imposition des mains.

Bienheureuse la main du prêtre
qui dans la force du Dieu trine
transforme en citoyen du Ciel
un enfant de cette terre.

Bienheureuse la main du prêtre
qui consacre soldat du Christ
un enfant rené de l’Esprit
en traçant la croix sur son front.

Trois fois bienheureuse la main
qui touche le Corps du Seigneur,
délie le pécheur de ses chaînes,
et le mène au repas du Seigneur.

Bienheureux est le cœur du prêtre
que s’unit le cœur du Sauveur
et qui se choisit comme épouse
très pure la Sagesse éternelle.

Bienheureux est le pied du prêtre
qui suit les chemins du Sauveur
et guide vers l’éternelle paix
toutes les âmes fatiguées.

Une auréole de sept flammes
est la couronne de lumière
que le serviteur fidèle
reçoit dans la gloire éternelle.

Poème de sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix pour les Noces d’or sacerdotales (19 août 1926), extrait de « Malgré la nuit », Poésies complètes, édition bilingue, Ad Solem.

Demandez le dernier 'P'tit Quis' !

Le dernier bulletin de la Société Henri-Marie Boudon vient de paraître. Voici une petite sélection de textes de ce 20e numéro (hiver 2010).

Prière aux saints Anges

Les anges dans le ciel, et les hommes sur terre
De la création occupent le sommet :
Car la raison divine en eux mit sa lumière
De la splendeur d’en-haut ils portent le reflet.

Les anges, purs esprits, sont de plus noble essence,
Plus semblables à Dieu, car ils n’ont point de corps.
Ils furent tous créés dans l’état d’innocence :
Dieu les avait comblés des plus riches trésors.

Mais tous n’ont pas gardé l’innocence première :
Fidèles au Seigneur, les uns sont restés bons ;
Les autres, pleins d’orgueil et d’insolence altière
Révoltés contre Dieu, devinrent les démons.

Comme un lion rôdant autour de nous, le diable
Cherche à prendre notre âme, à lui ravir les cieux,
Parce qu’il est jaloux du bonheur ineffable
Promis par le Seigneur à l’homme vertueux.

Mais du Dieu tout-puissant la bonté maternelle
Près de chacun de nous a mis l’ange gardien
Qui dirige nos pas, nous couvre de son aile,
Nous garde de tout mal, nous porte vers le bien.


Florilège boudonien

Pieux sentiments sur la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ

Ô mon âme ! Donnons toute notre attention à l’adorable Jésus. Contemplons-le dans cet état douloureux où il souffre une extrême privation de toutes créatures, pour nous apprendre qu’il n’y a que Dieu seul à qui nous devions nous arrêter. Jésus est si peu aimé des hommes qu’on voit un peuple nombreux demander sa mort, et crier à haute voix : qu’il soit crucifié ! Les magistrats et le gouverneur le condamnent. Un roi le méprise avec dédain et le traite d’insensé. Le grand prêtre le déclare digne de mort. Ses propres disciples prennent la fuite et l’abandonnent. Le plus zélé d’entre eux le désavoue avec imprécation devant une malheureuse servante.

Ô mon aimable Sauveur ! Quelle part aviez-vous pour lors dans l’esprit et dans l’estime des créatures ? Après un exemple si touchant, oserions-nous encore désirer l’estime et l’affection des hommes ?

Allons, mon âme, quoi qu’il puisse nous en coûter, santé, vie, réputation, amis, allons sur le Calvaire avec notre adorable roi ; tenons-lui compagnie avec sa très-sainte Mère et le disciple bien-aimé. Allons et mourons avec lui. Mourons au point d’honneur, au désir des biens temporels, aux plaisirs des sens, à nos amis, à nos plus proches ; mourons à tout, afin que, ne vivant plus à nous même, ni pour eux-mêmes, nous ne vivions plus que de la vie de Jésus, vie cachée en Dieu et en Dieu seul.

In la SEMAINE RELIGIEUSE DU DIOCESE D’EVREUX

(samedi 24 mars 1888).

vendredi 5 février 2010

Anniversaire de la Libération d'Evreux

La cathédrale d'Evreux et le défenseur de la cité, le duc d'Aumale.

La cité d'Evreux célèbre aujourd'hui le 448e anniversaire de sa libération face au siège des Protestants. En effet, le 5 février 1562, le défenseur de la ville, Claude II de Lorraine-Guise, duc d'Aumale, sauvait les Ebroïciens de l'attaque des Huguenots, dirigés par le sinistre amiral de Coligny. Ceux-ci, ne pouvant faire fléchir la résistance ébroïcienne, s'en prirent aux faubourgs qu'ils ravagèrent, et 3 religieux reçurent ainsi la palme du martyre.

Le sanguinaire Gaspard de Coligny (1519-1572), qui assièga Evreux et martyrisa 3 de nos religieux.

Les Cordeliers Denis Dupont et Louis Le Grip, octogénaires, furent enterrés dans leur cloître après avoir respectivement eu les yeux crevés, la tête fendue et le corps roué de coup, et pour le second après qu'une balle lui eut traversé le cou. Un autre martyr, Robert Culvan, Jacobin cette fois, fut fusillé dans le cloître de son monastère.

Pour remercier Dieu de la libération de la cité, fut instituée une procession générale (la première des trois qui existent, avec celle du 12 août pour la Réduction de la Normandie, et celle du 15 août pour la fête nationale), qui traversait, après l'office de Tierce, les rues de la ville, "quae hac die liberata fuit ab obsidione haereticorum" (qui fut en ce jour libérée du siège des hérétiques). Cette procession existait toujours sous M. Boudon, et le Calendrier spirituel de l'abbé Delamare la décrit.
Sainte Agathe.

Un office solennel, celui de sainte Agathe (que l'on célèbre en ce même jour), fut fondé à la cathédrale par le chanoine Guillaume Foucault. Rappelons que sainte Agathe, vierge qui préserva toujours sa pureté, mourut martyre après s'être fait arraché les seins, et le Chef des Apôtres lui apparut pour les lui rendre miraculeusement. Elle avait ainsi invectivé son bourreau Quintien, préteur de Sicile : "Cruel tyran, n'as-tu pas honte d'enlever ainsi à une femme ce dont tu fus toi-même nourri chez ta mère ?". La couleur rouge de l'office de sainte Agathe rappelait à nos concitoyens le martyre de 3 de nos religieux par les hérétiques protestants, sang qui nous obtint sans nul doute de nombreuses grâces, ne serait-ce que celle d'être fidèle à la foi catholique et au roi de France.

Les armes du duc d'Aumale.

L'occasion pour nous de prier en remerciement pour l'âme de Claude d'Aumale, duc de Guise et baron d'Elbeuf, gendre de Louis de Brézé, grand-sénéchal de Normandie. Demandons également l'intercession de nos 3 martyrs pour la conversion de notre cité et son retour à la foi.

lundi 1 février 2010

Florilège boudonien

Nous commençons notre petit recueil de pensées boudoniennes... par la partie la plus importante de la vie du grand-archidiacre : sa persécution (1665-1674). Fervent opposant aux Jansénistes, l'abbé Boudon va souffrir à cause d'eux une dure persécution dès le retour de Rome de son évêque, Mgr de Maupas du Tour.



« Notre bon Prélat me décrie ici à Paris de tous côtés ; il faut le laisser faire, le bien honorer, en dire du bien, et demeurer en repos. Notre paix sera solide si nous la mettons dans la Croix, puisque c’est par le mystère de la Croix que toutes choses ont été pacifiées ; elle est, ma chère fille, notre unique espérance, comme le chante l’Église : il est doux d’y vivre, il est encore plus doux d’y mourir, et nous n’avons plus que faire au monde quand nous cessons de souffrir. Le Prélat fait ce qu’il peut pour m’obliger à quitter mon Bénéfice ; mais jamais je n’ai ressenti plus d’ardeur pour le conserver. La Croix ne nous doit pas faire quitter les lieux où nous la portons ; c’est bien au contraire : s’il y a quelque chose qui nous y doive arrêter, c’est la souffrance. J’espère de la très-sainte Mère de Dieu, et des saints Anges, et de nos Patrons, qu’on en verra en temps et lieu les fruits précieux. Je vous prie de faire dire 9 Messes à S. Michel, à commencer le 1er jour de Mars qui sera, à ce que je pense, le 1er Mardi de Carême, en l’honneur des saints Anges du Diocèse, et de celui qui garde le Prélat, et du mien. Je vous prie aussi d’aller, une fois la semaine, à saint Taurin, pour lui recommander l’affaire de mon Bénéfice ».

Lettre de M. Boudon (17 février 1666, au plus fort des persécutions) à Anne Lefèvre.

« O Dieu ! Quelle proposition me fait-on ! L’on me parle d’une pension, et l’on ne dit rien de l’intérêt de Dieu. Que je quitte le bénéfice, à la bonne heure, s’il y va de Sa gloire : mais qu’on le donne au plus digne, et quand il n’y aurait rien du tout à me donner pour pension. Si c’est un bénéfice où il y ait plus de coups de bâton à avoir, ou d’autres croix à souffrir, on y pourrait penser ».
M. Boudon, De la sainteté de l'état ecclésiastique

« M. de Maupas, après avoir consulté un grand nombre de savants, et ceux surtout qui étaient le plus au fait des matières bénéficiales, vit clairement qu’on le jetait dans un labyrinthe dont il aurait peine à sortir. Ainsi, malgré qu’il en eût, il laissa Boudon en place, bien résolu de le pousser si vivement qu’il l’obligerait enfin de lâcher le pied de lui-même et à quitter son poste. C’est ce qu’il fit avec tant de chaleur, que ceux qui surprirent sa confiance, mériteront à jamais l’indignation de tous les siècles ».
P. Pierre Collet, Vie de H.-M. Boudon