dimanche 28 février 2016

3e Dimanche de Carême : de l'importance vitale de la prière et de la révérence due à Dieu seul

Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « Dieu inconnu », chap. 4, Dieu inconnu en ce qu’il nous a manifesté des voies qui conduisent à sa bienheureuse possession


Nous apprenons encore de l’Evangile que l’oraison est l’un des moyens les plus efficaces pour arriver à la bienheureuse possession de Dieu.

C’est par l’oraison que nous obtenons les grâces qui nous sont nécessaires ; c’est ce que Notre Seigneur nous insinue par ces paroles : Demandez et l’on vous donnera, cherchez et vous trouverez.

Oh ! si les rois de la terre faisaient de telles promesses, quelle foule de peuples et quelle nombreuse multitude de personnes n’auraient-ils pas qui leur présenteraient des requêtes ! Avec toute la peine que l’on a d’en approcher et d’en avoir des audiences, leur cour ne se laisserait pas d’être pleine et de gens de la première condition qui s’estimeraient bienheureux si ces monarques souffraient qu’ils leur parlent.

Ah ! voici Celui devant qui tous les grands du monde ne sont que des riens à qui nous parlons quand nous voulons et aussi longtemps que nous voulons, et l’on est insensible à cet honneur ! On le prie peu, et souvent dans le peu de temps qu’on le prie on le prie mal !

Pierre marchant sur les eaux, par François Boucher
Voici des vérités inconcevables. Lorsqu’on lui adresse ses prières, c’est pour des affaires d’une conséquence infinie, c’est pour des couronnes éternelles, c’est pour être délivré d’un malheur qui n’a point de fin, c’est pour sa bienheureuse possession ; et néanmoins le fait-on avec une attention qui approche de celle que l’on donnerait à un chétif procès, pour quelque chose de temporel…

Quel soin ont les pères et les mères, les maîtres et les maîtresses de leurs enfants, de leurs domestiques, pour les faire prier une Majesté infinie, et avec le respect qui lui est dû ?

On ne leur donnera pas même des heures ou un chapelet pour les occuper dans le temps de la prière, et l’on se met peu en peine de la manière qu’ils se comportent dans les églises en sa présence suradorable !

Entendons-nous bien la prière que notre divin Maître nous a enseignée, par laquelle nous demandons à notre Père qui est dans les cieux, que son nom soit sanctifié, que son règne arrive, que sa volonté soit faite en la terre comme au ciel ; c’est-à-dire, que l’honneur qui lui est dû lui soit rendu, que sa religion et son service s’étendent partout, que l’idolâtrie, les hérésies, l’impiété et le péché cessent, que toutes les créatures soient assujetties à ses ordres, et toutes les volontés soumises à toutes ses conduites.




vendredi 26 février 2016

Quelques conseils spirituels

Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, Lettre 13 :

Il est bon que vous vous confessiez autant que vous le pourrez à votre confesseur ordinaire.

Il est bon que vous communiiez souvent mais en vérité, dans la dépendance entière de l’obéissance. Les saints Pères des déserts, qui ne communiaient point extérieurement par la réception du divin Sauveur, communiaient d’une manière admirable par leur union intime et parfaite à la divine volonté et l’entier anéantissement de leur propre volonté, et souvent ceux qui communient en recevant le sacrement ne sont pas dans la communion entière avec Notre Seigneur dans une union commune avec lui et cela par le règne de leur propre volonté.
O mon Dieu ! une âme vraiment unie à Dieu ne veut plus rien par elle-même, ainsi quand on lui dit de ne pas communier elle ne le fait pas, demeurant dans un profond repos. Oh que bienheureux ceux qui ne veulent plus rien !

Christ des douleurs, par Luis de Morales
Vous pourrez, dans votre retraite, prendre durant une demi-heure le matin et autant l’après-midi, quelque bon livre de méditations et y faire des réflexions et lire les réflexions que vous y aurez faites, si l’on vous interroge et les autres bonnes pensées que vous aurez les résolutions que vous prendrez.
Il est bon aussi de tâcher de vous souvenir de la vie et de la passion de notre bon Sauveur dans vos oraisons ordinaires, au moins de temps en temps. Il n’est pas nécessaire de beaucoup raisonner pour cela.

Ne faites point de pénitences et ne quittez point les soulagements que l’on a crus vous être nécessaires jusqu’à ce que je vous aie vue ; trois ou quatre mois ne doivent rien précipiter.

La vue douloureuse de vos péchés est une bonne oraison vous laissant dans la paix. Ne suivez point les mouvements que vous avez pour les pénitences corporelles. Quand saint Jean dit que celui qui est né de Dieu ne pèche point, il entend une personne qui agit par l’esprit de Dieu ; pour lors il ne pèche pas, mais cela n’empêche pas qu’il ne pèche quand il agit par l’esprit de nature et en suivant ses mauvaises inclinations, et en cela il est né de la chair et du vieil homme.



lundi 22 février 2016

Fête de la Chaire de Saint Pierre - prions pour le Pape

Sa Sainteté le Pape Benoît XVI,
Evêque émérite de Rome
De Sa Sainteté le Pape Benoît XVI, dernière audience générale, Place Saint-Pierre, le Mercredi 27 février 2013 

Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,
Autorités distinguées, 
Chers frères et sœurs !

Je vous remercie d’être venus si nombreux à ma dernière Audience générale. Merci de tout cœur ! Je suis véritablement ému et je vois l’Église vivante ! Et je pense que nous devons dire aussi merci au Créateur pour le beau temps qu’il nous donne maintenant encore dans l’hiver.

Comme l’apôtre Paul dans le texte biblique que nous avons écouté, moi aussi je sens dans mon cœur le devoir de remercier surtout Dieu, qui guide et fait grandir l’Église, qui sème sa Parole et ainsi alimente la foi de son Peuple. En ce moment, mon âme s’élargit et embrasse toute l’Église répandue dans le monde ; et je rends grâce à Dieu pour les « nouvelles » qu’en ces années de ministère pétrinien j’ai pu recevoir concernant la foi dans le Seigneur Jésus Christ, et la charité qui circule réellement dans le Corps de l’Église et le fait vivre dans l’amour, et dans l’espérance qui nous ouvre et nous oriente vers la vie en plénitude, vers la patrie du Ciel.

Je sens que je vous porte tous dans la prière, en un présent qui est celui de Dieu, où je rassemble chaque rencontre, chaque voyage, chaque visite pastorale. Je ramasse tout et tous dans la prière pour les confier au Seigneur : pour que nous ayons la pleine connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelle, et pour que nous puissions mener une vie digne de Lui, de son amour, en portant du fruit en toute œuvre bonne (cf. Col 1, 9-10).

En ce moment, il y a en moi une grande confiance, parce que je sais, nous savons tous, que la Parole de Vérité de l’Évangile est la force de l’Église, est sa vie. L’Évangile purifie et renouvelle, porte du fruit, partout où la communauté des croyants l’écoute et accueille la grâce de Dieu dans la vérité et dans la charité. Telle est ma confiance, telle est ma joie.

Le Pape émérite Benoit XVI en prière pour l'Eglise.
Quand, le 19 avril il y a presque 8 ans, j’ai accepté d’assumer le ministère pétrinien, j’ai eu la ferme certitude qui m’a toujours accompagné : cette certitude de la vie de l’Église par la Parole de Dieu. En ce moment, comme je l’ai déjà exprimé plusieurs fois, les paroles qui ont résonné dans mon cœur ont été : Seigneur, pourquoi me demandes-tu cela et que me demandes-tu ? C’est un poids grand celui que tu me poses sur les épaules, mais si tu me le demandes, sur ta parole, je jetterai les filets, sûr que tu me guideras, aussi avec toutes mes faiblesses.

Et huit années après, je peux dire que le Seigneur m’a vraiment guidé, m’a été proche, j’ai pu percevoir quotidiennement sa présence. Cela a été un bout de chemin de l’Église qui a eu des moments de joie et de lumière, mais aussi des moments pas faciles ; je me suis senti comme saint Pierre avec les Apôtres dans la barque sur le lac de Galilée : le Seigneur nous a donné beaucoup de jours de soleil et de brise légère, jours où la pêche a été abondante ; il y a eu aussi des moments où les eaux étaient agitées et le vent contraire, comme dans toute l’histoire de l’Église, et le Seigneur semblait dormir. Mais j’ai toujours su que dans cette barque, il y a le Seigneur et j’ai toujours su que la barque de l’Église n’est pas la mienne, n’est pas la nôtre, mais est la sienne. Et le Seigneur ne la laisse pas couler ; c’est Lui qui la conduit, certainement aussi à travers les hommes qu’il a choisis, parce qu’il l’a voulu ainsi. Cela a été et est une certitude, que rien ne peut troubler. Et c’est pour cela qu’aujourd’hui mon cœur est plein de reconnaissance envers Dieu parce qu’il n’a jamais fait manquer à toute l’Église et aussi à moi sa consolation, sa lumière, son amour.
Chaire de Saint Pierre, cathèdre de Vérité,
vitrail de la Basilique de Pontmain

Nous sommes dans l’Année de la Foi, que j’ai voulue pour raffermir vraiment notre foi en Dieu, dans un contexte qui semble la mettre toujours plus au second plan. Je voudrais vous inviter tous à renouveler votre ferme confiance dans le Seigneur, à nous confier comme des enfants dans les bras de Dieu, sûrs que ses bras nous soutiennent toujours et sont ce qui nous permet de marcher chaque jour, même dans la difficulté. Je voudrais que chacun se sente aimé de ce Dieu qui a donné son Fils pour nous, et qui nous a montré son amour sans limite. Je voudrais que chacun sente la joie d’être chrétien. Dans une belle prière à réciter quotidiennement le matin, on dit : « Je t’adore mon Dieu et je t’aime de tout mon cœur. Je te remercie de m’avoir créé, fait chrétien…». Oui, nous sommes heureux pour le don de la foi ; c’est le bien le plus précieux, que personne ne peut nous ôter ! Remercions le Seigneur de cela chaque jour, par la prière et par une vie chrétienne cohérente. Dieu nous aime, mais il attend que nous aussi nous l’aimions !

Mais ce n’est pas seulement Dieu que je veux remercier en ce moment. Un Pape n’est pas seul pour conduire la barque de Pierre, même si c’est sa première responsabilité. Je ne me suis jamais senti seul à porter la joie et le poids du ministère pétrinien ; le Seigneur a mis à mes côtés beaucoup de personnes qui, avec générosité et amour envers Dieu et envers l’Église m’ont aidé et m’ont été proches. Surtout vous, chers frères Cardinaux : votre sagesse, vos conseils, votre amitié ont été précieux pour moi ; mes collaborateurs, à commencer par mon Secrétaire d’État qui m’a accompagné avec fidélité durant ces années ; la Secrétairerie d’État et toute la Curie romaine, comme aussi tous ceux qui, dans les différents secteurs, prêtent leur service au Saint-Siège : ce sont de nombreux visages qui n’apparaissent pas, qui restent dans l’ombre, mais justement dans le silence, dans le dévouement quotidien, avec esprit de foi et humilité, ils ont été pour moi un soutien sûr et fiable. Une pensée spéciale à l’Église de Rome, mon diocèse ! Je ne peux oublier les frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce, les personnes consacrées et le Peuple de Dieu tout entier : dans les visites pastorales, dans les rencontres, dans les audiences les voyages, j’ai toujours perçu une grande attention et une profonde affection ; mais moi aussi je vous ai aimés tous et chacun, sans distinction, avec cette charité pastorale qui est le cœur de tout Pasteur, surtout de l’Évêque de Rome, du Successeur de l’apôtre Pierre. Chaque jour, j’ai porté chacun de vous dans la prière, avec le cœur d’un père.

Je voudrais que mon salut et mes remerciements parviennent ensuite à tous : le cœur d’un Pape s’élargit au monde entier. Et je voudrais exprimer ma gratitude au Corps diplomatique près le Saint-Siège, qui rend présente la grande famille des nations. Ici je pense aussi à tous ceux qui travaillent pour une bonne communication et que je remercie pour leur important service.

À ce point, je voudrais remercier aussi de grand cœur toutes les nombreuses personnes dans le monde entier, qui au cours des dernières semaines, m’ont envoyé des signes émouvants d’attention, d’amitié et de prière. Oui, le Pape n’est jamais seul, je l’expérimente à présent encore une fois d’une façon si grande qui touche le cœur. Le Pape appartient à tous et un très grand nombre de personnes se sentent très proches de lui. C’est vrai que je reçois des lettres des grands du monde – des chefs d’État, des responsables religieux, des représentants du monde de la culture, etc. Mais je reçois aussi énormément de lettres de personnes simples qui m’écrivent simplement avec leur cœur et me font sentir leur affection, qui naît du fait d’être ensemble avec le Christ Jésus, dans l’Église. Ces personnes ne m’écrivent pas comme on écrit par exemple à un prince, ou à un grand qu’on ne connaît pas. Elles m’écrivent comme des frères et des sœurs, ou comme des fils et des filles, avec le sens d’un lien familial très affectueux. Là on peut toucher du doigt ce qu’est l’Église – non pas une organisation, une association à des fins religieuses ou humanitaires, mais un corps vivant, une communion de frères et de sœurs dans le Corps de Jésus Christ, qui nous unit tous. Expérimenter l’Église de cette façon et pouvoir presque pouvoir toucher de la main la force de sa vérité et de son amour, est un motif de joie, en un temps où beaucoup parlent de son déclin. Mais nous voyons combien l’Église est vivante aujourd’hui !

Ces derniers mois, j’ai senti que mes forces étaient diminuées, et j’ai demandé à Dieu avec insistance, dans la prière, de m’éclairer de sa lumière pour me faire prendre la décision la plus juste non pour mon bien mais pour le bien de l’Église. J’ai fait ce pas en pleine conscience de sa gravité et aussi de sa nouveauté, mais avec une profonde sérénité d’âme. Aimer l’Église signifie aussi avoir le courage de faire des choix difficiles, douloureux, en ayant toujours à cœur le bien de l’Église et non soi-même.

Basilique vaticane Saint-Pierre de Rome, en la fête de
la Chaire de Saint Pierre, premier parmi les Apôtres.
Permettez-moi ici de revenir encore une fois au 19 avril 2005. La gravité de la décision a été vraiment aussi dans le fait qu’à partir de ce moment, j’étais engagé sans cesse et pour toujours envers le Seigneur. Toujours – celui qui assume le ministère pétrinien n’a plus aucune vie privée. Il appartient toujours et totalement à tous, à toute l’Église. La dimension privée est, pour ainsi dire, totalement enlevée à sa vie. J’ai pu expérimenter, et je l’expérimente précisément maintenant, qu’on reçoit la vie justement quand on la donne. J’ai dit précédemment que beaucoup de personnes qui aiment le Seigneur aiment aussi le Successeur de saint Pierre et ont de l’affection pour lui ; que le Pape a vraiment des frères et des sœurs, des fils et des filles dans le monde entier, et qu’il se sent en sureté dans l’étreinte de votre communion ; parce qu’il n’appartient plus à lui-même, il appartient à tous et tous lui appartiennent.

Le « toujours » est aussi un « pour toujours » ‑ il n’y a plus de retour dans le privé. Ma décision de renoncer à l’exercice actif du ministère, ne supprime pas cela. Je ne retourne pas à la vie privée, à une vie de voyages, de rencontres, de réceptions, de conférences, etc. Je n’abandonne pas la croix, mais je reste d’une façon nouvelle près du Seigneur crucifié. Je ne porte plus le pouvoir de la charge pour le gouvernement de l’Église, mais dans le service de la prière, je reste, pour ainsi dire, dans l’enceinte de saint Pierre. Saint Benoît, dont je porte le nom comme Pape, me sera d’un grand exemple en cela. Il nous a montré le chemin pour une vie qui, active ou passive, appartient totalement à l’œuvre de Dieu.

Saint Pierre et Saint Paul, Patrons de l'Eglise romaine
Je remercie aussi tous et chacun pour le respect et la compréhension avec lesquels vous avez accueilli cette décision si importante. Je continuerai à accompagner le chemin de l’Église par la prière et la réflexion, avec ce dévouement au Seigneur et à son Épouse que j’ai cherché à vivre jusqu’à aujourd’hui chaque jour et que je voudrais vivre toujours. Je vous demande de vous souvenir de moi devant Dieu et surtout de prier pour les cardinaux, appelés à une tâche si importante, et pour le nouveau Successeur de l’apôtre Pierre : que le Seigneur l’accompagne de sa lumière et de la force de son Esprit.

Invoquons la maternelle intercession de la Vierge Marie Mère de Dieu et de l’Église pour qu’elle accompagne chacun de nous et la communauté ecclésiale tout entière ; nous nous remettons à elle, avec une profonde confiance.

Chers amis ! Dieu guide son Église, la soutient toujours aussi et surtout dans les moments difficiles. Ne perdons jamais cette vision de foi, qui est l’unique vraie vision du chemin de l’Église et du monde. Dans notre cœur, dans le cœur de chacun de vous, qu’il y ait toujours la joyeuse certitude que le Seigneur est à nos côtés, qu’il ne nous abandonne pas, qu’il nous est proche et nous enveloppe de son amour. Merci !

Je vous salue cordialement chers pèlerins de langue française, en particulier les personnes venant de France, de Belgique et des pays francophones qui ont voulu m’accompagner en étant présentes ici ou par la radio et la télévision. Je vous demande de vous souvenir de moi devant Dieu et de prier pour les cardinaux appelés à élire un nouveau Successeur de l’apôtre Pierre. Priez aussi pour que le Seigneur l’accompagne de la lumière et de la force de son Esprit ! Que Dieu vous bénisse ! Merci.




dimanche 21 février 2016

2e Dimanche de Carême


Prière de Sainte Catherine de Sienne 


Ô Père éternel, faites miséricorde au monde, ne tardez plus, laissez-Vous fléchir, exaucez enfin le désir de Vos serviteurs.

Si on frappe à la porte, Votre charité ne doit pas, ne peut pas, refuser d’ouvrir à qui insiste avec persévérance. Ouvrez donc ! Élargissez, brisez les cœurs endurcis de Vos créatures. Voyez, ils sont là, à la porte de Votre vérité, et ils appellent ! 

Et que demandent-ils ? Le sang de votre Vérité, qui est elle-même la porte. Vous ne pouvez pas, Vous ne voulez pas refuser à qui Vous demande. C’est Vous le Bon Pasteur qui nous avez donné le Vrai Pasteur, votre Fils unique : sur Votre commandement, il a donné sa Vie pour nous et nous a lavés dans son Sang

Père éternel, Vous avez dit Vous même que, pour l’amour que Vous portez à vos créatures, Vous aurez égard aux prières de vos serviteurs, à leurs travaux, aux souffrances qu’ils endurent sans avoir péché. C’est ce qu’attendent vos serviteurs. 

Ne tardez donc plus à jeter sur nous le regard de Votre miséricorde ! Ouvrez la porte de Votre charité sans limite, cette Charité que Vous nous avez déjà donnée par votre Fils. En vérité, je sais que déjà Vous ouvrez avant même que nous frappions ! Ouvrez donc ! Pour la gloire et l’honneur de votre Nom, pour le salut des âmes. Amen



vendredi 19 février 2016

De la confession pascale et de la confession fréquente : Soyons miséricordieux avec nous-mêmes !

Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « Dieu inconnu »

L’enfer est plein de personnes qui y sont précipitées en suivant leur propre humeur. Elles sont tombées dans ce malheur infini parce qu’elles n’ont pas eu la force de se surmonter et peut être n’y en a-t-il pas une qui n’eût résisté à son inclination si elle avait prévu que, ne le faisant pas, il lui en serait arrivé quelque mal temporel considérable.

Jésus et la Smaritaine, par Angelika Kauffmann :
"Si tu savais le don de Dieu !"
Quelque emporté que l’on fût par la violence d’une passion, on y résisterait si l’on savait qu’il en dût coûter la vie : on sait qu’une damnation éternelle est préparée si on s’y laisse aller, on ne laisse pas de le faire. On dissimule, on se contraint par des vues temporelles, et on ne se veut pas faire la moindre violence pour l’éternité.

L’esprit est dans la peine, dans le trouble, par les mauvais succès des affaires de cette vie, dans les maladies du corps, et l’on rit, on se divertit dans l’état du péché mortel, on dort à l’aise pendant que l’on a un Dieu pour ennemi et que l’on est captif du diable !

Spada, le retour du fils prodigue
Une maladie arrive, on va aussitôt au médecin ; le péché règne, on passera un temps considérable sans approcher du sacrement de Pénitence ! Cependant si un soulier est crotté, on a soin de le faire nettoyer ; s’il tombait de la boue sur le visage au même instant, on prendrait soin de l’ôter sans le remettre, non pas à des mois ou des semaines, mais même à un quart d’heure.

Mais ce qui est capable de jeter dans le dernier étonnement, c’est que dans les maladies dangereuses, on diffère de se confesser jusqu’aux extrémités, comme s’il fallait attendre à se réconcilier avec un Dieu, à cesser d’être son ennemi, jusqu’à ce que l’on cesse de vivre…

Les vierges folles, inattentives, qui ont laissé s'éteindre leur lampe.
Ce jour-là, nous n'aurons plus que nos yeux pour pleurer,
car la porte sera pour toujours fermée !
O aveuglement dernier et inconcevable ! Vous verrez même des gens qui font profession de quelque probité, qui empêchent que l’on ne parle aux malades de recevoir les Sacrements ! On craint, disent-ils, d’épouvanter le malade comme si demander pardon à Dieu, si recevoir son sacré Corps, c’était quelque mal qui dût faire peur et l’on ne craint pas d’exposer une personne à une perdition éternelle !


Est-ce donc qu’il ne faut pas se mettre bien avec Dieu, lorsque la maladie n’est pas dangereuse ? Y a-t-il un instant dans la plus parfaite santé qui ne doive être rempli de son saint amour ?


jeudi 18 février 2016

Sainte Bernadette Soubirous, priez pour nous et pour la France !

Corps incorrompu de Sainte Bernadette,
chapelle des Soeurs à Nevers.
Marcelle Auclair, dans son livre Bernadette (1957) imagine ce testament spirituel écrit par la petite sainte de Lourdes qui nous apprend à aimer la Croix en ce saint temps du Carême.


J’ai peur, merci mon Dieu.


Pour la misère de père et mère, la ruine du moulin, le madrier de malheur, le vin de lassitude, les brebis galeuses, merci mon Dieu !

Le "cachot" où vécu la famille de sainte Bernadette.
Bouche de trop à nourrir que j’étais, pour les enfants mouchés, les brebis gardées, merci !

Merci, mon Dieu, pour le procureur, le commissaire, les gendarmes, et les mots durs de l’abbé Peyramale !
Pour les jours où Vous êtes venue, Notre-Dame Marie, pour ceux où je vous ai attendue, je ne saurais vous rendre grâce qu’en Paradis !
Mais pour la gifle de Mlle Pailhasson, les railleries, les outrages, pour ceux qui m’ont crue folle, pour ceux qui m’ont crue menteuse, pour ceux qui m’ont crue avide, merci Dame Marie !
Pour l’orthographe que je n’ai jamais sue, la mémoire des livres que je n’ai jamais eue, pour mon ignorance et ma sottise, merci !

Notre Dame de Lourdes, priez pour nous, les malades,
le pauvre peuple chrétien et notre pays
Merci ! Merci ! Car s’il y avait eu sur terre fille plus ignorante et plus sotte, c’est elle que vous auriez choisie…

Pour ma mère morte au loin, pour la peine que j’ai eue quand mon père au lieu de tendre les bras à sa petite Bernadette m’appela « Sœur Marie Bernard », merci Jésus !

Merci d’avoir abreuvé d’amertume ce cœur trop tendre que vous m’avez donné !
Pour Mère Joséphine qui m’a proclamé bonne à rien, merci !
Pour Mère Maîtresse, sa voix dure, sa sévérité, ses moqueries, et le pain d’humiliation, merci !

Merci d’avoir été celle à qui Mère Marie-Thérèse pouvait dire : « Vous n’en faites jamais d’autres ! »

L'hôpital.
Merci d’avoir été cette privilégiée des semonces dont mes Sœurs disaient : « Quelle chance de n’être pas Bernadette ! »

Merci pourtant d’avoir été Bernadette, menacée de prison parce qu’elle vous avait vue, regardée par les foules comme une bête curieuse, cette Bernadette si ordinaire qu’en la voyant on disait : « C’est ça » !

Pour ce corps piteux que Vous m’avez donné, cette maladie de feu et de fumée, ma chair pourrie, mes os cariés, mes sueurs, ma fièvre, mes douleurs sourdes ou aiguës, merci mon Dieu !


Et pour cette âme que Vous m’avez donnée, pour le désert des sécheresses intérieures, pour Votre nuit et vos éclairs, Vos silences et Vos foudres, pour tout, pour Vous absent ou présent, merci Jésus !

Apothéose de Sainte Bernadette entourée par les Anges, mosaïques de Lourdes.


mardi 16 février 2016

Le Carême, un temps pour porter du fruit pour la vie éternelle

Le figuier stérile. Porterons-nous du fruit ? Les paraboles du Seigneur sont des enseignements
précieux qu'il ne faut pas négliger.
De saint Augustin, Sermon 101

« Cent, ou soixante, ou trente pour un »

Le semeur est sorti pour semer...
L’ensemencement a été fait par les apôtres et les prophètes, mais c’est le Seigneur lui-même qui sème. C’est le Seigneur lui-même qui était présent en eux, du moment que c’est le Seigneur lui-même qui a moissonné. Car sans lui ils ne sont rien, alors que lui, sans eux, demeure dans sa perfection. Il leur dit en effet : « Hors de moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Semant donc chez les nations, que dit le Christ ? « Un semeur est sorti pour semer. » (Mt 13,3) Dans un autre texte des moissonneurs étaient envoyés à la moisson ; maintenant le semeur sort pour semer, et il ne plaint pas sa peine. Qu’importe, en effet, que du grain tombe sur le chemin, ou sur des pierres ou dans les épines ? S’il se laissait décourager par ces endroits ingrats, il n’avancerait pas jusqu’à la bonne terre ! ~

Il s’agit de nous : serons-nous ce chemin, ces pierres, ces ronces ? Voulons-nous être la bonne terre ? Disposons notre cœur à rapporter trente fois plus, soixante fois plus, cent fois, mille fois plus.

Trente fois, mille fois, c’est chaque fois du blé, et rien que du blé. Ne soyons plus ce chemin où la semence est piétinée par les passants et où notre ennemi s’en empare comme un oiseau.
Plus ces pierres où une terre peu profonde fait germer trop vite un grain qui ne peut pas affronter l’ardeur du soleil.
Jamais plus de ces ronces, les convoitises de ce monde, cette application à faire le mal.
Quoi de pire, en effet, que de donner tous ses efforts à une vie qui empêche de parvenir à la vie ? Quoi de plus malheureux que de choyer la vie pour perdre la vie ? Quoi de plus triste que de redouter la mort pour tomber au pouvoir de la mort ? 

Arrachons les épines, préparons le terrain, recevons la semence, tenons jusqu’à la moisson, aspirons à être reçus dans les greniers.


Icône de la parabole du bon grain et de l'ivraie. Le bon grain est engrangé dans les silos du Paradis. L'ivraie est jetée au feu.

dimanche 14 février 2016

1er dimanche de Carême, apprendre à faire silence pour écouter Dieu seul

Bienheureuse Mère Térésa de Calcutta
De la Bienheureuse Mère Térésa de Calcutta, fondatrice des Sœurs Missionnaires de la Charité

 « Jésus s'en alla dans la montagne pour prier,
et il passa la nuit à prier Dieu »

Les contemplatifs et les ascètes de tous les temps, de toutes les religions, ont toujours recherché Dieu dans le silence, la solitude des déserts, des forêts, des montagnes. Jésus lui-même a vécu quarante jours en parfaite solitude, passant de longues heures, cœur à cœur avec le Père, dans le silence de la nuit.

Jésus au désert, dans le silence, nous apprend que
nous devons cultiver la vie intérieure
Nous-mêmes sommes appelés à nous retirer par intermittences dans un plus profond silence, dans l'isolement avec Dieu. Être seul avec lui, non pas avec nos livres, nos pensées, nos souvenirs, mais dans un parfait dénuement ; demeurer en sa présence -silencieux, vide, immobile, dans l'attente.

Nous ne pouvons pas trouver Dieu dans le bruit, l'agitation. Vois la nature : les arbres, les fleurs, l'herbe des champs croissent en silence ; les étoiles, la lune, le soleil se meuvent en silence.
L'essentiel n'est pas ce que nous pouvons dire, mais ce que Dieu nous dit, et ce qu'il dit à d'autres à travers nous.

Dans le silence, il nous écoute ; dans le silence, il parle à nos âmes. Dans le silence, il nous est donné le privilège d'entendre sa voix :
Silence de nos yeux.
Silence de nos oreilles.
Silence de nos bouches.
Silence de nos esprits.
Dans le silence du cœur,
Dieu parlera.

Vanité des vanités, par Adriaen van Utrecht

samedi 13 février 2016

Samedi après les Cendres. Jeûner ? Sens et obligation pour celui qui aime Dieu

Le jeûne n'a de sens que si nous prions plus pour aimer plus.
N'est-ce pas cela être disciple de Jésus-Christ ?
Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « Dieu inconnu »

La corruption du siècle est si extrême que, dans le temps même qui est destiné entièrement à la pénitence comme celui du carême et des autres jours de jeûnes, on en viole impatiemment les plus saintes règles. Et l’aveuglement à ce sujet est si surprenant que l’on tombe dans ce dérèglement sans y faire réflexion, ce qui arrive fréquemment dans les maisons des riches où, très souvent, l’on excède les bornes dans les collations des jours de jeûnes sous prétexte que l’on ne mange que des mets dont on use au dessert.

Quel abus dans ces jours de mortification de voir les tables pleines de toutes sortes de fruits et de confitures, et de tout ce qui peut contenter plus délicieusement le goût. Mais si la pénitence est bien rare, l’humilité que le Fils de Dieu demande pour entrer dans le ciel l’est encore davantage, quoique notre Maître nous dise : « En vérité je vous dis que si vous ne vous convertissez, et ne devenez comme des enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux. »



De Sa Sainteté le Pape Paul VI, audience générale
du Mercredi 8 février 1978

Les temps qui se succèdent durant le cycle chronologique annuel ont toujours constitué pour l'Eglise une importante base normative: elle y distribue avec grande rigueur sa pédagogie tant spirituelle qu'ascétique. Le Carême qui, cette année, commence liturgiquement aujourd'hui est une période spéciale, un temps fort. II est nécessaire que nous prenions conscience de cette discipline traditionnelle de l'Eglise qui confère au calendrier une autorité particulière et attribue une signification spirituelle au temps qui passe. Un fidèle ne saurait être indifférent. ~

Le Carême est un temps de préparation sacramentelle. Au Sacrement du Baptême, d'abord, pour les néophytes. Pour les chrétiens déjà baptisés, il ne sera pas seulement un simple souvenir du premier et grand sacrement purificateur et régénérateur déjà reçu, mais il sera une rénovation psychologique et morale opérée par le baptême même, lequel comporte, avec l'acceptation de la foi, un style de vie conforme à celle-ci, en vertu du principe logique et mystique que "le juste vivra de la foi", selon la célèbre parole de Saint Paul (Rm 1, 17). C'est là une opération toujours en voie d'accomplissement et d'exercice. Puis, le Carême est orienté vers la réconciliation des pénitents. Toute la doctrine concernant le péché commis après le baptême a ici son école et tout autant son ineffable conclusion qui se concentre dans la paix de l'âme, rendue à l'amitié de Dieu grâce au sacrement de la pénitence. La préparation quadragésimale se couronne ainsi, prédisposant aux pâques, lorsque le sacrifice eucharistique admettra le fidèle à la communion avec le Christ lui-même "notre pâque immolée pour nous" (1 Co5, 7).

Basilique Saint-Apollinaire, Rome.
Mosaïques de la Croix glorieuse et de la Sainte Face
Et autour de ces Sacrements, la vie des fidèles s'exerce et se transforme. Elle se caractérise par une accentuation de sentiment religieux, d'ascèse, de charité. L'écoute de la Parole divine se fait plus attentive, plus assidue; et si, aujourd'hui, les foules chrétiennes sont moins portées à suivre les prédications régulières de Carême, tout chrétien réfléchi devrait trouver le moyen et le temps pour participer au moins à une préparation pascale prêchée par quelque groupe particulier, étant donné que cette forme de prédication s'est, par bonheur, tellement diffusée et qu'elle est devenue d'accès très facile. Et ainsi la lampe de la prière — devenue instinctivement, ou plutôt par une mystérieuse rencontre avec l'Esprit, présente dans l'âme — se rallumera et conférera, sa propre lumière à un climat quadragésimal où règnent en même temps la tristesse et la joie.

Quant à l'obligation du jeûne et de l'abstinence pendant le Carême, qu'en reste-t-il aujourd'hui ? jadis si importante, si sévère et, pour ainsi dire, devenue si rituelle, n'en subsisterait-il plus rien aujourd'hui ? A part les deux journées de jeûne qui s'imposent encore aux vertueux (le mercredi des cendres, aujourd'hui donc, et le Vendredi-Saint "la grande et amère journée"), l'obligation formelle des temps passés a été abrogée par l'Eglise, toujours sensible aux nouvelles conditions et exigences des mœurs modernes, mais pour les esprits vigoureux et fidèles, ce qui en reste est d'autant plus digne de notre vigilante mémoire. Cela se ramène au double devoir qui accompagnait déjà le jeûne d'autrefois: austérité personnelle, dans la nourriture, dans les distractions, dans le travail... et charité à l'égard du prochain, de celui qui souffre, qui a besoin d'aide, de celui qui attend notre secours ou notre pardon...

Tout ceci subsiste, comme subsiste aussi l'obligation de l'abstinence chaque vendredi du Carême. Et même il s'impose que ce programme changé, mais pas toujours facile, obtienne spontanément notre adhésion et nos efforts d'austérité. C'est l'austérité seule qui rend authentique et forte notre vie chrétienne.

Que l'austérité soit, contre la mollesse aujourd'hui à la mode, l'exercice sans ostentation (cf. Mt 6, 1 et ss), mais sincère et fortifiant, de notre pénitence chrétienne !

Avec notre bénédiction apostolique.

Paul VI, pp.