vendredi 30 avril 2021

De l'amour fou de Dieu pour nous


Du Cardinal Journet

D’emblée, Dieu a aimé la race humaine d’un amour fou, jusqu’à vouloir se donner lui-même à elle dans la vision du Ciel.

L’offense du premier acte humain méprisant un tel amour est terrifiante.

Pourra-t-elle jamais être compensée ?

Puisque Dieu ne peut nous contraindre à l’aimer, puisqu’il accepte de jouer avec nous le jeu si périlleux de notre libre arbitre et de notre libre amour donné ou refusé, il faudrait que d’un cœur humain, non touché par nos déchéances - mais ayant expérimenté notre détresse et souffert en sa chair, qui est la nôtre, la tragédie de notre péché - monte pour nous vers le Ciel un acte de libre et infaillible amour d’une telle intensité qu’il surcompense infiniment la première offense : il faudra qu’un Dieu se fasse homme.

S’il n’avait pas songé à cette seconde folie de son amour.

Dieu n’aurait pas permis la première offense, il n’aurait même pas créé le genre humain et tout l’univers des choses visibles.


jeudi 29 avril 2021

Sainte Catherine de Sienne

 

Sainte Catherine de Sienne, épouse du Christ, par Giovanni di Paolo

Se trouvant à Pise, un dimanche, après avoir reçu la nourriture céleste, elle fut ravie en extase, et vit le Seigneur crucifie qui venait à elle environne d'une grande lumière. Cinq rayons partaient des cicatrices de ses plaies: ils se dirigèrent sur cinq endroits du corps de Catherine. Elle comprit le mystère; mais elle pria le Seigneur que les stigmates ne parussent pas. Aussitôt les rayons changèrent leur couleur de sang en une autre très éclatante, et sous la forme d'une lumière très pure ils atteignirent ses mains, ses pieds et son cœur. La douleur qu'elle éprouva des plaies qu'ils lui laissèrent était si poignante, qu'elle pensa que si Dieu ne l’eût modérée, elle devait promptement succomber.

Le Seigneur plein d'amour pour son épouse lui accorda cette nouvelle grâce, que tout en ressentant la douleur des plaies, les marques sanglantes ne fussent pas visibles. La servante de Dieu rendit compte de ce phénomène à Raymond de Capoue son confesseur : ce qui a été cause que la piété des fidèles voulant représenter ce miracle, a eu soin de peindre sur les images de sainte Catherine des rayons lumineux partant des cinq parties stigmatisées de son corps.

Aussi le démon l'assaillait à tout instant : il voyait en cette jeune fille un adversaire des plus redoutables. Elle eut raison de tous ces assauts. Ses veilles, ses jeûnes et toutes ses pratiques de pénitence surpassaient ce que peuvent les forces humaines.

Catherine ne pensait qu'à se dérober aux regards du monde, lorsque Notre Seigneur lui ordonna de s'occuper activement du salut des âmes :

" Il ne l'a fait monter si haut que pour lui donner cette mission étonnante pour une humble femme, de travailler à la paix de l'Église."

Sa science était infuse et non acquise. Des professeurs en théologie lui proposèrent les plus difficiles questions sur la théologie; elle sut y satisfaire. Personne n'approcha d'elle qu'il n'en devînt meilleur ; elle étouffa beaucoup de haines, et fit cesser plusieurs inimitiés mortelles.

Elle se rendit à Avignon auprès du pape Grégoire XI, pour obtenir la paix des Florentins qui étaient en différend avec l’Eglise, et qui pour ce sujet avaient été frappés d'interdit. Elle fit connaître à ce pape qu'elle savait par révélation le vœu qu'il avait fait de se rendre à Rome, et qui n'était connu que de Dieu seul. Ce fut à sa persuasion que le Pontife se résolut à revenir en personne s'asseoir sur son siège : ce qu'il accomplit enfin en janvier 1377. Elle fut tellement considérée de Grégoire et d'Urbain VI, son successeur, qu'ils l'employèrent en diverses ambassades.

Son successeur Urbain VI invitera Catherine à Rome où elle décédera le 29 avril 1380, victime de son zèle et consumée par les flammes du divin amour, à l'âge de trente-trois ans, dans sa petite maison de la via del Papa, non loin de l'église de la Minerve (Santa Maria sopra Minerva) où elle sera enterrée.


dimanche 25 avril 2021

Dimanche du Bon Pasteur, prions pour les vocations et pour les prêtres


De Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de la Sainte Face, ocd., Manuscrit A, folio 56 rv

La seconde expérience que j'ai faite regarde les prêtres. N'ayant jamais vécu dans leur intimité, je ne pouvais comprendre le but principal de la réforme du Carmel. Prier pour les pécheurs me ravissait, mais prier pour les âmes des prêtres, que je croyais plus pures que le cristal, me semblait étonnant !... Ah ! j'ai compris ma vocation en Italie, ce n'était pas aller chercher trop loin une si utile connaissance...

Pendant un mois j'ai vécu avec beaucoup de saints prêtres et j'ai vu que, si leur sublime dignité les élève au-dessus des anges, ils n'en sont pas moins des hommes faibles et fragiles... Si de saints prêtres que Jésus appelle dans son Evangile "Le sel de la terre" montrent dans leur conduite qu'ils ont un extrême besoin de prières, que faut-il dire de ceux qui sont tièdes ? Jésus n'a-t-Il pas dit encore : "Si le sel vient à s'affadir, avec quoi l'assaisonnera-t-on ?"

O ma Mère ! qu'elle est belle la vocation ayant pour but de conserver le sel destiné aux âmes ! Cette vocation est celle du Carmel, puisque l'unique fin de nos prières et de nos sacrifices est d'être l'apôtre des apôtres, priant pour eux pendant qu'ils évangélisent les âmes par leurs paroles et surtout par leurs exemples...

Il faut que je m'arrête, si je continuais de parler sur ce sujet je ne finirais pas !...



vendredi 23 avril 2021

Prions pour l'Eglise en ces temps difficiles et pour la liberté de tous les Chrétiens à vivre leur foi à la suite du divin Maître

Le vénérable Pape Pie XII célébrant la sainte Messe

Prière du Pape Pie XII pour l’Eglise persécutée

Du fond de cette terre de larmes, où l’humanité souffrante se traîne péniblement, dans les remous d’une mer sans cesse agitée par le vent des passions, nous levons les yeux vers Vous, ô Marie, Mère très aimée, pour puiser du réconfort dans la contemplation de Votre gloire et pour Vous saluer Reine et Maîtresse des cieux et de la terre, Notre Reine et Notre Dame.

Votre Royauté, nous voulons L’exalter avec une légitime fierté de fils et La reconnaître comme due à la suprême excellence de tout Votre être, ô très douce et vraie Mère de Celui qui est Roi par droit propre, par héritage, par conquête.

Régnez, ô Notre Reine et Notre Dame, nous montrant le chemin de la sainteté, nous dirigeant et nous assistant, afin que nous ne nous en éloignions jamais. Au plus haut des cieux, Vous exercez votre Royauté sur les chœurs des anges qui Vous acclament comme leur Souveraine, sur les légions des saints qui se réjouissent dans la contemplation de Votre éclatante beauté; régnez donc aussi sur le genre humain tout entier, surtout en ouvrant le chemin de la foi à ceux qui ne connaissent pas encore Votre divin Fils.

Régnez sur l’Église qui professe et fête Votre suave domination et qui recourt à Vous comme à un sûr refuge au milieu des calamités de notre temps.

Mais régnez spécialement sur cette portion de l’Église qui est persécutée et opprimée, lui donnant la force pour supporter les adversités, la constance pour ne pas plier sous les injustes pressions, la lumière pour ne pas tomber dans les embûches de l’ennemi, la fermeté pour résister aux attaques ouvertes, et, à chaque instant, une inébranlable fidélité à Votre royaume.

Régnez sur les intelligences, afin qu’elles ne recherchent que la vérité; sur les volontés, afin qu’elles ne suivent que le bien; sur les cœurs, afin qu’ils aiment uniquement ce que Vous aimez Vous-même.

Régnez sur les individus et sur les familles, comme sur les sociétés et les nations; sur les assemblées des puissants, sur les conseils des sages, comme sur les aspirations des humbles.

Régnez sur les routes et sur les places publiques, dans les cités et les villages, dans les vallées et les montagnes, dans les airs, sur terre et sur mer; et accueillez la prière de ceux qui savent que Votre royaume est un royaume de miséricorde, où toute supplication est entendue, toute douleur réconfortée, toute infortune soulagée, toute infirmité guérie et où, comme sur un signe de Vos très douces mains, la vie renaît souriante de la mort elle-même.

Accordez-nous que ceux qui maintenant, dans toutes les parties du monde, Vous acclament et Vous reconnaissent Reine et Maîtresse puissent jouir un jour au ciel de la plénitude de Votre royaume, dans la vision de Votre divin Fils, qui vit et règne, avec le Père et le Saint-Esprit, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il !

mercredi 21 avril 2021

Vivre à la suite du Christ

Vie nouvelle de Henri-Marie Boudon, par S.Exc.R. Mgr Matthieu, Archevêque de Besançon

Depuis huit ans que durait son épreuve on ne l’avait pas vu dévier un instant de cette perfection à laquelle il n’est donné qu’aux saints d’arriver.

La sainteté de sa conduite, la pureté de sa vie, avaient toujours été dans l’opposition la plus marquée avec les calomnies dont on l’avait noirci et, en continuant à le persécuter, il fallait convenir que cet homme à qui on reprochait tant d’hypocrisie dans son extérieur et de perversité dans ses mœurs cachait constamment ses crimes sous les apparences d’une vertu plutôt angélique qu’humaine.



dimanche 18 avril 2021

Alléluia !


Saint Augustin,
Sermon 256 pour les fêtes de Pâques 

« Lève-toi et marche » (Mt 9, 1-8)

« Si l'Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité le Christ Jésus vivifiera aussi vos corps mortels. » (Rm 8,11) Maintenant c'est un corps humain naturel ; alors ce sera un corps spirituel. « Car le premier homme, Adam, était un être humain qui avait reçu la vie, mais le dernier Adam, le Christ, est devenu l'être spirituel qui donne la vie » (1Co 15,45). Voilà pourquoi « il rendra la vie à vos corps mortels, à cause de l'Esprit qui habite en vous ».

Oh ! quel heureux alléluia nous chanterons alors ! Quelle sécurité ! Plus d'adversaire, plus d'ennemi ; nous ne perdrons aucun ami. Ici-bas nous chantons les louanges de Dieu au milieu de nos soucis ; au ciel, nous les chanterons dans une parfaite tranquillité. Nous les chantons ici-bas comme devant mourir ; au ciel, ce sera dans une vie qui ne finit pas. Ici-bas, dans l'espérance ; au ciel, dans la réalité. Ici-bas nous sommes voyageurs ; alors nous serons dans notre patrie. Chantons donc dès maintenant, frères, non pour savourer le repos mais pour alléger notre travail. Chantons comme le font les voyageurs. Chante, mais sans cesser de marcher ; chante pour te réconforter au milieu des fatigues... Chante et marche !

Qu'est-ce à dire, marche ? Va de l'avant ; fais des progrès dans le bien... Va de l'avant en marchant vers le bien ; avance dans la foi et dans la pureté des mœurs. Chante et marche ! Ne t'égare pas ; ne retourne pas en arrière ; ne reste pas sur place. Tournons-nous vers le Seigneur.

Emmaüs, par Tomas Cremades Moreno

jeudi 15 avril 2021

Pâques ou la vie nouvelle offerte


D'une homélie ancienne

La Pâque célébrée par les Juifs symbolisait le salut de leurs premiers-nés. Mais celle que nous célébrons est la cause du salut de tous les hommes, en commençant par le premier homme créé qui est sauvé et vivifié en eux tous.

Les réalités partielles et provisoires, images et figures des réalités parfaites et éternelles, préludaient, ainsi que des esquisses, à la Vérité qui s'est maintenant levée à l'horizon; mais quand la Vérité est présente, la figure est périmée: c'est ainsi qu'après l'arrivée d'un roi, personne ne juge convenable de délaisser le roi vivant pour se prosterner devant son image.

Il est donc bien évident que la figure est inférieure à la Vérité, quand la figure fête la vie éphémère des premiers-nés des Juifs, tandis que la Vérité fête la vie permanente de tous les hommes. Car ce n'est pas grand-chose d'échapper à la mort pour un temps bref quand on mourra peu après, mais c'est une grande chose que d'échapper totalement à la mort ; c'est ce qui nous arrive, puisque le Christ, notre Agneau pascal, a été immolé.

Le nom même de la fête prend toute son excellence si on le traduit en l'appliquant à la vérité. « Pâque », en effet, se traduit par « passage », puisque l'Exterminateur qui frappait les premiers-nés « passait » les maisons des Hébreux. Mais ce « passage » de l'Exterminateur, c'est chez nous qu'il est véritable, lorsque, une fois pour toutes, il « passe par-dessus » nous, qui avons été ressuscités par le Christ pour la vie éternelle. ~ Qu'est-ce que signifie, si on la considère par rapport à la Vérité, cette prescription de prendre pour commencement de l'année ce moment où s'accomplissent la Pâque et le salut des premiers-nés ? Cela signifie que, pour nous aussi, le commencement de la vie éternelle, c'est le sacrifice de l'Agneau pascal. En effet, l'année symbolise l'éternité, parce qu'elle revient toujours en cercle sur elle-même, et ne s'arrête à aucun terme. Et le Christ, offert en victime pour notre salut, est le Père de l'éternité à venir. C'est-à-dire que, rendant périmée toute notre vie antérieure, il nous donne le commencement d'une autre vie par le bain de la nouvelle naissance, à la ressemblance de sa mort et de sa résurrection.

En conséquence, tout homme qui connaît l'Agneau pascal immolé pour son salut doit considérer que pour lui le commencement de la vie, c'est le moment à partir duquel le Christ est immolé pour lui. Or le Christ est immolé pour lui lorsque lui-même reconnaît la grâce et comprend la vie procurée par cette immolation. Sachant cela, qu'il aspire à prendre le commencement de cette vie nouvelle et ne retourne plus vers l'ancienne, dont il atteint le terme. Car il est écrit : Nous qui sommes morts au péché, comment continuerions-nous de vivre en lui ?



mardi 13 avril 2021

Divine miséricorde

Prière du Chartreux Ludolphe le Saxon

Ma vie m’épouvante ; car si je l’examine soigneusement, elle me paraît ou coupable et criminelle, ou stérile et infructueuse ; et si quelque fruit s’y montre de temps en temps, il n’est qu’apparent, imparfait ou corrompu de quelque manière.

Pécheur que je suis ! Que me reste-t-il donc à faire, si ce n’est de pleurer sans cesse toute ma vie ?

Seigneur, je suis sûr que mes péchés méritent la damnation éternelle, je suis plus sûr encore que ma pénitence n’est pas suffisante pour Te rendre une satisfaction convenable, mais aussi je suis très-assuré que ta Miséricorde est supérieure à toute offense.

Fais-moi donc Miséricorde, et pour mes péchés accordes-moi le pardon que j’espère, non pas de mes mérites, mais de ton Indulgence, Seigneur mon Dieu. Ainsi soit-il



dimanche 11 avril 2021

Dimanche de la Miséricorde divine


Prière de Saint Grégoire de Narek

Il fut un temps où je n'étais pas, et Tu m'as créé. Je n'avais pas prié, et Toi, Tu m'as fait. Je n'étais pas encore venu à la lumière, et Tu m'as vu. Je n'avais pas paru, et Tu as eu pitié de moi. Je ne T'avais pas invoqué, et Tu as pris soin de moi. Je n'avais pas fait un signe de la main, et Tu m'as regardé. Je n'avais pas supplié, et Tu m'as fait Miséricorde. Je n'avais pas articulé un son, et Tu m'as entendu. Je n'avais pas soupiré, et Tu as prêté l'oreille. Tout en sachant ce qui allait m'arriver actuellement, Tu ne m'as pas dédaigné.

Ayant considéré avec tes Yeux prévoyants les fautes du pécheur que je suis, Tu m'as cependant façonné. Et maintenant, moi que Tu as créé, moi que Tu as sauvé, moi qui ai été l'objet de tant de sollicitude, que la blessure du péché, suscité par l'Accusateur, ne me perde pas pour toujours !

Liée, paralysée, courbée comme la femme qui souffrait, mon âme malheureuse reste impuissante à se redresser. Elle fixe la terre sous le poids du péché, à cause des durs liens de Satan. Penche-Toi vers moi, seul Miséricordieux, pauvre arbre pensant qui est tombé. Moi qui suis desséché, fais-moi refleurir en beauté et splendeur, selon les Paroles divines du saint prophète (Ez 17, 22-24). Toi, seul Protecteur, veuille jeter sur moi un regard sorti de la sollicitude de ton Amour indicible et de rien Tu créeras en moi la Lumière même (cf Gn 1 ,3). Amen.



vendredi 9 avril 2021

Renés de l'eau et de l'Esprit Saint


Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « L’homme de Dieu », partie I, chap.12

La nuit est passée, ses obscurités étant dissipées par les clartés de cette brillante étoile. Le jour est avancé par ses rayons lumineux.

Laissons donc les œuvres de ténèbres à la vue des actions de cet enfant de lumière. Mourons à toutes choses avec lui par le dépouillement du vieil homme, pour nous revêtir avec lui de notre Seigneur Jésus Christ et ne plus vivre que de sa vie. Comme nous l’avons vu enseveli avec notre adorable Sauveur, mourant avec lui, considérons-le en notre seconde partie marchant dans une nouvelle vie. Jésus vivant uniquement en lui.

mercredi 7 avril 2021

Séquence pascale d'Adam de Saint-Victor

Chassons le vieux levain, et célébrons d’un cœur sincère la nouvelle résurrection ; c’est le jour de notre espérance, le jour dont la Loi tout entière célèbre la puissance.

C’est le jour qui dépouilla l’Égypte, et qui délivra les Hébreux des fers de la captivité. Foulés par leurs ennemis, ils ne connaissaient que le labeur de l’esclavage, l’argile, la brique et le chaume.

Que maintenant notre voix fasse éclater librement la louange du divin exploit, qu’elle célèbre la victoire, qu’elle chante notre salut ; car voici le jour qu’a fait le Seigneur, jour qui met fin à nos douleurs, jour qui apporte la délivrance.

La Loi fut l’ombre des choses à venir ; le Christ qui vient tout accomplir est la fin des promesses. Son sang a fait disparaître le gardien qui nous interdisait le passage ; ce sang a émoussé le glaive de feu. L’enfant Isaac, dont le nom signifie sourire, et en place duquel la brebis est immolée, figure d’avance le joyeux mystère qui rend la vie. Joseph sortant de la citerne où on l’avait précipité, c’est le Christ qui remonte du tombeau, après le supplice et la mort. Il est ce serpent qui dévore les serpents de Pharaon ; la malice du dragon n’a sur lui aucun pouvoir. Sous le type du serpent d’airain, il guérit les blessures du reptile enflammé. L’hameçon qu’il présente au monstre a déchiré sa gueule avide ; l’enfant a mis, sans offense, sa main dans le trou du serpent ; et cet antique ennemi du monde est réduit à fuir confondu. Les insulteurs d’Élisée, lorsqu’il montait à la maison de Dieu, ont ressenti le courroux de celui qu’ils appelaient le chauve ; David s’échappe des mains de son ennemi ; le bouc émissaire s’est élancé dans sa course et le passereau a pris son vol. Samson immole mille ennemis avec un os aride ; il dédaigne de prendre une épouse dans sa nation ; il force les portes de Gaza ; et libre, il va les déposer sur la cime de la montagne.

Ainsi le fort Lion de Juda brise les portes de la cruelle mort et ressuscite le troisième jour. Il s’éveille à la voix de son Père, et monte, chargé de dépouilles, à la patrie céleste. Après trois jours de captivité dans ses flancs, le monstre marin vomit plein de vie le fugitif Jonas, figure du Jonas véritable. La grappe de Cypre refleurit : elle se dilate, elle mûrit ; la synagogue voit se faner sa fleur, et l’Église épanouit sa corolle. La mort et la vie sont entrées en champ clos ; le Christ est sorti du tombeau, et avec lui de nombreux témoins de sa gloire.

Nouveau matin, matin joyeux, qui essuie les pleurs du soir. La vie a vaincu le trépas : c’est le temps de se réjouir.

Jésus vainqueur, Jésus notre vie, Jésus, voie désormais facile de l’immortalité : toi dont la mort a fait périr la mort, dans ta bonté, fais-nous asseoir à la table pascale. Pain de vie, eau vive, vigne véritable et féconde, nourris-nous, purifie-nous : et par ta grâce, sauve-nous de la seconde mort. Amen. Alléluia.


lundi 5 avril 2021

Lundi de Pâques, lundi de l'Ange


De Saint Théophane le reclus

Lorsque l'ange annonça la bonne nouvelle de l'incarnation du Seigneur, il dit : "Réjouis-toi, toi à qui une grâce a été faite !" (Luc 1,28) ; proclamant aux bergers la naissance du Christ Sauveur, il a également dit : "Voici, je vous annonce une grande joie" (Luc 2,10).

Mais proclamant la résurrection du Seigneur pour les femmes, l'ange dit seulement : "Il n'est pas ici, mais Il est ressuscité !" (Luc 24,6).

Il n'ajoute pas "Réjouissez-vous", car la joie devait d'elle-même remplir leur cœur, dès que l'assurance est venue que le Seigneur était vraiment ressuscité. A cette époque, cette assurance a été tangible : l'ange l'a préparée ; le Seigneur dans Son apparition l'a complétée. Et la joie de tout le monde était inépuisablement complète !

Maintenant, notre église, les maisons et les rues sont revêtues de vêtements de fête, et tout le monde est pris dans un courant général de joie. Maintenant, tourne tes pensées loin des choses extérieures, et les rassemblant dans ton cœur, exulte dans la vérité de la résurrection, dans toute sa largeur, profondeur et hauteur, de sorte que ta joie soit plus qu'extérieure seulement. Confirme cet esprit de joie, comme une source d'eau lumineuse, jaillissant des profondeurs de la terre.


dimanche 4 avril 2021

Pâques. Vivons en ressuscités à la suite du Christ



Le Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité ! Alléluia. 

Par sa mort Il a détruit la mort. Par sa Résurrection Il nous donne la vie. Alléluia.


Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « L’homme de Dieu », part. I, chap.1

Si nous sommes ensevelis dans le tombeau avec notre Chef nous en sortons avec lui par une glorieuse résurrection à une vie toute céleste et toute divine. C’est pour cela que nous soupirons, désirant d’être revêtus de notre domicile qui est du ciel. Toutes les sources de cette vie viennent d’en haut, toutes y tendent, toutes y rencontrent, tous les mouvements en sont divins, toutes les actions conduisent et aspirent au ciel.

L’homme de Dieu est par esprit dans les cieux ; c’est là qu’il s’entretient par l’oraison avec Dieu qui est son père et avec les anges et les saints, car nous ne sommes plus étrangers mais citoyens avec les saints et domestiques de Dieu.

Soit donc que l’homme de Dieu vive, soit qu’il meure, ce n’est plus pour lui c’est pour Dieu seul qu’il désire de vivre, c’est pour Dieu seul qu’il veut mourir comme il est mort à soi-même ; n’ayant plus de vie, il ne voit et ne se soucie plus du propre intérêt, comme il est mort au monde il n’aime plus le monde ni les choses du monde. C’est le propre des morts de n'avoir plus de commerce avec ceux qui vivent en la terre, ils emportent une séparation parfaite qui rompt les unions les plus parfaites : ainsi un père mort n’a plus aucun commerce avec ses enfants, une femme avec son mari, les amis les plus intimes avec ceux avec qui ils sont plus liés d’amitié.

Jésus Christ est tout en toutes choses et c’est en lui que l’on fait une nouvelle créature, que l’on a des pensées nouvelles, de nouveaux désirs, de nouvelles affections. Dans cet état de vie ressuscitée, la terre ne parait qu’un lieu d’obscurités et de ténèbres, toutes ses grandeurs des bassesses, toutes ses richesses et tout ce qui s’y passe avec plus de pompe et d’éclat qu’une pure illusion et comme un songe. L’on voit qu’il n’y a rien du tout dans le monde qui ait aucune proportion avec la dignité que l’on possède dans cette nouvelle vie : c’est pourquoi les saints l’ont méprisé si généreusement, le regardant comme indigne de leur grâce et de leur qualité de chrétien.

Dalle mortuaire du tombeau du Christ.
Anastasis, Saint-Sépulcre à Jérusalem
Ces paroles donc qui semblent si dures et que si peu de personnes veulent entendre : ‘‘il faut renoncer à soi-même, il faut haïr sa vie, il faut mourir à toutes choses’’, deviennent bien douces si l’on en considère les effets. Il faut se souvenir que la grâce ne nous a pas communiqué la mort de Jésus Christ pour nous laisser morts, elle ne nous fait mourir que pour nous redonner une vie incomparablement plus parfaite que celle que nous avions.

Ce serait la dernière des tromperies de s’imaginer qu’on puisse perdre quelque chose avec Dieu qui, dans l’excès de sa bonté, nous redonne avec usure ce que nous quittons pour l’amour de lui. Nous lui sacrifions la vie du vieil Adam qui est une vie de corruption toute pleine de maux et de misères et il nous donne la vie du nouvel homme en Jésus Christ qui est une vie de grâce, de sainteté et toute remplie des biens du ciel.

Si nous nous dépouillons du vieil homme, c’est pour être revêtus du nouveau ; enfin si nous méprisons le temps, c’est pour l’éternité ; si l’on quitte la terre, c’est pour le ciel ; si l’on renonce à la créature, c’est pour avoir un Dieu.



samedi 3 avril 2021

Samedi Saint


S. Macaire le grand, Le Christ vient nous sauver de la tombe, aujourd'hui encore

Lorsque vous entendez que le Christ est descendu dans l'Hadès afin de délivrer les âmes qui y gisaient, ne pensez pas que ce qui se passe à présent soit vraiment différent.

Le cœur est une tombe et là nos pensées et notre intellect sont ensevelis, emprisonnés dans l'épaisse ténèbre. Et ainsi le Christ vient aux âmes dans cet enfer, qui L'appellent, descendant en quelque sorte dans les profondeurs du cœur. Et là Il commande à la mort de relâcher les âmes prisonnières qui L'ont appelé, car Il a la puissance de nous délivrer. Alors, soulevant la pensante pierre qui oppresse l'âme, et ouvrant la tombe, Il nous ressuscite - car nous étions vraiment morts, - et libère ainsi notre âme emprisonnée de cette sombre prison.


vendredi 2 avril 2021

Vendredi Saint


Bx. Père Marie Eugène de l'Enfant-Jésus, "Voici l'Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde"

 

Vous êtes devenu le grand pécheur! vous êtes transformé en péché. Vous le portez sur vos épaules; c'est ainsi que vous nous en débarrassez.

Le soleil infini reste dans votre âme, dans toutes vos facultés. Il y fait son œuvre de lumière. Vous êtes pénétré de Dieu, et, en même temps, de l'extérieur il y a le poids du péché. Vous l'avez porté pendant toutes les années de votre vie. Contradiction mystérieuse!

Le péché vous étreint, vous enveloppe.

En souffriez-vous, ô Jésus? Probablement: mais vous le portiez victorieusement.

A cette heure, Dieu a donné à ce péché toute sa puissance de destruction, d'obscurcissement. Vous êtes toujours le Verbe incarné; cependant le péché a reçu puissance pour vous étreindre, pour vous envelopper. Il n'atteindra pas la divinité chez vous, mais il atteindra l'humanité, les facultés, l'intelligence, l'âme.

Ce péché est ténèbres, ténèbres de l'enfer; il est haine, comme Dieu est amour. Il n'est pas infini, mais à notre regard il parait indéfini.  C'est le péché du monde; ce n'est pas le péché d'une créature ou d'une époque, c'est le péché de tous les temps. Sainte Thérèse de Jésus a vu celui du XVIe siècle; sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus a vu celui de notre temps, spécialement le péché de l'incrédulité.

 

O Jésus vous portez le péché de toute l''humanité, celui de tous les peuples, de toutes les races, l'obscurcissement volontaire, le refus de la lumière, celui de notre temps produit  par l'orgueil de l'esprit, celui de toute la vague athée, celui de millions et de milliards d'hommes: le péché !

Les dons que vous avez reçus, la pénétration qui vous a été donnée, vous permettent de le voir en détail.

Vous y découvrez le mien, celui de l'orgueil de mon intelligence. Vous m'avez vu, ô Jésus, vous voyez ma bonne volonté, mon amour; et vous voyez mon péché aussi.

Je le sens parfois, ce péché, spécialement ces tendances toujours vivantes, ces forces  qui me désespèrent parfois, qui me font sentir ma pauvreté, ma misère.

Et tout ce péché, le mien, celui des autres, celui dont je souffre autour de moi, celui de notre pays, de toutes ces masses, de ces milliards d'âmes, ô Jésus, vous le voyez, vous le portez.

 

Ce poids Jésus, vous le voyez, vous le portez. Ce poids immense pèse sur votre âme; il y pèse lourdement, non pas seulement parce que le péché est immense, mais parce que vous êtes saint, vous êtes pur, parce que vous êtes la lumière, le Verbe qui spire l'amour.

Ô contradictions, oppositions inconcevables !

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Parce domine, parce populo tuo,

ne in æternum,

irascaris nobis.

miserere nostri Domine, miserere nostri.

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jeudi 1 avril 2021

Jeudi Saint

 ACTE DE RÉPARATION A JÉSUS-HOSTIE

O Jésus-Hostie, que vingt siècles de froideur, d'indifférence, de mépris et de sacrilège, où les hommes ingrats vous délaissent dans vos tabernacles ! Nous venons aujourd'hui offrir à votre Cœur adorable, une solennelle réparation pour toutes les indignités que vous avez à subir dans le Sacrement de votre amour.

Cœur de Jésus, daignez agréer nos désirs de réparation et entendre les accents de notre amour et de notre douleur. Cœur de Jésus, affligé par la communion sacrilège de Judas, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par toutes les communions indignes de tant de mauvais chrétiens, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par les froideurs criminelles et l'indifférence des cœurs qui devraient le plus vous aimer, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par les communions tièdes, sans préparation, sans foi et sans amour, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par les communions faites par routine, par ostentation ou hypocrisie, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par les actions de grâces négligées ou faites sans amour et remplies de distractions, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par toutes les messes mal-célébrées et mal entendues, Pardon et amende honorable ! 

Cœur de Jésus, affligé par toutes les messes, communions ou visites omises par paresse et tiédeur, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par les entrées bruyantes dans les églises, par les sorties brusques et précipités et avant la fin des divins offices, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par les allées et venues, les tenues sans respect et le sans-gêne de nos manières en votre sainte présence, Pardon et amende honorable ! 

Cœur de Jésus, affligé par le peu de retenue de nos regards, les égarements de notre esprit et notre tiédeur pendant les saints mystères, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par tous les péchés commis dans les maisons que vous sanctifiez par votre présence réelle, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par l'abandon où l'on vous laisse dans tant d'églises, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par les blasphèmes des juifs, des hérétiques et des impies qui nient votre présence réelle, Pardon et amende honorable ! 

Cœur de Jésus, affligé par les profanations sans nombre de tant d'hostie foulées aux pieds et livrées aux plus vils usages, Pardon et amende honorable !

Cœur de Jésus, affligé par la violation de vos tabernacles et le vol horrible des saints ciboires, Pardon et amende honorable !

Cœur Sacré de notre aimable Sauveur, nous voudrions pouvoir embrasser dans un acte d'amour réparateur, tous les instants de votre vie sacramentelle, et couvrir de nos amendes honorables tous les endroits du monde où vous avez été outragé.

Pour suppléer à notre impuissance, agréez divin Jésus, l'offrande que nous vous faisons de tous les actes d'amour de votre Mère Immaculée, et en sa considération, ô Cœur de Jésus, faites-vous de plus en plus connaître et aimer. Ainsi soit-il.