jeudi 31 mars 2016

Lumière du Christ ! Nous rendons grâce à Dieu

Sacro-Monto d'Ossucio, Lombardie
De Sa Sainteté le Pape Benoît XVI, Basilique Saint-Pierre de Rome, le 7 avril 2012


~ A Pâques, au matin du premier jour de la semaine, Dieu a dit de nouveau : « Que la lumière soit ! ». Auparavant il y avait eu la nuit du Mont des Oliviers, l’éclipse solaire de la passion et de la mort de Jésus, la nuit du sépulcre. Mais désormais c’est de nouveau le premier jour ­ la création recommence entièrement nouvelle. « Que la lumière soit ! », dit Dieu, « et la lumière fut ». Jésus se lève du tombeau. La vie est plus forte que la mort. Le bien est plus fort que le mal. L’amour est plus fort que la haine. La vérité est plus forte que le mensonge. L’obscurité des jours passés est dissipée au moment où Jésus ressuscite du tombeau et devient, lui-même, pure lumière de Dieu.

Ceci, toutefois, ne se réfère pas seulement à lui ni à l’obscurité de ces jours. Avec la résurrection de Jésus, la lumière elle-même est créée de façon nouvelle. Il nous attire tous derrière lui dans la nouvelle vie de la résurrection et vainc toute forme d’obscurité. Il est le nouveau jour de Dieu, qui vaut pour nous tous.

Mais comment cela peut-il arriver ? Comment tout cela peut-il parvenir jusqu’à nous de façon que cela ne reste pas seulement  parole, mais devienne une réalité dans laquelle nous sommes impliqués ? Par le sacrement du Baptême et la profession de foi, le Seigneur a construit un pont vers nous, par lequel le nouveau jour vient à nous. Dans le Baptême, le Seigneur dit à celui qui le reçoit : Fiat lux ­ que la lumière soit. Le nouveau jour, le jour de la vie indestructible vient aussi à nous. Le Christ te prend par la main. Désormais tu seras soutenu par lui et tu entreras ainsi dans la lumière, dans la vraie vie. Pour cette raison, l’Église primitive a appelé le Baptême « photismos » ­ illumination.

Pourquoi ? L’obscurité vraiment menaçante pour l’homme est le fait que lui, en vérité, est capable de voir et de rechercher les choses tangibles, matérielles, mais il ne voit pas où va le monde et d’où il vient. Où va notre vie elle-même ? Ce qu’est le bien et ce qu’est le mal ? L’obscurité sur Dieu et sur les valeurs sont la vraie menace pour notre existence et pour le monde en général. Si Dieu et les valeurs, la différence entre le bien et le mal restent dans l’obscurité, alors toutes les autres illuminations, qui nous donnent un pouvoir aussi incroyable, ne sont pas seulement des progrès, mais en même temps elles sont aussi des menaces qui mettent en péril nous et le monde. Aujourd’hui nous pouvons illuminer nos villes d’une façon tellement éblouissante que les étoiles du ciel ne sont plus visibles. N’est-ce pas une image de la problématique du fait que nous soyons illuminés ? Sur les choses matérielles nous savons et nous pouvons incroyablement beaucoup, mais ce qui va au-delà de cela, Dieu et le bien, nous ne réussissons plus à l’identifier. C’est pourquoi, c’est la foi qui nous montre la lumière de Dieu, la véritable illumination, elle est une irruption de la lumière de Dieu dans notre monde, une ouverture de nos yeux à la vraie lumière.

Chers amis, je voudrais enfin ajouter encore une pensée sur la lumière et sur l’illumination. Durant la Vigile pascale, la nuit de la nouvelle création, l’Église présente le mystère de la lumière avec un symbole tout à fait particulier et très humble : le cierge pascal. C’est une lumière qui vit en vertu du sacrifice. Le cierge illumine en se consumant lui-même. Il donne la lumière en se donnant lui-même. Ainsi il représente d’une façon merveilleuse le mystère pascal du Christ qui se donne lui-même et ainsi donne la grande lumière.

En second lieu, nous pouvons réfléchir sur le fait que la lumière du cierge est du feu. Le feu est une force qui modèle le monde, un pouvoir qui transforme. Et le feu donne la chaleur. Là encore le mystère du Christ se rend à nouveau visible. Le Christ, la lumière est feu, il est la flamme qui brûle le mal transformant ainsi le monde et nous-mêmes. « Qui est près de moi est près du feu », exprime une parole de Jésus transmise par Origène. Et ce feu est en même temps chaleur, non une lumière froide, mais une lumière dans laquelle se rencontrent la chaleur et la bonté de Dieu.
 
La Résurrection, par Andrea Mantegna
Le grand hymne de l’Exultet, que le diacre chante au début de la liturgie pascale, nous fait encore remarquer d’une façon très discrète un autre aspect. Il rappelle que ce produit, la cire, est due en premier lieu au travail des abeilles. Ainsi entre en jeu la création tout entière. Dans la cire, la création devient porteuse de lumière. Mais, selon la pensée des Pères, il y a aussi une allusion implicite à l’Église. La coopération de la communauté vivante des fidèles dans l’Église est presque semblable à l’œuvre des abeilles. Elle construit la communauté de la lumière. Nous pouvons ainsi voir dans la cire un rappel fait à nous-mêmes et à notre communion dans la communauté de l’Église, qu’elle existe afin que la lumière du Christ puisse illuminer le monde.

Prions le Seigneur à présent de nous faire expérimenter la joie de sa lumière, et prions-le, afin que nous-mêmes nous devenions des porteurs de sa lumière, pour qu’à travers l’Église la splendeur du visage du Christ entre dans le monde (cf. Lumen Gentium n.1). Amen.



lundi 28 mars 2016

Lundi de l'Ange - Lundi de Pâques

Le tombeau vide et le suaire, à sa place

Traditionnellement, ce lundi s'appelle le "lundi de l'Ange". Ils furent les premiers messagers de la joie pascale avec les saintes femmes. En union avec les saints Anges, chantons la gloire de notre Dieu.



Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « L’amour de Dieu seul », partie III


Son amour pour cet adorable Sauveur était si pur que tout ce qu’il y a de plus saint au ciel n’en pouvait détourner sa vue, étant semblable en cela à la bienheureuse sainte Madeleine, la grande amante de ce Dieu-Homme qui, le cherchant après sa mort, toute désolée et dans les larmes, tourne le dos aux saints Anges qui la veulent consoler, parce que rien n’était capable de la consoler que Jésus seul.




dimanche 27 mars 2016

Pâques : le Christ est ressuscité, Il est vraiment rescussité


Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « La dévotion au Règne de Dieu », section 3e

La Résurrection du Sauveur
Nous l’avons, dit le Disciple de l’amour, vu de nos yeux : nous l’avons considéré ; nous l’avons touché de nos mains et, comme il demeurait dans son Père lequel est le Roi des siècles, immortel et invisible, il nous a appris son divin Royaume.

Mais si le Royaume de Dieu a été l’occupation du Verbe incarné durant toute sa vie voyagère, il l’a été encore après sa mort ; car, après sa sainte Résurrection, apparaissant à ses Disciples de temps en temps pendant quarante jours, il leur parlait du Royaume de Dieu.

Car, enfin, celui qui est du Ciel, parle des choses célestes du Royaume du Ciel. Ce devrait être le sujet des entretiens des Chrétiens qui, étant tirés par la grâce de leur vocation de la corruption de la terre et élevés à un état surnaturel, doivent avoir et l’esprit et le corps dans le Ciel. Pour nous, dit le grand Apôtre, nous avons notre conversation dans le Ciel.



samedi 26 mars 2016

Vigile pascale : chantons l'Alléluia !

Joyeuses fêtes de Pâques !


En cette nuit très sainte, nous passons, avec notre Sauveur ressuscité, de la mort à la vie, de l'esclavage du démon à la liberté et l'amitié divine.

En cette année de la divine miséricorde, chantons l'Alléluia, notre joie d'avoir été sauvés et aimés à ce point par un Dieu qui s'est fait homme et qui s'est donné tout entier à nous.

A tous, saintes et heureuses fêtes de Pâques ! Le Christ est ressuscité, Il est vraiment ressuscité !



Hymne de l'Eglise gothique d'Espagne à l’Alléluia :

Le Christ descendant aux enfers délivrer
Adam et Eve du péché et de la mort.

Habitants du ciel, faites résonner l’Alléluia dans vos sacrés cantiques ; d'un concert unanime chantez l’Alléluia éternel.

Vous qui vivez au sein de la lumière qui ne s'éteindra jamais, dans vos chœurs mélodieux, chantez avec ardeur l’Alléluia éternel.

Remontez vers cette heureuse cité de Dieu qui va vous recevoir, et qui, retentissante de cantiques joyeux, répète l’Alléluia éternel.

Dans votre victoire, prenez possession des honneurs de la patrie céleste, où il vous appartient de chanter l’Alléluia éternel.

C'est là que des voix augustes font résonner à jamais, à la gloire du grand Roi, le cantique joyeux , l’Alléluia éternel.

Repos après le labeur, nourriture, breuvage, il fait les délices de ceux qui rentrent dans la patrie, il les enivre à longs traits, l’Alléluia éternel.

Nous aussi, Auteur des êtres, nous célébrons dans nos cantiques mélodieux, nous chantons à votre louange l’Alléluia éternel.

Christ tout-puissant, nos voix te glorifient, et nous disons à ta gloire l’Alléluia éternel, l’Alléluia éternel. Amen.

À son heureux retour, jubilez d'allégresse ; rendez au Seigneur le tribut de gloire et de mélodie, l’Alléluia éternel.



Samedi Saint



A l’occasion de l’ostension du Saint Suaire du 10 avril au 23 mai 2010, le Pape Benoît XVI s’est rendu à la cathédrale de Turin pour y vénérer la relique le dimanche 2 mai.
Il a lu à cette occasion une méditation intitulée « Le mystère du Samedi Saint ».


Chers amis,

C’est pour moi un moment très attendu. En diverses autres occasions, je me suis trouvé face au Saint-Suaire, mais cette fois, je vis ce pèlerinage et cette halte avec une intensité particulière: sans doute parce que les années qui passent me rendent encore plus sensible au message de cet extraordinaire Icône; sans doute, et je dirais surtout, parce que je suis ici en tant que Successeur de Pierre, et que je porte dans mon cœur toute l’Eglise, et même toute l’humanité. Je rends grâce à Dieu pour le don de ce pèlerinage et également pour l’occasion de partager avec vous une brève méditation qui m’a été suggérée par le sous-titre de cette Ostension solennelle: « Le mystère du Samedi Saint ».

On peut dire que le Saint-Suaire est l’Icône de ce mystère, l’Icône du Samedi Saint. En effet, il s’agit d’un linceul qui a enveloppé la dépouille d’un homme crucifié correspondant en tout point à ce que les Evangiles nous rapportent de Jésus, qui, crucifié vers midi, expira vers trois heures de l’après-midi. Le soir venu, comme c’était la Parascève, c’est-à-dire la veille du sabbat solennel de Pâques, Joseph d’Arimathie, un riche et influent membre du Sanhédrin, demanda courageusement à Ponce Pilate de pouvoir enterrer Jésus dans son tombeau neuf, qu’il avait fait creuser dans le roc à peu de distance du Golgotha. Ayant obtenu l’autorisation, il acheta un linceul et, ayant descendu le corps de Jésus de la croix, l’enveloppa dans ce linceul et le déposa dans le tombeau (cf. Mc 15, 42-46). C’est ce que rapporte l’Evangile de saint Marc, et les autres évangélistes concordent avec lui. A partir de ce moment, Jésus demeura dans le sépulcre jusqu’à l’aube du jour après le sabbat, et le Saint-Suaire de Turin nous offre l’image de ce qu’était son corps étendu dans le tombeau au cours de cette période, qui fut chronologiquement brève (environ un jour et demi), mais qui fut immense, infinie dans sa valeur et sa signification.

Le Samedi Saint est le jour où Dieu est caché, comme on le lit dans une ancienne Homélie: « Que se passe-t-il? Aujourd’hui, un grand silence enveloppe la terre. Un grand silence et un grand calme. Un grand silence parce que le Roi dort… Dieu s’est endormi dans la chair, et il réveille ceux qui étaient dans les enfers » (Homélie pour le Samedi Saint). Dans le Credo, nous professons que Jésus Christ « a été crucifié sous Ponce Pilate, est mort et a été enseveli, est descendu aux enfers. Le troisième jour est ressuscité des morts ».

Chers frères et sœurs, à notre époque, en particulier après avoir traversé le siècle dernier, l’humanité est devenue particulièrement sensible au mystère du Samedi Saint. Dieu caché fait partie de la spiritualité de l’homme contemporain, de façon existentielle, presque inconsciente, comme un vide dans le cœur qui s’est élargi toujours plus. Vers la fin du xix siècle, Nietzsche écrivait: « Dieu est mort ! Et c’est nous qui l’avons tué ! ». Cette célèbre expression est, si nous regardons bien, prise presque à la lettre par la tradition chrétienne, nous la répétons souvent dans la Via Crucis, peut-être sans nous rendre pleinement compte de ce que nous disons. Après les deux guerres mondiales, les lager et les goulags, Hiroshima et Nagasaki, notre époque est devenue dans une mesure toujours plus grande un Samedi Saint: l’obscurité de ce jour interpelle tous ceux qui s’interrogent sur la vie, et de façon particulière nous interpelle, nous croyants. Nous aussi nous avons affaire avec cette obscurité.

La sainte Couronne d'épines, à Notre-Dame de Paris
Et toutefois, la mort du Fils de Dieu, de Jésus de Nazareth a un aspect opposé, totalement positif, source de réconfort et d’espérance. Et cela me fait penser au fait que le Saint-Suaire se présente comme un document « photographique », doté d’un « positif » et d’un « négatif ». Et en effet, c’est précisément le cas: le mystère le plus obscur de la foi est dans le même temps le signe le plus lumineux d’une espérance qui ne connaît pas de limite.

Le Samedi Saint est une « terre qui n’appartient à personne » entre la mort et la résurrection, mais dans cette « terre qui n’appartient à personne » est entré l’Un, l’Unique qui l’a traversée avec les signes de sa Passion pour l’homme: « Passio Christi. Passio hominis ». Et le Saint-Suaire nous parle exactement de ce moment, il témoigne précisément de l’intervalle unique et qu’on ne peut répéter dans l’histoire de l’humanité et de l’univers, dans lequel Dieu, dans Jésus Christ, a partagé non seulement notre mort, mais également le fait que nous demeurions dans la mort. La solidarité la plus radicale.

Dans ce « temps-au-delà-du temps », Jésus Christ « est descendu aux enfers ». Que signifie cette expression? Elle signifie que Dieu, s’étant fait homme, est arrivé au point d’entrer dans la solitude extrême et absolue de l’homme, où n’arrive aucun rayon d’amour, où règne l’abandon total sans aucune parole de réconfort: « les enfers ». Jésus Christ, demeurant dans la mort, a franchi la porte de cette ultime solitude pour nous guider également à la franchir avec Lui. Nous avons tous parfois ressenti une terrible sensation d’abandon, et ce qui nous fait le plus peur dans la mort, est précisément cela, comme des enfants, nous avons peur de rester seuls dans l’obscurité, et seule la présence d’une personne qui nous aime peut nous rassurer. Voilà, c’est précisément ce qui est arrivé le jour du Samedi Saint: dans le royaume de la mort a retenti la voix de Dieu. L’impensable a eu lieu: c’est-à-dire que l’Amour a pénétré « dans les enfers », dans l’obscurité extrême de la solitude humaine la plus absolue également, nous pouvons écouter une voix qui nous appelle et trouver une main qui nous prend et nous conduit au dehors. L’être humain vit pour le fait qu’il est aimé et qu’il peut aimer; et si dans l’espace de la mort également, a pénétré l’amour, alors là aussi est arrivée la vie. A l’heure de la solitude extrême, nous ne serons jamais seuls: « Passio Christi. Passio hominis ».

Tel est le mystère du Samedi Saint! Précisément de là, de l’obscurité de la mort du Fils de Dieu est apparue la lumière d’une espérance nouvelle: la lumière de la Résurrection. Et bien, il me semble qu’en regardant ce saint linceul avec les yeux de la foi, on perçoit quelque chose de cette lumière. En effet, le Saint-Suaire a été immergé dans cette obscurité profonde, mais il est dans le même temps lumineux; et je pense que si des milliers et des milliers de personnes viennent le vénérer, sans compter celles qui le contemplent à travers les images – c’est parce qu’en lui, elles ne voient pas seulement l’obscurité, mais également la lumière; pas tant l’échec de la vie et de l’amour, mais plutôt la victoire, la victoire de la vie sur la mort, de l’amour sur la haine; elles voient bien la mort de Jésus, mais elles entrevoient sa Résurrection; au sein de la mort bat à présent la vie, car l’amour y habite. Tel est le pouvoir du Saint-Suaire: du visage de cet « Homme des douleurs », qui porte sur lui la passion de l’homme de tout temps et de tout lieu, nos passions, nos souffrances, nos difficultés, nos péchés également – « Passio Christi. Passio hominis » – de ce visage émane une majesté solennelle, une grandeur paradoxale.

La sainte Tunique, à Argenteuil
Ce visage, ces mains et ces pieds, ce côté, tout ce corps parle, il est lui-même une parole que nous pouvons écouter dans le silence. Que nous dit le Saint-Suaire? Il parle avec le sang, et le sang est la vie! Le Saint-Suaire est une Icône écrite avec le sang; le sang d’un homme flagellé, couronné d’épines, crucifié et transpercé au côté droit. L’image imprimée sur le Saint-Suaire est celle d’un mort, mais le sang parle de sa vie. Chaque trace de sang parle d’amour et de vie. En particulier cette tâche abondante à proximité du flanc, faite de sang et d’eau ayant coulé avec abondance par une large blessure procurée par un coup de lance romaine, ce sang et cette eau parlent de vie. C’est comme une source qui murmure dans le silence, et nous, nous pouvons l’entendre, nous pouvons l’écouter, dans le silence du Samedi Saint.

Chers amis, rendons toujours gloire au Seigneur pour son amour fidèle et miséricordieux. En partant de ce lieu saint, portons dans les yeux l’image du Saint-Suaire, portons dans le cœur cette parole d’amour, et louons Dieu avec une vie pleine de foi, d’espérance et de charité. Merci.



vendredi 25 mars 2016

Vendredi Saint : Notre Seigneur prend la Croix pour y offrir sa Vie pour le Salut du monde. Venez, adorons !




Sainte Catherine de Sienne, Le Dialogue, 134 


« Prenant une coupe ... il leur dit 'Ceci est mon sang, ... qui va être répandu pour une multitude en rémission des péchés' » (Mt 26,28)

Ô Amour inestimable ! En me révélant tes secrets, tu m'as donné le remède doux et amer qui me guérit de mon infirmité, qui m'arrache à mon ignorance et à ma négligence. 
L'Agonie. Jésus tombe sous le poids de la Croix.
La Crucifixion. La désolation de Notre Dame.

Il ranime mon zèle et me remplit d'un désir ardent de recourir à toi.
Tu m'as montré ta bonté et aussi les outrages que tu reçois de tous les hommes, même de tes ministres. 
Tu me fais verser des larmes sur moi-même, pauvre pécheresse, et sur ces morts qui vivent si misérablement, toi bonté infinie ~
Je te demande donc instamment : fais miséricorde au monde et à ta sainte Église ! 

Oh, pauvre que je suis, que mon âme est douloureuse, à cause du mal que j'ai fait.

Christ portant la Croix, du Guatemala
Ne tarde plus, Seigneur, à faire miséricorde au monde, consens à accomplir le désir de tes serviteurs...

Ils veulent ce Sang dans lequel tu as lavé l'iniquité et effacé la tâche du péché d'Adam.

Ce Sang est nôtre puisque tu nous en as fait un bain ; tu ne veux et tu ne peux pas le refuser à qui te le demande en vérité.

Donne donc le fruit de ce Sang à tes créatures...
C'est par ce Sang qu'ils te supplient de faire miséricorde au monde.







jeudi 24 mars 2016

Jeudi Saint, institution du Sacerdoce et de la divine Eucharistie

Certes, après l’annonce de la Bonne Nouvelle du salut universel en Jésus Christ, c’est le rôle des pasteurs d’instruire le peuple de Dieu sur le bien et le mal. Il s’agit d’indiquer « le chemin du Ciel » (comme disait saint  Jean-Marie Vianney au petit berger qui lui avait montré la route d’Ars). L’enjeu n’est ni plus ni moins que la vie éternelle ou la damnation. On ne rigole pas avec ça !

Insitution de la divine Eucharistie
C’est pourquoi tous ceux qui enseignent et exhortent au nom du Christ doivent annoncer, sans compromis et sans lâcheté, ce qui conduit à la bénédiction ou à la malédiction, montrer clairement le chemin escarpé qui mène à la vie et dénoncer la route large et spacieuse qui mène à la perdition. Même si cela ne fait pas plaisir, c’est une œuvre de charité que de dénoncer le péché. Cependant, cela ne peut se faire sous la forme d’une liste de péchés associés à une peine : il s’agit d’un vrai enseignement qui doit éclairer la conscience du fidèle, l’encourager à la conversion et non l’enfermer dans une impasse.

C’est pourquoi, si l’Eglise a le devoir de dénoncer largement le péché et d’enseigner au plus grand nombre à le repérer et à l’éviter, elle ne peut désigner le pécheur que dans un cadre bien précis, fixé par le Seigneur lui-même. Ce cadre est la confession.

Le Sacrement de Pénitence qui rétablit la communion
en vue de la sainte Communion
Lorsque Jésus souffla sur ses apôtres et leur dit : "Recevez l’Esprit Saint ! Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis ; ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus" (Jean 20,22-23), il n’a pas donné un code avec des règles à destination de tous les fidèles. Il a institué des ministres chargés d’accompagner leurs frères. Si le Seigneur a pris le risque de confier ce pouvoir extraordinaire à des serviteurs tout aussi pécheurs que les autres hommes, c’est qu’il voulait éviter un danger plus grand encore. Ce danger est celui du jugement, jugement d’autrui, mais aussi jugement de soi-même. Jésus a commandé : « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés » (Mat 7,1). Il ne veut pas que chacun y aille de son propre petit jugement : la bible d’une main, le catéchisme de l’autre, le code de droit canonique dans une troisième, tout cela baignant dans les grands principes moraux des arrière-grands-parents qui n’ont souvent rien à voir avec le message de Jésus ou les conditions culturelles actuelles.

Pour répondre en quelques minutes à la question qu’on me posait, je n’avais pas le temps de me lancer dans un cours de théologie morale, mais je ne pouvais surtout pas donner une liste de situations permises et défendues.

) Cela aurait signifié que chacun, seul dans son coin, seul devant une liste, aurait dû se juger lui-même. Mais aucun fidèle, même l’évêque et même le pape, ne peut se juger lui-même (le pape et moi nous nous confessons comme tout le monde à un autre prêtre !). Cela est valable pour chacun…

Messe de la Sainte Cène au Saint-Sépulcre de Jérusalem
) Ce catalogue « du permis et du défendu » donnerait la possibilité, de l’extérieur et sans discernement, de juger autrui digne ou indigne de communion (un peu comme un radar flashe tous les véhicules qui franchissent la vitesse limite, sans savoir s’il s’agit d’un fou du volant ou d’une ambulance menant un mourant aux urgences !).

Frères et sœurs, chacun a le devoir d’éclairer sa conscience et d’évaluer sa propre vie face à l’Evangile (cela s’appelle l’examen de conscience) et ensuite de faire de son mieux pour se conformer à la volonté de Dieu. Mais il faut rappeler à tous (ceux qui sont "en règle" comme ceux qui ne le sont pas) que seul le sacrement de confession est le lieu de la réconciliation avec Dieu qui nous rend dignes de recevoir la sainte communion.

Ce n’est pas en communiant ou en ne communiant pas que l’on fait ce que Dieu veut, c’est en se confessant !

Il faut, certes, éviter les scandales quand on vit une situation publique ambiguë, mais on peut communier si, et seulement si, dans le secret du confessionnal, le prêtre envoyé pour ça par Dieu nous a jugés suffisamment contrits pour recevoir le pardon de nos péchés. Voilà pourquoi je fais souvent ce communiqué précis avant la communion aux messes que je préside : 

« Pour communier, recevoir le Corps du Christ, je vous rappelle qu’il faut être baptisé, avoir fait sa première communion, s’être confessé, avoir reçu l’absolution et vivre selon l’Evangile ».

Cela suffit comme règle… et concerne tout le monde !


+ David Macaire
Archevêque de Saint-Pierre et Fort-de-France

mercredi 23 mars 2016

Mercredi Saint - Messe chrismale : Prions pour nos Prêtres

L'allégorie de l'Eucharistie

Au cours de la Messe chrismale, l’Evêque, successeur des Apôtres, bénit les huiles des catéchumènes et de l’onction des malades, puis il consacre solennellement le Saint Chrême pour la célébration des baptêmes, des confirmations, des Ordinations sacerdotales et épiscopales, mais aussi la consécration des églises, autels et cloches.

Au cours de cette célébration solennelle qui a lieu dans l’église cathédrale le Jeudi Saint au matin, à moins que ce ne soit les Mardi ou Mercredi Saints au soir, les diacres et les prêtres renouvellent solennellement leurs promesses faites au jour de leurs ordinations respectives.

Prions pour les vocations sacerdotales. Religieuses et consacrées, oui, aussi. Mais sans prêtre, qui nous réconciliera avec le Seigneur, qui célébrera les saints Mystères de la Messe, qui célébrera les autres Sacrements qui édifient en nous la sainteté de Dieu ? Une Eglise sans prêtre, ça n’existe pas. Ou alors, ce n’est plus l’Eglise de Jésus-Christ, Fils de Dieu venu dans la chair pour nous sauver. Ce n’est plus l’Evangile proclamé par notre Dieu et Seigneur mais l’apostasie, la désertion du Chemin de Vérité et de Vie que nous offre Jésus-Christ.

Malgré leurs péchés, leurs petitesses ou leurs mesquineries, parfois, comme nous tous, prions pour la sainteté des prêtres qui doivent être une image de Jésus-Christ, Bon Pasteur, doux et humble de cœur, venu nous laver de nos péchés et nous restaurer de Son Corps sacré pour faire de nous des saints. Prions pour leur sainteté.
Prions aussi pour tous les jeunes hommes qui entendent l’appel : que rien ni personne ne les décourage, ne les détourne de l’appel de Dieu à se mettre à son service et aux nôtre pour que nous devenions des saints.

Prions !
Mon Dieu, donnez-nous des prêtres !
Mon Dieu, donnez-nous de saints prêtres !
Mon Dieu, donnez-nous beaucoup de saints prêtres,
et rendez-nous dociles à leurs enseignements !

Sa Sainteté le Pape Benoit XVI, élévation du saint Calice de Valence
au cours d'une Messe qu'il présidait.

Extraits de l’homélie de la Messe chrismale du Saint Père Benoît XVI adressée aux prêtres du Diocèse de Rome, le Jeudi Saint de l’année 2009

~ Être plongés dans la Vérité, dans le Christ – la prière fait partie de ce processus dans lequel nous apprenons à devenir ses amis et aussi à le connaître : sa manière d’être, de penser, d’agir. Prier est un cheminement dans une communion personnelle avec le Christ, lui présentant notre vie quotidienne, nos succès et nos échecs, nos épreuves et nos joies – il s’agit simplement de se présenter devant Lui. Mais pour éviter que cela ne devienne une auto-contemplation, il est important que nous apprenions continuellement à prier en priant avec l'Église.

Célébrer l’Eucharistie veut dire prier. Nous célébrons l’Eucharistie de manière juste, si en pensée et par tout notre être nous entrons dans les paroles que l'Église nous propose. En elles se trouve la prière de toutes les générations qui nous entraînent avec elles sur le chemin vers le Seigneur. Comme prêtres, nous sommes ceux qui, dans la célébration eucharistique, par leur prière, ouvrent la route à la prière des fidèles d’aujourd’hui. Si nous sommes intérieurement unis aux paroles de la prière, si nous nous laissons guider et transformer par elles, alors les fidèles eux-aussi trouvent l’accès à ces paroles. Alors, nous devenons tous véritablement « un seul corps et une seule âme » avec le Christ.

Être plongés dans la vérité et ainsi dans la sainteté de Dieu, cela signifie pour nous accepter aussi le caractère exigeant de la vérité ; s’opposer, dans les grandes choses comme dans les petites au mensonge, qui de manière extrêmement variée est présent dans le monde ; accepter le combat pour la vérité, pour que sa joie la plus profonde soit présente en nous.
Un modèle de Prêtre, le bienheureux Noël Pinot montant
à l'échafaud en vêtements sacerdotaux, par Livache.

Quand nous parlons d’être consacrés par la vérité, nous ne devons pas non plus oublier qu’en Jésus Christ vérité et amour sont une seule réalité. Être plongés en Lui signifie être plongés dans sa bonté, dans l’amour vrai. L’amour vrai ne se trouve pas à bon marché, il peut même être très exigeant. Il oppose résistance au mal, pour conduire l’homme vers le bien véritable. Si nous devenons un avec le Christ, nous apprenons à Le reconnaître dans ceux qui souffrent, dans les pauvres, dans les petits de ce monde ; alors nous devenons des personnes qui servent, qui reconnaissent les frères et sœurs du Christ et qui en eux le rencontrent Lui-même.

« Consacre-les par la vérité » - c’est la première partie de cette parole de Jésus. Mais il ajoute après : « Pour eux, je me consacre moi-même, afin qu’ils soient, eux aussi, consacrés par la vérité » - c’est-à-dire authentiquement (Jn 17,19). Je pense que cette deuxième partie a une signification particulière. Il existe dans les diverses religions dans le monde de multiples modes rituels de « sanctification », de consécration d’une personne humaine. Mais tous ces rites peuvent rester à un niveau purement formel. Le Christ demande pour ses disciples la vraie sanctification, qui transforme leur être, qui les transforme eux-mêmes ; que cela ne reste pas purement rituel, mais soit une véritable appropriation par le Dieu lui-même. Nous pourrions dire encore : le Christ a demandé pour nous le Sacrement qui nous touche dans la profondeur de notre être. Mais il a prié aussi pour que cette transformation qui s’accomplit jour après jour en nous se traduise en vie ; il a prié pour que dans notre vie quotidienne, dans le concret de notre vie de chaque jour, nous soyons vraiment envahis par la lumière de Dieu.
Le Christ Jésus s'offrant dans le pressoir mystique.

A la veille de mon Ordination sacerdotale, il y a 58 ans, j’ai ouvert la Sainte Écriture, parce que je voulais encore recevoir une Parole du Seigneur pour ce jour et pour le chemin que j’aurai à parcourir comme prêtre. Et mon regard est tombé sur ce passage : « Consacre-les par la vérité : ta parole est vérité ». Alors j’ai su : le Seigneur est en train de parler de moi, et il est en train de me parler. C’est exactement ce qui arrivera pour moi demain. En dernière analyse, nous ne sommes pas consacrés par des rites, même s’il y a besoin de rites. Le bain dans lequel le Seigneur nous plonge, c’est Lui-même – la Vérité en personne. Ordination sacerdotale, veut dire : être immergés en Lui, dans la Vérité. Je lui appartiens d’une manière nouvelle et de cette manière j’appartiens aux autres, « pour que ton règne vienne ».

Chers amis, au moment du renouvellement des promesses, nous voulons prier le Seigneur afin qu’il fasse de nous des hommes de vérité, des hommes d’amour, des hommes de Dieu. Prions-le de nous attirer toujours plus en lui, afin que nous devenions véritablement prêtres de la Nouvelle Alliance. Amen.