Blason et devise de l'Ordre Dominicain (dit, des Prêcheurs) : "Louer - Bénir - Prêcher" |
S.Exc.Mgr Jacques de Voragine, « La Légende dorée »
Détail de l'autel de S. Dominique, église à Pérouse |
Dominique, chef et fondateur illustre de l’ordre des Frères-Prêcheurs, naquit en Espagne, dans la ville de Calaruega, au diocèse d'Osma. Son père se nommait Félix et sa mère Jeanne. Avant sa naissance sa mère vit en songe, qu'elle portait dans son sein : un petit chien tenant dans sa gueule une torche allumée avec laquelle il embrasait tout l’univers. Quand elle l’eut mis au monde, une dame qui l’avait levé des fonts sacrés du baptême crut voir sur le front du petit Dominique une étoile très brillante qui éclairait toute la terre.
(…) Au concile de Latran (Latran IV, en 1215), il alla à Rome pour ce concile général avec Foulques, évêque de Toulouse, et demanda au souverain Pontife Innocent III, pour lui et ses successeurs, la confirmation de l’ordre qui serait appelé et qui serait effectivement les Prêcheurs. Le Pape se montra d'abord un peu difficile ; mais une nuit, il vit en songe l’église de Latran (la Cathédrale du Pape, Saint-Jean du Latran) menacée d'une ruine soudaine. Comme il regardait cela avec effroi, voilà saint Dominique qui se présente de l’autre côté soutenant avec les épaules tout cet édifice chancelant. A son l’éveil, le pontife comprit le sens de la vision et accueillit avec joie la demande de l’homme de Dieu.
Le Pape Honorius III, en 1216, donnant à saint Dominique son approbation, par Leandro da Ponte |
(…) Sur ces entrefaites, Innocent mourut, et Honorius, son successeur au souverain pontificat, confirma l’ordre, l’an du Seigneur 1216. Comme saint Dominique priait à Rome dans une église de saint Pierre, pour la dilatation de son ordre, il vit venir à lui les glorieux princes des Apôtres Pierre et Paul : le premier, c'est-à-dire saint Pierre, semblait lui donner un bâton, et saint Paul un livre, en lui disant : « Va prêcher, parce que tu as été choisi de Dieu pour remplir ce ministère. » Et il lui sembla, en un clin d'œil, qu'il voyait ses fils dispersés par tout l’univers, et marchant deux à deux.
Saint Dominique par le Bx. fra Angelico, op. |
(…) Enfin le terme de son pèlerinage approchant, Dominique, qui était à Bologne, commença à tomber en langueur et en grande faiblesse ; la dissolution de son corps lui fut montrée dans une vision : un jeune homme d'une grande beauté lui apparut, et l’appela en disant : « Viens, mon bien-aimé, viens à la joie, viens. » Alors il fit venir douze des frères du couvent de Bologne, et pour ne pas les laisser déshérités et orphelins, il fit son testament en ces mots : « Voici ce que je vous laisse comme à mes enfants, afin que vous le possédiez à titre héréditaire : Ayez la charité, gardez l’humilité, et possédez la pauvreté volontaire » (…) Arriva ensuite son heure dernière et il s'endormit dans le Seigneur, l’an 1221.
Le jour et l’heure de son trépas furent révélés, ainsi qu'il suit, à frère Guali, alors prieur des frères Prêcheurs de Brescia et par la suite évêque de la même ville. Il dormait d'un léger sommeil, la tête appuyée sur le clocher des frères, quand il vit le ciel ouvert et deux échelles blanches qui en descendaient sur la terre ; Jésus-Christ avec sa Mère en tenait le haut, et les anges y montaient et descendaient en poussant des acclamations de joie. En bas entre les deux échelles était placé un siège sur lequel se trouvait assis un frère dont la tête était couverte d'un voile. Or, Jésus et sa mère tiraient les échelles en haut, jusqu'à ce que le frère eut été élevé au ciel dont l’ouverture fut alors refermée (…) il vit l’homme de Dieu Dominique ceint d'une couronne d'or, et tout resplendissant de lumière.
R.P. H-Dominique Lacordaire, op., « Vie de Saint Dominique »
Lorsque les Frères habitaient encore auprès de l'église de Saint-Sixte, et étaient au nombre de cent, un certain jour le bienheureux Dominique commanda à frère Jean de Calabre et à frère Albert le Romain d'aller par la ville chercher des aumônes. Mais ils s'y employèrent inutilement depuis le matin jusqu'à la troisième heure du jour. Ils revenaient donc à la maison, et déjà ils atteignaient l'église de Sainte-Anastasie, quand une femme qui avait une grande dévotion à l'ordre les rencontra, et, voyant qu'ils ne rapportaient rien, leur donna un pain.
Je ne veux pas, leur dit-elle, que vous retourniez tout à fait à vide. Un peu plus loin, ils furent accostés par un homme qui leur demanda instamment la charité. Ils s'excusèrent de lui donner, parce qu'ils n'avaient rien pour eux-mêmes. Mais l'homme insistant toujours davantage ils se dirent l'un à l'autre Que ferons-nous d'un pain ? Donnons-le-lui pour l'amour de Dieu. Ils lui donnèrent donc le pain, et aussitôt ils le perdirent de vue.
Or, comme ils rentraient au couvent, le pieu Père, à qui le Saint-Esprit avait déjà révélé tout ce qui s'était passé, vint à leur rencontre, et leur dit d'un air joyeux : « Enfants, vous n’avez rien ? - Non, père, répondirent-ils ». Et ils lui racontèrent ce qui était arrivé, et comment ils avaient donné le pain au pauvre. Il leur dit : « C'était un ange du Seigneur ; le Seigneur saura bien nourrir les siens ; allons prier. » Là-dessus il entra dans l'église, et, en étant sorti au bout de peu de temps, il dit aux Frères d'appeler la communauté au réfectoire.
Les Anges servant à table S. Dominique et ses frères au réfectoire |
Ceux-ci lui répondirent : « Mais, père saint, comment voulez-vous que nous les appelions, puisqu'il n'y a rien à leur servir ? » Et ils tardaient exprès d'accomplir l'ordre qui leur avait été donné. C'est pourquoi le bienheureux père fit venir frère Roger, le cellérier, et lui commanda de rassembler les Frères pour le dîner, parce que le Seigneur pourvoirait à leurs besoins.
On couvrit donc les tables ; on posa les coupes, et, à un signal donné, tout le couvent entra au réfectoire. Le bienheureux père prononça la bénédiction, et, tout le monde s'étant assis, frère Henri le Romain commença la lecture. Cependant le bienheureux Dominique priait, les mains jointes sur la table et voilà que tout à coup, selon qu'il l'avait promis, par l'inspiration de l'Esprit Saint, deux beaux jeunes hommes, ministres de la divine Providence, apparurent au milieu du réfectoire, portant des pains dans deux nappes blanches qui leur pendaient de l'épaule devant et derrière. Ils commencèrent la distribution par les rangs inférieurs, l'un à droite, l'autre à gauche et mirent devant chaque frère un pain entier d'une admirable beauté. Puis lorsqu'ils furent parvenus jusqu'au bienheureux Dominique, et qu'ils eurent mis semblablement devant lui un pain entier, ils inclinèrent la tête et disparurent, sans qu’on n’ait jamais su jusqu'aujourd'hui où ils allaient ni d'où ils venaient. Le bienheureux Dominique dit aux Frères : « Mes frères, mangez le pain que le Seigneur vous a envoyé ». Il dit ensuite aux frères servants de verser du vin. Mais ceux-ci répondirent Père saint, il n'y en a pas.
Alors le bienheureux Dominique, plein de l'esprit de prophétie, leur dit : « Allez au muid, et versez aux Frères le vin que le Seigneur leur a envoyé. »
Ils y allèrent, en effet, et trouvèrent le muid plein jusqu'au bord d'un vin excellent qu'ils s'empressèrent d'apporter. Et le bienheureux Dominique dit : « Buvez, mes frères, du vin que le Seigneur vous a envoyé ». Ils mangèrent donc et burent tant qu'il leur plut ce jour-là, le lendemain et le surlendemain. Mais après le repas du troisième jour, il fit donner aux pauvres tout ce qui restait du pain et du vin, et ne voulut pas qu'on en conservât davantage à la maison. Pendant ces trois jours personne n'était allé demander l'aumône parce que le Seigneur avait envoyé du pain et du vin en abondance. Le bienheureux père fit ensuite un très beau sermon aux Frères, pour les avertir de ne jamais se défier de la divine Providence, même dans la plus grande pénurie.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire