mercredi 9 avril 2014

La crucifixion du Seigneur

Le Calvaire, en hébreu - Golgotha -
chapelle de la Crucifixion du Sauveur,
Basilique du Saint-Sépulcre de Jérusalem

Saint Alphonse-Marie de Liguori 

Considérations sur la Passion de Jésus-Christ


Chap. 3, IV, le crucifiement

D'après les révélations faites à sainte Brigitte, quand notre Sauveur se vit sur la croix, il étendit de lui-même sa main droite à l'endroit où elle devait être clouée. Les bourreaux clouèrent ensuite sa main gauche, et enfin ses pieds sacrés; après quoi, ils laissèrent Jésus mourir sur ce lit de douleur. Saint Augustin dit que le supplice de la croix était extrêmement cruel, parce qu'il rendait la mort la plus lente, afin de prolonger la douleur.

Ô ciel ! quel spectacle de voir le Fils du Père éternel crucifié entre deux criminels ! C'est là précisément ce qu'Isaïe avait prédit (Is 53, 12). Saint Jean Chrysostome, considérant Jésus en croix, s'écrie avec admiration et amour : " Je vois mon Sauveur dans le ciel entre le Père et le Saint-Esprit; je le vois sur le mont Thabor entre deux Saints, Moïse et Élie; et comment le vois-je maintenant crucifié sur le Calvaire entre deux voleurs ?" Mais cela devait être ainsi; car, selon le décret divin, c'est ainsi qu'il devait mourir, pour expier par sa mort les péchés des hommes et les sauver, conformément à la prophétie d'Isaïe.

Le même Prophète fait cette question: "Quel est cet homme si beau et si fort, qui vient d'Édom, les vêtements couleur de sang ?" (Is 63, 3). Édom marque la couleur rouge, mais un peu foncée, comme on le voit dans la Genèse (Gn 25, 30). Cette demande est suivie d'une réponse, et, d'après les interprètes, c'est Notre-Seigneur qui parle: "C'est moi qui professe la justice, et qui me montre grand pour sauver" (Is 63, 1).

Jésus crucifié entre les deux voleurs (larrons), par Tiepolo.

Le Prophète interroge de nouveau: "Pourquoi donc vos vêtements sont-ils rouges, comme les habits de ceux qui foulent le vin dans le pressoir au temps de la vendange?" (Is 63,2). Et le Seigneur répond: "J'ai été seul à fouler le vin; aucune homme ne s'est trouvé avec moi" (Is 63,3). Par ce pressoir, Tertullien, saint Cyprien et saint Augustin entendent la Passion de Jésus-Christ, dans laquelle son vêtement, c'est-à-dire sa chair sacrée fut tout couvert de sang et de plaies, selon ce que dit saint Jean dans l'Apocalypse: "Le manteau qui l'enveloppe est trempé de sang; et son nom? Le Verbe de Dieu" (Ap 19,13). Saint Grégoire dit que, dans ce pressoir dont parle Isaïe, notre Sauveur a été foulé et a foulé. Il a foulé parce que, dans sa passion, il a vaincu les démons; et il a été foulé, parce que son corps adorable a été brisé dans les tourments comme le raisin dans le pressoir, suivant cet autre texte du même Prophète, déjà cité: "Yahvé s'est plu à l'écraser par la souffrance" (Is 53,10).

Voilà donc ce divin Maître, qui était "le plus beau des hommes" (Ps 44, 3), le voilà, sur le Calvaire, tellement défiguré à force de tortures, qu'il fait horreur à qui le regarde. Mais il en paraît d'autant plus beau aux yeux des âmes dont il est aimé; car ces plaies, ces meurtrissures, ces chairs déchirées, sont autant de marques, autant de preuves de son amour pour nous. Écoutons un poète exprimer fort bien ce sentiment:

Descente de Croix, Rubens.
Lorsqu'on te considère, ô Sauveur de mon âme,
Si maltraité pour nous par la main du bourreau,
Le cœur reconnaissant de ton amour s'enflamme; 

Plus on t'a déchiré, plus tu nous sembles beau.

Mais, ajoute saint Augustin, ce que Notre-Seigneur perd en beauté, nous le gagnons. En effet, c'est la difformité de Jésus crucifié qui fait la beauté de nos âmes. Elles étaient toutes défigurées; mais, lavées dans son sang divin, elles deviennent toutes pures et toutes belles, selon ce qu'on lit dans l'Apocalypse (Ap 7, 13). Tous les Saints, comme enfants d'Adam, excepté la Bienheureuse Vierge, ont été quelque temps couverts d'une robe souillée du péché de leur premier père et de leurs propres fautes; mais, purifiée par le sang de l'Agneau, elle est devenue toute blanche et agréable aux yeux de Dieu.

Vous aviez donc raison de dire, ô mon Jésus ! qu'une fois élevé en croix, vous attireriez tout à vous (Jn 12, 32). Assurément, vous n'avez rien omis pour gagner l'affection de tous les cœurs. Aussi, combien d'âmes heureuses, en vous voyant crucifié et mort pour leur amour, ont tout abandonné, richesses, dignités, patrie, parents, et ont osé braver les tortures et la mort, pour se donner entièrement à vous! Malheur à ceux qui rejettent les grâces que vous leur avez procurées par tant de travaux et de douleurs! Ah ! leur plus grand tourment dans l'enfer, ce sera de penser qu'ils ont eu un Dieu qui, pour les attirer à son amour, a donné sa vie sur une croix, et qu'eux, de leur plein gré, ils ont voulu se perdre, se vouer à une ruine 1irréparable à jamais, durant toute l'éternité. Eh quoi, mon doux Rédempteur, j'ai moi-même mérité de tomber dans ce malheur, pour les offenses que je vous ai faites! Combien de fois n'ai-je pas résisté à votre grâce, par laquelle vous cherchiez à m'attacher à vous ? Combien de fois, méprisant votre amour, ne vous ai-je pas tourné le dos, pour suivre mes inclinations ? Ah! que ne suis-je mort plutôt que de vous offenser! que ne vous ai-je toujours aimé! Je vous rends grâce, ô mon Amour! de m'avoir supporté avec tant de patience, et même, au lieu de m'abandonner comme je le méritais, d'avoir multiplié envers moi vos invitations, vos traits de lumière, et vos miséricordieuses inspirations. Je vous en remercierai éternellement : "L'amour du Seigneur, à jamais je le chante" (Ps 88, 2).

Notre-Dame des douleurs, Ayamonte.
Mon Sauveur et mon Espérance ! je vous en conjure, ne cessez pas de m'attirer à vous et de me fortifier de plus en plus par le secours de vos grâces, afin que dans le ciel je puisse vous aimer avec plus d'ardeur, en me rappelant tant de miséricordes que vous m'avez faites, après tant de déplaisirs que je vous ai donnés. J'espère tout par les mérites de ce sang précieux que vous avez répandu et de cette mort douloureuse que vous avez endurée pour moi.


Sainte Vierge Marie,
protégez-moi,
priez pour moi !


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