Coudekerque-Branche,
Le
8 avril 1916
Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus soutenant un soldat blessé au combat, par P.L.A. Annould |
Ma Révérende Mère ;
Je vous remets
ci-joints la somme de 50 francs, pour acquitter une promesse à sœur Thérèse de
l’Enfant Jésus, qui m’a sauvé la vie dans les circonstances suivantes.
Le samedi 10
octobre 1914, ma compagnie, la 10e du 8e régiment
territorial, se trouvait en arrière-garde du 3e bataillon, qui
rentrait à Lille. Celui-ci nous ayant abandonnés pour avancer plus rapidement,
nous fûmes attaqués par la cavalerie allemande au village de Radinghem, à neuf
kilomètres de Lille. Ne possédant ni canon ni batterie et massacrés par le feu
de l’ennemi, nous nous repliâmes sur
Armentières.
Etant
sous-officier, j’eus l’honneur d’être particulièrement visé, et trois
mitrailleuses tiraient sur moi. Sans le secours de cette bonne petite sœur
Thérèse, j’aurais dû être tué mille fois. Cependant une balle m’atteignit en me
brisant le col du fémur, et je tombai dans un fossé plain d’eau, en bordure de
route.
Les bleuets de France à Verdun |
Je m’attendais à
être découvert et fait prisonnier, quand, à ma profonde surprise, au bout de
vingt minutes, de braves fermiers français venaient me relever. A peine
m’avaient-ils cachés dans leur grange, en compagnie de deux chevaux, que les
soldats allemands entrèrent dans la ferme et l’explorèrent de tous côtés pour
me découvrir, mais ce fut en vain, et ils se retirèrent dépités. Je vécus ainsi
une semaine chez ces bons paysans, et malgré des perquisitions faites, jusqu’à
dix fois par jour, pour me trouver, jamais aucun ennemi ne pénétra dans le lieu
où j’étais réfugié. J’avais la conviction que sœur Thérèse me gardait, et je ne
manquais pas de l’invoquer à chaque nouvelle tentative. Il me semblait même la
voir devant la porte en défendant l’accès. Une fois entre autres, mes
charitables hôtes vinrent en toute hâte me dire : « C’en est
fait ! les Allemands sont là ! » Alors je suppliai ma puissante
Protectrice d’écarter ce péril extrême, et je vis tout à coup ces mots écrits
en lettres blanches au-dessus de la porte : « N’aie pas peur, tu
seras sauvé. » De fait, les soldats visitèrent les granges voisines et la
cour sans me découvrir. Enfin, grâce à la chère sainte, je fus recueilli, après
ces huit jours, par une patrouille anglaise.
Quand je me
rappelle les dangers courus pendant cette semaine, je ne trouve pas de mots
assez expressifs pour témoigner ma reconnaissance à sœur Thérèse. Je fais
l’impossible pour propager sa dévotion, et tous les amis et parents à qui j’ai
distribué ses images reconnaissent, eux aussi, qu’ils sont protégés.
Vous pouvez, ma
Révérende Mère, publier mon récit, afin d’augmenter, s’il est possible, la
confiance des soldats en la sainte de Lisieux.
Votre respectueux
serviteur,
Marcel
Dutoit,
ex-sergent
au 8e territorial
d’infanterie,
10e compagnie,
3e
Bataillon
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