vendredi 14 septembre 2018

Victoire, tu régneras ! Ô Croix, tu nous sauveras


Du saint Pape Jean Paul II, Dives in Misericordia, n.7 

Les événements du Vendredi Saint, et auparavant encore la prière à Gethsémani, introduisent dans tout le déroulement de la révélation de l’amour et de la miséricorde, dans la mission messianique du Christ, un changement fondamental. Celui qui «est passé en faisant le bien et en rendant la santé» (Act. 10, 38), «en guérissant toute maladie et toute langueur» (Mt. 9, 35), semble maintenant être lui-même digne de la plus grande miséricorde, et faire appel à la miséricorde, quand il est arrêté, outragé, condamné, flagellé, couronné d’épines, quand il est cloué à la croix et expire dans d’atroces tourments (Cf. Mc. 15, 37; 10. 19, 30). C’est alors qu’il est particulièrement digne de la miséricorde des hommes qu’il a comblés de bienfaits, et il ne la reçoit pas. Même ceux qui lui sont les plus proches ne savent pas le protéger et l’arracher aux mains des oppresseurs. Dans cette étape finale de la fonction messianique, s’accomplissent dans le Christ les paroles des prophètes, et surtout celles d’Isaïe, au sujet du serviteur de Yahvé : «Dans ses blessures, nous trouvons la guérison» (Is. 53, 5).

Le Christ, en tant qu’homme qui souffre réellement et terriblement au jardin des Oliviers et sur le Calvaire, s’adresse au Père, à ce Père dont il a annoncé l’amour aux hommes, dont il a fait connaître la miséricorde par toutes ses actions. Mais la terrible souffrance de la mort en croix ne lui est pas épargnée, pas même à lui : «Celui qui n’avait pas connu le péché, Dieu l’a fait péché pour nous» (2 Cor. 5, 21), écrira saint Paul, résumant en peu de mots toute la profondeur du mystère de la croix et en même temps la dimension divine de la réalité de la rédemption ~

Sainte Hélène trouve la sainte Croix,
fresque du monastère de Stavrovouni, Chypre
La croix plantée sur le calvaire, et sur laquelle le Christ tient son ultime dialogue avec le Père, émerge du centre même de l’amour dont l’homme, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, a été gratifié selon l’éternel dessein de Dieu. Dieu, tel que le Christ l’a révélé, n’est pas seulement en rapport étroit avec le monde en tant que Créateur et source ultime de l’existence. Il est aussi Père : il est uni à l’homme, qu’il a appelé à l’existence dans le monde visible, par un lien encore plus profond que celui de la création. C’est l’amour qui non seulement crée le bien, mais qui fait participer à la vie même de Dieu Père, Fils et Esprit Saint. En effet, celui qui aime désire se donner lui-même.

La croix du Christ au Calvaire se dresse sur le chemin de cette admirable communication de Dieu à l’homme qui contient en même temps l’appel qui lui est adressé à participer, en s’offrant lui-même à Dieu et en offrant avec lui le monde visible, à la vie divine : à participer en tant que fils adoptif à la vérité et à l’amour qui sont en Dieu et proviennent de Dieu. Sur le chemin de l’élection éternelle de l’homme à la dignité de fils adoptif de Dieu, surgit précisément dans l’histoire la croix du Christ, Fils unique, qui, «lumière née de la lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu» (Credo de Nicée-Constantinople), est venu donner l’ultime témoignage de l’admirable alliance de Dieu avec l’humanité, de Dieu avec l’homme – avec chaque homme. Ancienne comme l’homme, puisqu’elle remonte au mystère même de la création, puis rétablie bien des fois avec un seul peuple élu, cette alliance est également l’alliance nouvelle et définitive ; établie là, sur le Calvaire, elle n’est plus limitée à un seul peuple, à Israël, mais elle est ouverte à tous et à chacun.

Reliquaire de la sainte Croix, chapelle "Mater Dolorosa" du Golgotha,
basilique du Saint-Sépulcre de Jérusalem
Que nous dit la croix du Christ, qui est le dernier mot pour ainsi dire de son message et de sa mission messianiques ? Certes, elle n’est pas encore la parole ultime du Dieu de l’Alliance, qui ne sera prononcée qu’aux lueurs de cette aube où les femmes d’abord puis les Apôtres, venus au tombeau du Christ crucifié, le trouveront vide et entendront pour la première fois cette annonce : «Il est ressuscité». Ils la rediront à leur tour, et ils seront les témoins du Christ ressuscité. Toutefois, même dans la glorification du Fils de Dieu, la croix ne cesse d’être présente, cette croix qui – à travers tout le témoignage messianique de l’Homme-Fils qui a subi la mort sur elle – parle et ne cesse jamais de parler de Dieu-Père, qui est toujours fidèle à son amour éternel envers l’homme, car «Il a tellement aimé le monde – donc l’homme dans le monde – qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle» (Jn 3, 16).


La Croix de Jérusalem, flottant sur le jardin des Oliviers à Gethsémani.

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