Vitrail de Saint Raphaël - Dieu guérit -. |
Commentaire de Dom Guéranger, osb.
Le Sauveur
nous apprend que cet esprit immonde, chassé d’une âme, s’en va errant dans les
lieux arides et déserts. C’est là qu’il dévore son humiliation, et
qu’il sent davantage les tortures de cet enfer qu’il porte partout avec lui, et
dont il voudrait se distraire, s’il le pouvait, par le meurtre des âmes que Jésus-Christ a rachetées.
L’Ancien Testament nous montre déjà les démons vaincus, réduits à fuir dans des
solitudes éloignées : c’est ainsi que le saint Archange Raphaël relégua
dans les déserts de l’Égypte supérieure l’esprit infernal qui avait fait périr
les sept maris de Sara. Mais l’ennemi de l’homme ne se résigne pas à rester
ainsi toujours éloigné de la proie qu’il convoite. La haine le pousse, comme au commencement du monde, et il se dit :
« Il faut que je retourne à ma
maison d’où je suis sorti ».
La tentation. Ne batifolons pas avec le démon ! Ne croyons pas que ses cadeaux soient gratuits. Tout à un prix, et le sien est une éternité de malheur. |
Mais il ne viendra pas seul ; il veut triompher, et pour cela il amènera,
s’il le faut, avec lui sept autres démons plus pervers encore. Quel choc se
prépare pour la pauvre âme, si elle
n’est pas vigilante, fortifiée ; si la paix que Dieu lui a rendue n’a
pas été une paix armée ! L’ennemi
sonde les abords de la place ; dans sa perspicacité, il examine les changements qui se sont
opérés pendant son absence. Qu’aperçoit-il dans cette âme où il avait naguère
ses habitudes et son séjour ? Notre Seigneur nous le dit : le démon la trouve sans défense, toute
disposée à le recevoir encore ; point d’armes dirigées contre lui. Il
semble que l’âme attendait cette nouvelle visite. C’est alors que, pour être
plus sûr de sa conquête, l’ennemi va chercher ses renforts. L’assaut est donné ; rien ne
résiste ; et bientôt, au lieu d’un hôte infernal, la pauvre âme en recèle
une troupe ; « et,
ajoute le Sauveur, le dernier état de cet
homme devient pire que le premier ».
Comprenons
l’avertissement que nous donne la sainte Église, en nous faisant lire aujourd’hui
ce terrible passage de l’Évangile. De
toutes parts, des retours à Dieu se ménagent ; la réconciliation va
s’opérer dans des millions de consciences ; le Seigneur va pardonner sans
mesure ; mais tous persévéreront-ils ?
Saint Raphaël et Tobit, par Sassoferrato |
Lorsque le
Carême reviendra dans un an convoquer les chrétiens à la pénitence, tous ceux
qui, dans ces jours, vont se sentir arrachés à la puissance de Satan,
auront-ils maintenu leurs âmes franches et libres de son joug ? Une triste
expérience ne permet pas à l’Église de l’espérer. Beaucoup retomberont, et peu de temps après leur délivrance, dans les
liens du péché.
Oh ! S’ils étaient saisis par la justice
de Dieu en cet état ! Cependant, tel sera le sort de plusieurs, d’un grand
nombre peut-être. Craignons donc la
rechute ; et pour assurer notre persévérance, sans laquelle il nous
eût peu servi de rentrer pour quelques jours seulement dans la grâce de Dieu, veillons désormais, prions, défendons les
abords de notre âme, résignons-nous au combat ; et l’ennemi,
déconcerté de notre contenance, ira porter ailleurs sa honte et ses fureurs.
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