dimanche 18 novembre 2018

La mort, source de béatitude

Jan van Eyck, le Paradis, la résurrection
des morts et l'Enfer

Du vénérable abbé Henri Marie Boudon, « Science et pratique du Chrétien », chap. 6

Parmi les grands amants du Fils de Dieu, non seulement on y désire la mort, mais on est dans une certaine douleur de ce qu’elle tarde à venir !
Sainte Thérèse était dans cet état lorsqu’elle chantait si souvent dans un cantique que l’amour de Jésus lui avait inspiré : Je meurs de ce que je ne meurs pas.

Mais les ardeurs du zèle de l’amour de Notre Seigneur qu’avait ce religieux de la Compagnie de Jésus dont il est parlé dans la vie du grand serviteur de Dieu, le Père Balthazar Alvarez, étaient bien admirables puisqu’il protestait qu’il serait mort de douleur s’il avait été assuré de ne pas mourir chaque jour. Ah ! disait ce zélé amant du Fils de Dieu, serait-il bien possible de pouvoir vivre si l’on était certain d’être douze ou vingt-quatre heures sans aimer Jésus parfaitement, et dans l’entière pureté du Divin amour, ce qui n’arrivera dans toute son étendue qu’après la mort ?

(…) Ainsi ces désirs de l’amour consommé se reposent dans Jésus aimé et laissent l’âme parmi ses plus grands efforts, dans une paix toute divine car, étant inspirés par l’Esprit de Dieu, ils sont accompagnés du repos sacré qui le suit ; au contraire de ces désirs qui viennent de l’esprit de la nature et qui laissent le trouble et l’inquiétude.

Cependant, ces grandes âmes qui vivaient dans les feux et les flammes de l’amour de Jésus et qui n’eussent pas voulu ou avancer ou retarder leur mort d’un moment hors de son ordre, quand ce Souverain de toutes choses leur en aurait donné le pouvoir, ne pouvaient pas, sans se tirer de cette conformité, s’empêcher de temps en temps de soupirer après sa bienheureuse vue.

C’est ce qui faisait dire à sainte Thérèse, quand elle entendait sonner l’horloge : Voilà qui va bien, ô la bonne chose, ces heures qui abrègent le temps de ma vie me font approcher plus près de la mort.

J’entendis un jour un homme, qui aspirait beaucoup à l’amour de l’adorable Jésus, dire ces paroles comme on lui demandait à l’ordinaire comment il se portait : Ô que ma santé m’est une grande maladie, puisqu’ elle m’éloigne de la mort et que la maladie me serait une grande santé, puisqu’en me faisant mourir elle me mettrait dans le parfait amour de Jésus.

Là-dessus il témoignait un grand étonnement de la joie que l’on se marque les uns aux autres de la bonne santé, ce qu’il estimait être une désolation sans pareille. Ah ! Dieu, disait-il, encore quelle douceur et quelle consolation dans tous les accès des maladies qui surviennent, puisque ce sont autant de sujets d’espérer que la vie présente pourra bientôt finir.

Mais, ô les agréables nouvelles, quand le médecin assure que la maladie est mortelle et qu’il n y a plus d’apparence que l’on puisse vivre plus longtemps.
O aimable Jésus, que mon âme languisse et se consume du désir de vous voir dans la sainte Sion.
Que mon cœur et ma chair brûlent d’ardeur de vous y aimer éternellement !
Heureux celui qui habite dans votre maison, heureux celui qui a mis en vous seul tout son appui !
O Seigneur, disposez vous-même dans mon cœur les moyens d’avancer vers vous dans cette vallée de larmes et, cependant que mon âme soupire après vous comme le cerf soupire avec ardeur après les sources des eaux.
Que mes larmes deviennent mon pain durant le jour et durant la nuit, jusqu’à ce que je paraisse devant votre face, ô mon Dieu.
Je me suis souvenu de choses et j’ai répandu mon âme en moi, même parce que j’espère entrer jusques dans votre maison où, parmi les chants de louange des saints Anges, je vous bénirai à jamais.
O mon âme donc, pourquoi êtes-vous triste et pourquoi me troublez-vous ?
Espérons en Jésus notre Dieu et notre miséricorde, car nous lui rendrons encore nos actions de grâces, il est le salut et la joie de notre visage, il est notre Dieu.





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