Glorieuse Trinité,
vous êtes un abîme infini dans lequel il faut que tout esprit du ciel et de la
terre se perde, car il n’y a point d’esprit, soit humain, soit angélique, qui
puisse pénétrer entièrement ce que vous êtes et ce que vous faites.
L’hymne du silence
vous est dû, même dans la sainte Sion dans laquelle les séraphins se voilent la
face pour marquer qu’ils sont dans l’impuissance de comprendre et d’expliquer
parfaitement vos grandeurs et vos bienfaits incompréhensibles. L’obscurité et
les nuages vous environnent comme nous le déclare votre divine parole, car
comment pourrions-nous découvrir entièrement vos éternelles bontés ? Ici
mon âme, ô très sainte Trinité, se trouve tout abîmée en votre suradorable
présence.
Que vous
rendrai-je pour tous les bienfaits que j’ai reçus de votre aimable
Providence ? Vous m’avez donné tout ce que je suis ; je tiens mon
être et toutes les opérations de mon être de votre divine main. Vous avez pensé
à moi de toute éternité, vous y pensez incessamment avec autant d’affection que
si j’étais seul au monde. Vous n’êtes pas un seul instant sans me regarder et
vous me considérez avec bonté quand je ne pense pas à vous, et lors même que je
suis dans l’impuissance d’y penser.
Retable de la Très Sainte Trinité, d'après l'icône de la philoxénie d'Abraham de Saint André Roublev. |
Vous voyez toutes
mes actions, tous mes gestes, tous mes mouvements avec une patience et une
douceur incroyables. Il n y a pas une seule de mes pensées qui ne demeure à
toute éternité dans votre connaissance. Mais le bienfait immense de la
rédemption, les effets précieux et immuables qui en arrivent, la vocation au
Christianisme, tant de grâces singulières dont vous m’avez prévenu si
miséricordieusement, la longue patience que vous avez exercée en me souffrant
dans mes énormes ingratitudes, les soins si assidus et extraordinaires que
votre Providence adorable a pris de tout ce qui regarde mon corps et mon âme,
le temporel et le spirituel, devraient me consumer d’amour sans aucune réserve.
Mais hélas !
bien loin d’avoir fait un bon usage de tant de dons et de tant de faveurs, je
ne remarque que des ingratitudes qui n’ont jamais rien eu de semblable et je
suis obligé d’avouer en votre présence et celle de vos saints anges et de toute
la cour céleste et de tous les hommes, s’il m’était possible, que je suis la
créature la plus ingrate qui fut jamais, et que je mérite d’être au plus
profond des enfers, au-dessous de tous les damnés.
C’est un aveu
sincère que je vous fais de tout mon cœur, ne pouvant assez expliquer ni la
grandeur, ni la multitude de mes ingratitudes. Qui me donnera des torrents de
larmes pour pleurer jour et nuit inconsolablement mes épouvantables
infidélités ? Mais qui me donnera une voix assez forte pour publier vos
miséricordes, pour raconter vos bienfaits ? Je vois bien que c’est ce que
je ne puis jamais faire dignement !
La Trinité sainte entourée d'Anges et adorée par la cour céleste. |
Adorable Jésus qui
êtes notre tout en toutes choses, venez à mon secours Trinité sainte, prenez-en
lui toute la reconnaissance qui vous est due, prenez en lui toutes les
satisfactions que demande votre justice ! Qu’il soit mon oraison pour
obtenir la continuation et l’augmentation de vos miséricordes. Et comme c’est
lui seul qui peut vous satisfaire, qui peut vous remercier autant que vous le
méritez, je vous le présente, je vous l’offre en autant de lieux qu’il y a d'autels où il s’immole tous les jours à votre suprême grandeur.
C’est par le culte
qu’il vous rend par la gloire que vous eut, recevez ce que vous en avez reçue
et que vous en recevrez éternellement, que je désire vous honorer et vous
glorifier. C’est par ses mains sacrées que je vous offre ce petit ouvrage que
vous m’avez fait la grâce d’écrire à votre honneur et que votre divine
Providence, sans laquelle rien n’arrive, me fait vous présenter dans le jour
que toute l’Église célèbre votre fête. Bénissez-le au nom de cet aimable
Sauveur pour votre plus grande gloire ! C’est en qualité de l’un de ses
membres, car vous m’avez comblé de cette grâce inestimable que je vous demande
en toute humilité et par tous ses mérites, celle de vous glorifier
incessamment, souverainement et uniquement dans tous les moments qui me restent
de vie, dans le moment de ma mort, pour ne cesser jamais de vous glorifier
après ma mort.
Ah ! Dieu
seul ! Dieu seul en trois personnes ! toujours Dieu seul dans l’union
de notre bon Sauveur, Jésus-Christ, pour le temps et pour l’éternité ! Ainsi
soit-il !
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